Fanfiction Leiftan - Lying Trust

31ème Souvenir

Il avait fallu une semaine entière à Ashkore pour atteindre le camp des mercenaires humains.

Il lui avait fallu moins d'une heure pour tous les exterminer.

- Une bien belle journée...
L'homme masqué leva les yeux vers le gigantesque ciel bleu qui lui tendait les bras, souriant : il se sentait tellement mieux, maintenant ! Rien de tel qu'un peu d'exercice pour se remettre les idées en place. L'odeur du sang lui avait terriblement manqué ces derniers temps...

Il enjamba méticuleusement la marée de cadavres qui lui faisait face, savourant les râles d'agonie des quelques survivants tombés au sol, et qui ne pouvaient qu'attendre que la mort vienne les chercher à leur tour. Ces humains, de simples humains, avaient osé défier Leiftan, un Daemon : à quoi s'attendaient-ils ? Une récompense... ? Quelle bande d'idiots.

Oui, Ashkore évoluait dans un décor on ne peut plus somptueux : un camp de mercenaires humains, qu'il avait soigneusement décimé à vitesse grand V, libérant ainsi toutes les pulsions meurtrières qu'il s'était retrouvé forcé de dominer ces dernières semaines. L'oeuvre était digne d'un grand artiste, et il en était fier : une toile vermeille, un sol jonché de corps découpés, quelques têtes qu'il s'était amusé à suspendre aux arbres, histoire de rappeler à leurs autres "alliés" ce qu'il en coûtait de désobéir aux directives venues du dessus.
- Bon, c'est que j'ai pas que ça à faire, soupira-t-il, déçu de devoir laisser derrière lui ce magnifique paysage macabre.

Mais avant qu'il n'ait pu esquisser un nouveau pas, Ashkore sentit quelque chose le retenir par la jambe : il baissa les yeux, sceptique, vers l'une de ses victimes à l'agonie, qui visiblement avait choisi de prendre son temps pour mourir :
- D... Démon... Ha... Mes camarades...

Dans sa grande mansuétude, il daigna s'accroupir auprès de celui qu'il avait sauvagement trucidé quelques minutes auparavant, et prit le temps de le contempler d'un peu plus près : c'était un humain aux cheveux châtains, dont il avait soigneusement redessiné la colonne vertébrale à l'aide de son poignard, couvrant ainsi son dos tout entier d'un splendide voile rouge sang... Un protagoniste digne de l'un de ses plus beaux tableaux:
- Oui ? Tes camarades ? Ils sont morts, mais tu ne vas pas tarder à les rejoindre, ne t'inquiètes pas.
L'humain se mit à pleurer de manière pathétique, en crachant un peu de sang, et Ashkore sentit un frisson de plaisir lui parcourir l'échine à la vue de ce ravissant spectacle.
- El... Elryk nous vengera, murmura l'inconnu, ayant mobilisé toutes ses forces pour prononcer ces derniers mots.
Ashkore afficha une petite moue, aussi amusé que séduit par le pathétisme se dégageant de sa victime :
- Elryk ? ... Aaah, ton chef ? Désolé de te décevoir...
Puis, il pencha la tête sur le côté, arborant un rictus moqueur :
- ... Mais le connaissant, il n'aura probablement rien à faire de ta mort, ni de celles de tes amis. Tu ne savais pas? Il a toujours utilisé ses mercenaires comme des pions. Et tu en fais parti.
Songeur, il se gratta le menton du bout du doigt, avant d'ajouter :
- D'ailleurs, je m'apprêtais à lui rendre visite. Il faut qu'on règle un petit "différent", lui et moi. Je lui passerais le bonjour de ta part.

En baissant de nouveau les yeux vers l'humain, Ashkore soupira :
- Il a déjà clamsé... Moi qui lui avait gentiment proposé une faveur.
Lentement, il se redressa, pour contempler une dernière fois le carnage qu'il avait effectué, et qui lui avait permis d'atteindre cet unique état de transe, celui où il pouvait enfin se sentir lui-même : quel bonheur, vraiment, quelle beauté !
Rien ne valait la souffrance d'autrui pour se sentir bien mieux dans ses bottes.

D'un mouvement vif, Ashkore s'élança en avant et se mit à courir : c'était grâce à sa fabuleuse vitesse, celle dont il avait hérité il y a cinq ans maintenant, lorsqu'il avait frôlé la mort, qu'il avait pu atteindre le camp des mercenaires en quelques jours à peine.