Le marché

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Enfoui sous ma couette, je n'arrête pas d'y penser. J'en tremble encore rien que d'y songer. Et j'ai cogité toute la nuit. Mon père a tenté de me violer hier soir. Je me suis défendu mais je suis si frêle que mon père n'a eu aucune difficulté à me maîtriser. Je n'ai jamais eu aussi peur de ma vie. Une chance pour moi que ma mère soit arrivée à temps pour empêcher mon père d'aller trop loin et elle l'a chassé. Elle m'a protégé. Non, en fait elle a protégé sa fille. Si elle m'avait considéré comme un garçon, je suis certain qu'elle aurait laissé son mari faire ce qu'il voulait. D'un autre côté, si ma mère ne me considérait pas comme une fille, mon père n'aurait peut-être pas tenté de me violer.

Je me recroqueville en sentant un frisson parcourir mon corps. J'entends encore mon père me dire combien je suis belle et existante. Je sens encore ses baisers dans mon cou, sur mes lèvres, ses mains glisser sur mes cuisses menues, sous mon chemisier. Une profonde envie de vomir me prend. Je plaque mes mains sur ma bouche. Je me sens mal d'un seul coup.

- Allons, ma pouce, tout va bien, me dit doucement ma mère en posant sa main sur la bosse que je forme sous ma couette.

Je ne me détends pas pour autant. Ce matin, ma mère est calme. Mais je le sais trop bien, ça peut changer en une fraction de seconde, dans un sens comme dans un autre. Tout dépend. C'est ce qui s'est passé hier soir, après qu'elle ait chassé son mari. Elle s'en est prise à moi en me traitant de trainée. Elle m'a attrapé par les cheveux et m'a secoué dans tous les sens tout en m'insultant. Et puis, d'un seul coup, elle m'a pris dans ses bras pour me cajoler en me disant que mon père ne faisait plus partie de nos vies, qu'on ne resterait que toutes les deux, elle et moi. Et moi, je n'ai rien dit. J'ai simplement laissé ma mère me caresser les cheveux.

- Il faut te lever maintenant, ma puce, sinon tu vas être en retard au collège.

Je sens ma mère se lever. Lorsque je me décide à sortir de dessous ma couette, je suis seul dans ma chambre. Je me lève en me brélant dans ma chemise de nuit, comme d'habitude. Ma mère m'a toujours considéré comme une fille et à la maison, je dois être habillé en fille, parler et me comporter comme telle. Mais dehors, je peux encore être un garçon. Enfin jusqu'à ce que j'échoue dans la classe E. Maintenant, je dois être une fille à longueur de temps.

Je soupire en regardant l'uniforme des filles que je dois porter. Et je n'ai pas intérêt de me comporter comme un garçon parce que ma mère le saura. Il y avait toujours une bonne âme pour lui dire que je ne me suis pas comporté comme il faut. Alors pour tous mes camarades de classe, je suis une fille et je fais très attention. Mais ce matin, j'ai un mauvais pressentiment.


- Nagisa-kun !

Je le savais. Je n'aurai pas dû aller en coure ce matin ! Mais je n'avais pas eu le choix. Ma mère n'a pas voulu que je reste à la maison. Seulement, ce matin, un nouvel élève est arrivé dans la classe E. Enfin, un revenant plutôt. Karma Akabane est revenu de son expulsion et il avait échoué dans la même classe que moi. Mais voilà, Karma et moi, on se connait. On a déjà été dans la même classe et le rouge sait parfaitement que je ne suis pas une fille, ce que la classe ignore. Et Karma est du genre à dire ce qu'il pense et tant pis pour les conséquences.

Seulement voilà, jusque-là, il n'a rien dit. Ça m'étonne, ça faisait plus d'une semaine qu'il est revenu et qu'il n'a toujours rien dit, même pas une toute petite allusion. Je suis en stress permanent. Si les autres apprennent que je suis un garçon en fait... ce serait trop la honte pour moi. Comment expliquer que ma mère m'oblige à m'habiller en fille ? Mais là, je ne peux pas faire autrement que de parler à Karma parce que le rouge vienne de me saisir le bras et il m'a coincé contre le mur du couloir.

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