Chapitre 8

338 14 4
                                    

Tous sursautèrent. Des bruits de pas se firent entendre et tête pointa derrière la porte du bureau.

- Oh, je dérange peut-être ? reprit la voix à l'accent caractéristique.

Exactement.

Il dérangeait BEAUCOUP.

Elwin et lui avaient-ils fondés le Club des Elfes qui s'Amusaient à Interrompre les Conversations les Plus Importantes Au Moment Précis Où Quelqu'un Allait Révéler Quelque Chose - aussi appelé Club des E.A.I.C.P.I.A.M.P.O.Q.A.R.Q.C., difficile à prononcer, je vous l'accorde - ?

- Absolument pas, Fitz ! le rassura Sophie.

Mais bien sûr, c'était cela ! Ce n'était ABSOLUMENT PAS grave s'il était intervenu pile au moment où Sophie allait dévoiler le prénom de la personne qui en voulait à Linh ! ABSOLUMENT PAS grave !!!

Ayena soupira. C'était à peine si elle savait la première lettre du prénom du mystérieux elfe : N.

Fitz entra dans la pièce, tout sourire. Ce même sourire qui faisait fondre nombre de jeunes filles - dont Sophie faisait indéniablement partie. L'Emissaire alla embrasser sa femme puis enlaça sa fille.

- Ta mission s'est bien passée ? demanda l'Eclipseuse.

- Comme sur des roulettes ! s'exclama-t-il, apparemment fier de lui. Certes, la Conseillère Alina m'exaspère toujours, mais j'ai bien l'impression qu'elle ne changera jamais.

- Ce n'est pas moi qui te contredira sur ce point, soupira la Gardienne. Vous voulez boire ? Il doit rester du jus de luxuriante, si Errol ne l'a pas fini entre temps.

- C'est vrai que je ne serais pas contre un petit rafraîchissement, approuva le père d'Ayena.

- Voulez-vous que je vous apporte le jus de luxuriante ? proposa une gnomide qui venait de faire son apparition aux portes du bureau.

- C'est gentil, Feïlda, mais je vais m'en charger, déclina Sophie qui s'éloignait déjà.

- Non, Sophie, rétorqua Fitz en se levant à son tour. Je peux le faire.

- S'il te plaît, Fitz, dit-elle. Ne sois pas ridicule. J'y vais.

Le brun soupira.

- Bon, très bien.

Il réduisit d'un seul pas la distance entre eux et souleva les mèches blondes de la télépathe pour apposer ses lèvres contre les siennes.

- Je t'aime, mon petit colibri.

Elle sourit, se détacha de lui et disparut dans le couloir. L'Emissaire se laissa tomber dans un fauteuil.

- Tu ne m'as jamais précisé pourquoi tu l'appelles comme ça, fit remarquer Ayena.

- Il n'y a pas de raison particulière, lui assura-t-il, fermant les yeux pour profiter de la sérénité de Saydaen. Ca lui va bien, c'est tout.

L'Eclipseuse voyait bien qu'il mentait. Inutile d'être Empathe pour le comprendre. Il y avait une raison si on associait toujours sa mère au colibri lunaire, mais elle lui restait jusque là inconnue.

Sophie revint au bout de quelques minutes. Quel dommage qu'il n'y ait pas d'Invocateur dans la famille ! Ayena prit le temps de boire quelques gorgées avant de passer aux choses sérieuses.

- Maman, papa, j'aimerai vous poser une question.

Tout deux échangèrent un regard circonspect dont la signification échappait à la jeune elfe.

- Laquelle ? la questionna son père qui venait de délaisser son jus de luxuriante sur la table basse.

Elle se mordit la lèvre. A plusieurs reprises.

Puis elle plongea sa main dans sa poche tout en faisant mentalement le tour de toutes les manières possibles et inimaginables de leur annoncer la chose en douceur. Inutile de tourner autour du pot elle devait être directe. Mais pas trop non plus, elle tenait à avoir une réponse positive, si possible.

- En fait, débuta-t-elle, je me tourne vers vous, qui êtes membres d'une association, surtout vers toi, papa, puisque tu es proche du Conseil... pour répondre à une question qui me chiffonne.

- Et pourrions-nous en prendre connaissance ? s'impatienta Sophie.

Ayena s'éclaircit la voix.

- Voilà. Je me demandais si vous aviez déjà vu ceci.

Sur ce, elle sortit le gadget. Un rayon de soleil le parcourut, faisant briller l'œil d'un éclat presque vivant.

La Pyrokinésiste n'aurait su dire si la réaction paniquée de ses parents était bon signe ou pas. Au moins était-elle certaine qu'ils connaissaient le symbole, mais les deux Télépathes paraissaient au bord de l'évanouissement. Ce fut pourtant Sophie qui réagit la première : elle se saisit de l'objet et l'observa sous toutes les coutures. "C'est impossible... C'est impossible..." répétait-elle sans cesse. Fitz, quant à lui, semblait troublé. Ne sachant comment réagir, il affichait une mine mortifiée et resté médusé. Sans doute avait-il eu raison de poser son verre sinon quoi il aurait certainement fini brisé au sol, à l'instar de celui de sa femme.

- Tout va bien ? demanda la gnomide de tout à l'heure qui venait de se présenter de nouveau sur le palier. J'ai entendu du bruit. Que s'est-il passé ?

- Rien, Feïlda, répondit Fitz. Ne t'inquiète pas, retourne donc vaquer à tes occupations.

Un prompt hochement de tête et elle disparut dans le couloir.

Un silence pesant s'installa de nouveau sur le bureau, durant lequel tout le monde se dévisagea sans savoir quoi dire. Finalement, la blonde le brisa :

- Où as-tu trouvé ça, Ayena ?

Son ton grave ne fit qu'intriguer l'intéressée, qui déclara finalement :

- Ca ne vous regarde pas.

- Bien sûr que si ! s'énerva sa mère. Nous sommes tes parents, nous sommes chargés de ta sécurité !

Assez ironique, d'évoquer la sécurité.

- Si tu veux tout savoir, on l'a trouvé à Foxfire, voilà pourquoi je t'ai questionnée à ce sujet.

- "On" ? releva l'Emissaire, haussant un sourcil.

- Un ami et moi.

- Foxfire... répéta Sophie dans un murmure comme s'il s'agissait d'une révélation de la plus haute importance.

Le regard qu'elle échangea avec son époux dura si longtemps qu'Ayena comprit qu'ils se parlaient par Télépathie - ce qui avait le don de l'agacer.

- Est-ce que vous pourriez m'inclure dans votre petite conversation secrète ou s'est trop vous demander ? fit-elle, glaciale.

- Je suis désolé, Ayena, reprit son père.Nous allons devoir garder ce gadget. Comprend-nous, ça pourrait être primordial.

- Tu me demandes de vous comprendre alors que vous ne me dîtes rien ?!

- S'il-te-plaît, Ayena... murmura Sophie.

- Non ! la coupa-t-elle. Vous n'avez même pas répondu à ma question ! Enfin, je suppose que la réponse est oui, mais j'attendais de vous que vous développiez un peu plus.

- Nous ne pouvons pas, objecta sa mère. C'est impossible.

- Et pourquoi ?!

- Pour ton bien ! intervint son père.

"Nous devons le faire, tu m'entends ? Pour le bien de tous."

C'était mot pour mot ce qu'avait dit la Chargeur à sa partenaire pour la convaincre d'attaquer les deux adolescents. Et le fait que son père le redise maintenant perturba la jeune fille. Elle rejoignit le fauteuil le plus proche en titubant, la tête entre les mains.

- Est-ce que tu vas bien ? demandèrent ses parents lorsqu'ils remarquèrent son état perdu.

- O-oui... bredouilla-t-elle.

Puis elle fit de son mieux pour laisser la lumière passer à travers elle, de sorte que personne ne puisse plus la voir. Qu'on la laisse tranquille, c'était tout ce qu'elle voulait.

GDCP~Le retour des InvisiblesWhere stories live. Discover now