D'élève à maître

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« Cela fait huit ans maintenant. Huit ans que j'ai quitté le Sanctuaire.

La raison.

Mon maître est mort. Il a été tué.

Par qui ?

Je ne sais pas. J'ai simplement sentit que sa vie disparaissait brutalement.

Pourquoi ?

Pour tuer Athéna.

Pourquoi suis-je parti alors que je dois la protéger ?

Simplement parce que la petite déesse n'est plus au Sanctuaire. J'en suis sûr, quoiqu'en dise le Grand Pope. Alors n'étant pas du même avis que mes amis, je suis parti. De toute façon, ce n'est pas le Grand Pope. J'en sais quelque chose !

Retour au Tibet, le Mont Jamir. Là où je me suis entrainé avec mon maître. Là où il m'a trouvé. Il m'a toujours dit que, comme lui, j'appartenais à ces montagnes. Sans jamais m'en dire plus que « je suis l'un des derniers Atlantes ». Ces montagnes qui m'entourent recéleraient donc le secret de mes origines, de ma naissance.

Ça a été dur au début. De vivre tout seul ici. Mais je m'y suis fait. Je parcours les montagnes. Pourtant je ne les connais pas aussi bien que ça. Elles ne livrent pas aussi facilement leurs secrets. Mais je suis bien avec elles. Elles m'apaisent. Je me promène souvent sur leurs flancs. Les sentiers sont quasiment inexistants. Je laisse les souvenirs affluer. Ils vont et viennent, me laissant parfois un goût un peu amer. Mais il faut bien faire avec, le passé ne se réécrit pas.

Parfois il m'arrive de m'arrêter, plongé dans des souvenirs plus lointains encore. Ils sont flous. Ce sont plus des sensations que de véritables souvenirs.

Ici, je me sens seul. Mais je sens aussi que je ne le suis pas. Ils ne sont plus là depuis longtemps, les habitants de ce village. Les dernières traces de vie humaines datent d'y il y une bonne douzaine d'année. Ce sont les miennes. Je crois que c'est de ce côté que mon maître m'avait trouvé. Mais c'est trop loin. C'est presqu'étrange de revenir ici. Suis-je vraiment revenu au hasard de mes pas ou bien... c'est autre chose qui m'a guidé.

Alors je m'attarde. Il y a des ombres ici, je sens les présences d'âmes égarées. Il y avait tout un village jadis. Mais il n'y en a plus aucune trace. Donc les maisons ont disparu depuis très longtemps. Mais sans laisser la moindre trace. C'était comme tout avait simplement été effacé.

Quelque chose attire soudain mon attention. C'est comme si d'un seul coup, je n'étais plus seul. Mais j'ai beau chercher autour de moi, je ne vois rien. Je ne sens plus rien. Je suis de nouveau seul parmi les âmes errantes.

Pourtant cette sensation m'intrigue, elle était si réelle. Alors je reviens tous les jours. Au début, je ne l'ai pas ressenti. Et puis, peu à peu, je suis parvenu à discerner les âmes errantes de cette petite présence, différente mais déjà puissante. Au fil des jours, sa présence devient plus distincte, plus précise. Parfois même, j'ai l'impression de l'apercevoir. Mais il est craintif à mon égard. Alors pour ne pas l'effrayer, je reste immobile, les yeux fermés, pour lui laisser le temps de m'observer.

Je faisais pareil. Je m'en souviens à présent. J'ai longtemps observé ce vieil homme à la longue robe bleue nuit. La première fois que je l'ai vu, ce sont ses longs cheveux verts qui m'ont intrigué. Du vert par ici, il n'y en a pas beaucoup ! Et son sourire si paisible...

Alors j'essaie moi-aussi d'être aussi paisible que l'était mon maître. Je le sens tous les jours. Il est moins craintif et de plus en plus curieux. Il tourne autour de moi. Il est espiègle. Bien plus que je ne l'étais. Et puis, un jour... »

- Tu dors ?

« Je souris. Je sens son étonnement. »

- Non.

- Pourquoi tu fais semblant de dormir ?

- Pour que tu n'ais plus peur de moi.

- Pourquoi ?

- Je t'attends.

- Pourquoi tu m'attends ?

- Pour qu'un jour, tu sois chevalier à ma place.

- Et je fais comme pour ça ?

- Il faut s'entrainer.

« J'ouvre enfin les yeux. Je suis surpris. Il est plus proche de moi que je ne l'aurai cru avec ses deux points au-dessus de ses yeux bleus remplis de malice. Sa tignasse rousse semblait aussi indisciplinée que lui.

Il me regarde me lever et m'éloigner. Son petit visage reflète l'étonnement. Mais l'intérêt aussi. À lui de voir s'il veut ou non me suivre. »

OS en pagailleWhere stories live. Discover now