Fanfiction Leiftan - Lying Trust

12ème Souvenir

L'état d'agitation dans lequel se trouvait Leiftan ce soir-là était inhabituel.

Il fallait qu'il s'isole, au plus vite : il courut jusqu'au repaire secret qu'il partageait avec Ashkore, loin de la nuit étoilée, loin du QG et de ses mensonges, et surtout, loin d'elle.

Une fois la porte dérobée refermée derrière lui, il attrapa la première chose qui lui passa par la main, une lampe de chevet en l'occurrence, avant de l'envoyer valser à l'autre bout de la pièce : elle percuta un meuble avant de se briser en mille morceaux, dans un vacarme assourdissant.
Merde...

Ses doigts se serrèrent brièvement autour de son propre cou : il avait la gorge sèche. Il attrapa immédiatement une bouteille d'eau sur la table, qu'il vida en quelques secondes, avant de la broyer d'une main et de la jeter par terre.

Sa soif n'était pas étanchée. Il lui en fallait plus.

Mais il savait qu'il ne s'agissait pas du genre de besoin qu'il pouvait satisfaire facilement. Non, l'origine de sa faim était d'une toute autre nature... et rien de ce qui se trouvait ici ne pourrait le rassasier. C'était comme si chaque cellule de son corps s'était mise à vibrer, à se contracter, dès le moment où il s'était éloigné d'elle. Pourquoi ?? Il y avait forcément une explication à cette exigence inhabituelle de la part de son corps.

En quelques pas rapides, il s'approcha du canapé pour s'y allonger, plaquant sa paume contre son front de manière à couvrir également ses yeux, dans l'espoir vain que cette position de méditation qui lui était propre parviendrait à le calmer un peu. Il avait l'impression qu'un venin mortel était en train de se propager dans tout son corps pour le ronger de l'intérieur, convulsant chacun de ses membres avec force, embrouillant ses pensées. Son coeur battait frénétiquement dans sa poitrine, et son sang d'Aengel, qui s'était réveillé au cours de la soirée, se déchaînait dans ses veines, sans paraître vouloir s'arrêter.
L'écho de son démon intérieur raisonnait encore dans sa tête, affamé et insatisfait.

Il avait failli perdre le contrôle, et s'en était rendu compte juste à temps.
Mais qu'en serait-il la prochaine fois?

En entendant la porte s'ouvrir juste derrière lui, un soupir exaspéré lui échappa.
Il savait exactement ce que cela signifiait...
- ...Oooh, toi, t'as la tête de quelqu'un qui a fait une connerie !
- Fiche moi la paix...
Ashkore se tenait à quelques mètres de lui, un sac rempli de nourriture volée sur le dos. Son regard s'était posé sur la lampe éclatée au sol, mais cela ne parut pas le surprendre plus que ça. Leiftan était fatigué d'avance à l'idée de devoir répondre à ses questions.
D'ailleurs, rien ne l'obligeait à le faire.
- C'est pas très gentil de dire ça... Moi qui t'avait apporté des gâteaux, répondit son fidèle associé d'un ton faussement boudeur.
Au mot "gâteaux", Leiftan tourna légèrement la tête vers lui : ce crétin savait décidément comment s'y prendre pour l'appater...
Il était aussi parfaitement conscient qu'Ashkore avait volontairement fait le choix de changer de sujet, suffisamment malin pour ne pas tâter le terrain avant qu'il n'ait retrouvé son calme.
Par moment, il devait reconnaître qu'il admirait son associé.
Voire même qu'il l'adorait.
- Tiens, prends ça.
Il sortit un paquet de biscuits de son sac, avant de le lui lancer : le précieux artefact lui aurait atterri en pleine figure s'il ne l'avait pas attrapé en plein vol, habitué à ce genre de plaisanterie de la part de son allié, à qui il adressa un regard faussement menaçant.
- Mange, au lieu de bouder, lui rétorqua l'autre, peu impressionné. 

Leiftan soupira longuement, en ouvrant la boîte de gâteaux : il raffolait de ces petits biscuits secs, recouverts d'un carré de chocolat et qui ne pouvaient s'obtenir que sur Terre. Il s'empara d'une poignée d'entre eux, avant de les engloutir en quatrième vitesse, sous le regard amusé de son collègue :
- Eh bah putain, t'avais faim...
L'Aengel ne releva pas ce commentaire, qui pouvait intentionnellement être compris de deux façons différentes. Ashkore avait toujours aimé jouer sur les mots, presque autant qu'il aimait jouer avec ses victimes.
L'arrivée de son associé avait pourtant un peu calmé ses ardeurs, bien que cette horrible sensation de désir inassouvi continue à le bouffer de l'intérieur. La boîte de biscuits fut rapidement vidée et, quand il le constata, Leiftan sentit la frustration remonter brièvement en lui : il lança le paquet vide par terre, avant s'effondrer une nouvelle fois sur le canapé, exaspéré, mais un peu plus calme.
- Ca y est, t'as fini ton caprice?
Il ne répondit pas à la remarque narquoise de son associé, se contentant de fermer les yeux pour mieux se concentrer et retrouver un minimum de son sang-froid légendaire.
Ce dernier vint s'asseoir sur une chaise, en face du canapé : il avait posé ses coudes sur ses genoux et joints ses mains, prenant la position d'un mauvais inspecteur de série policière sur le point de procéder à l'interrogatoire du principal suspect.
- Ca fait bien longtemps que je ne t'avais pas vu dans un tel état, constata-t-il.
Il n'avait pas tort là-dessus : Leiftan lui-même ne se souvenait pas de la dernière fois où ses pulsions s'étaient manifestées de manière aussi violente. Il avait toujours su se contrôler jusqu'ici, même entouré de personnes qu'ils rêvaient de faire souffrir : son imagination avait toujours suffi à le soulager, même dans les moments les plus critiques.