Chapitre 15 : Boulden, de nos jours. (2/2)

130 17 13
                                    

Un peu à l'écart, proche d'une table, Deirane repéra la pentarque. Celle-ci avait troqué sa tenue habituelle, tunique et pantalon de cuir, par une robe qui jouait sur son physique d'adolescente. Couleur feuille morte, elle était près du corps et s'arrêtait à mi-cuisses. Beaucoup de jeunes filles dans l'archipel en portaient de semblables. Accessoirement, on pouvait voir qu'elle ne portait aucune arme sur elle. Elle cherchait à donner une impression de fragilité. Deirane avait suffisamment entendu parler d'elle pour savoir que c'était un mensonge. Ni jeune ni inoffensive. La réalité était qu'elle adorait la mort. Elle l'excitait au point d'indisposer parfois ses propres hommes.

Ses deux interlocuteurs n'avaient certainement jamais tué la moindre personne de leurs mains. Dans la force de l'âge, ils étaient habillés avec recherche et bon goût, loin de l'austérité de la noblesse de Boulden, sans les excès tapageurs des nouveaux riches. De toute évidence, une femme conseillait l'individu sur son apparence et il l'écoutait. Il se dégageait d'eux un air aristocratique qu'aucun autre convive ne partageait. La femme ne manqua pas de surprendre Deirane. Elle avait à peu de chose près le même âge que son compagnon. Loin des partenaires décoratives que les autres arboraient à leur bras, elle avait la prestance d'une reine et attirait davantage le regard malgré sa beauté fanée.

— Le prince et la princesse de Boulden, murmura une voix connue à son oreille.

Elle lâcha le bras d'Hester pour se retourner. Saalyn s'était approchée derrière eux. Elle était sublime. Deirane le lui dit. Sous le regard époustouflé du jeune homme, elle tournoya pour se faire admirer. Elle portait une robe diaphane laissant les épaules et le haut de la poitrine nues et s'arrêtant à mi-cuisses. Elle était recouverte d'une multitude de paillettes. On aurait dit qu'elle avait décidé de rivaliser avec Deirane pour la quantité de diamants. Ses escarpins étaient aussi lumineux que sa tenue. Sur chaque ongle peint en blanc, un petit brillant était collé. Ses cheveux, relevés en chignon pour découvrir la nuque, étaient maintenus en place par une résille argentée. Même son maquillage, dans son excès, renforçait cette impression de lumière. La blancheur d'albâtre de sa peau était soit due à un maquillage particulièrement soigné, soit à la particularité des stoltzt de changer de couleur à volonté. Dans ce dernier cas, conserver une telle teinte toute la nuit allait constituer un véritable exploit. De toute évidence, elle avait des accointances avec les edorians pour avoir obtenu une telle robe et hormis la taille elle aurait pu passer pour telle. Une edoriane particulièrement impudique et indécente.

L'exhibition terminée, la guerrière s'approcha du couple. Au passage, elle jeta un coup d'œil appréciateur à Hester.

— Il va falloir mettre les jeunes filles à l'abri ce soir, les têtes vont tourner,

Deirane eut droit aussi à ce même regard, ce qui lui fit ajouter :

— Tu es superbe, les ans n'ont pas de prise sur toi.

— Plus que sur toi malheureusement. Ta robe est magnifique, j'ignorais que tu en avais une semblable.

— Je ne passe pas mon temps à pourfendre les méchants avec mon épée. Il m'arrive d'avoir des moments où j'ai un comportement plus en accord avec ce que vous humains considérez comme bienséant pour une femme.

— Bienséant.

Deirane examina Saalyn de la tête aux pieds.

— Tu as dû mal assimiler cette notion.

Saalyn éclata d'un rire joyeux.

Derrière elle, un jeune stoltzen faisait le pied de grue. Jeune et bien fait de sa personne, il avait une tenue plus sobre que sa compagne de soirée. Lorsque Deirane l'accueillit d'un salut de la tête, il s'avança.

La Paysanne (La malédiction des joyaux - livre 1)Where stories live. Discover now