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- Oui, tu as compris, il est la raison pour laquelle je suis partie de la maison...

- Quoi ? Ce n'est pas possible.

Son regard se ferme. J'ai beau essayer de décrypter son comportement mais elle ne laisse rien paraît à par un changement brusque d'attitude à l'évocation du passé. Sa respiration est saccadée, son stress est palpable. Je m'approche d'elle, lui prend la main pour l'encourager à continuer de me raconter.

- T'inquiète pas, je ne suis pas à côté de toi pour te juger, je veux juste comprendre et être avec toi maintenant, si tu le veux bien. C'est du passé, mais nous avons besoin de tout savoir l'une de l'autre pour avancer. En tout cas, moi j'en ai réellement besoin pour avancer dans ma vie.

Sa main se resserre sur la mienne, des larmes coulent le long de ses jolies joues. Je lui essuie avec mon pouce puis elle prend une grande inspiration. Elle commence son récit en me disant combien sa décision a été la plus difficile à prendre, elle était jeune et désorientée. Quelques semaines avant son départ, nos parents ont découvert qu'elle se droguait et pas que du cannabis. Ils se faisaient beaucoup de soucis pour elle car son comportement, ses notes ...n'allaient plus du tout, ils ont fini par tomber sur de la cocaïne...

Mon dieu ! Quelle horreur, comment en arriver là ?

Ils lui ont tout pris et jeter à la cheminée pour qu'elle ne puisse pas le consommer. Les disputes ont été insupportables à partir de ce moment. Ils ont tout fait pour qu'elle arrête cette merde, et l'empêchaient de sortir le soir. Si elle avait besoin, ils l'enverraient en centre de désintoxication. Je trouve la réaction de mes parents très bien. Mais manifestement ce n'était pas la bonne pour Alice.

- Malheureusement, quand je suis retournée voir Tom mon petit ami de l'époque, il m'a tout de suite donné ma dose. Je planais complètement et j'étais sous son emprise, il m'a dit que je devais sortir de cette prison qu'était ma famille. Vivre ma vie sans eux. J'étais amoureuse et il m'avait rendu tellement dépendante de lui qu'il était selon lui la meilleur solution.

Qu'elle enflure ce mec. Dans mes souvenirs, je me souviens l'avoir croisé que deux fois. Il me paraissait un ado bien. Très beau, je me rappelle de cela parce que la première fois que je l'ai vu, je suis tombée sous son charme. Du haut de mes sept ans, on aurait dit un prince charmant pour ma sœur, je rêvais de trouver un homme comme lui quand je serais grande.

- Christabelle, je te promets que je ne voulais pas vous quitter, je vous aimais trop. Alors, j'ai continué à me droguer en cachette et à voir Tom le soir en faisant le mur. Jusqu'au jour où papa m'a surprise dans les escaliers pendant que je descendais pour sortir. Il m'a demandé où je comptais aller comme ça, rien de bien méchant sauf que j'étais en manque. Quand il m'a ordonnée de remonter dans ma chambre j'ai pété un plomb. La nuit a été des plus horribles pour moi, le manque de came m'a fait avoir des hallucinations. Dès le lendemain quand j'ai retrouvé mon copain, il m'a donné ma dose et m'a demandé de faire un choix. Il me voyait pleurer de colère contre mes parents.

Elle arrête son récit, je vois la douleur et la honte dans ces yeux. Nos mains sont toujours accrochées, à certain moment la pression est plus intense sur la mienne comme si elle avait peur que je la lâche. Puis elle m'explique que ce soir là, elle s'est cachée devant la maison en espérant que les parents la chercheraient. C'est à cet instant précis que l'on s'est vu pour la dernière fois, dans notre chambre. Sa décision était déjà prise. Elle avait décidé de partir pour faire sa vie sans que personne lui mettent de barrières. Le premier mois tout se passait bien, Tom l'avait recueilli chez lui et ces amis. Dans une sorte de squate... Entre la drogue et le sexe les journées passaient vite et se ressemblaient. Elle avait arrêté les cours, ils lui disaient tous que ça ne servait à rien de toute façon... Jusqu'au jour où on lui a demandé de ramener de l'argent.

- A longueur de journée, j'avais le cerveau complètement dans la brume, je me sentais bien et je croyais être amoureuse... Tom m'a demandé ce que je savais faire. Il fallait que je trouve un boulot pour lui payer toute les doses de drogue que j'avais consommé. Ne sachant pas quoi faire, il m'a dit qu'il s'en occupait et m'a donné rendez-vous dans un appart, il avait inventé toute une histoire et m'avait promis de me rejoindre plus tard. Et, ce soir là, le premier homme est venu me rejoindre dans cet appart miteux. J'ai compris ce qui allait m'arriver et j'ai vomis toutes mes tripes. Le gars m'a trainé dans la douche et m'a fait avaler une pilule avec un grand verre de vodka. Mon esprit, mon corps et mon âme m'ont abandonné. Je me suis laissée faire, c'était la seule solution pour que je rapporte de l'argent. Vendre mon corps à des hommes.

Mon dieu ! Quelle horreur, salir une femme comme ça est une honte. Ce Tom me donne la nausée, lui avoir fait subir tout ça. Pourquoi n'est elle pas rentrée à la maison ?

- Après plusieurs semaines passées comme ça, toujours plus « défoncée » pour oublier cette existence, j'ai eu des nausées tous les matins. J'ai en cachette acheté un test de grossesse qui s'est avéré positif. Le père, je le sais avec certitude, c'est Tom, mais après ce qu'il me faisait subir je ne voulais pas de lui pour cet enfant. Un soir où il était à son tour complètement à l'ouest et prêt à coucher avec une des nénettes qui habitait avec nous J'ai fuis cette maison. Je ne pouvais plus vivre ainsi et le laisser me tromper ouvertement et me prostituer pour avoir ma dose. J'ai passée une nuit dehors, recroquevillée au pied d'un arbre dans un parc puis j'ai cherché des foyers qui pouvaient recevoir les jeunes comme moi, en dérive totale. Pendant des journées entières mes larmes ont coulé. J'étais rongée de l'intérieur, entre la peur que Tom me retrouve, la honte de ce que je vous ai fait subir, le dégout de mon corps que trop d'hommes, j'ai voulu en finir plus d'une fois.

Je n'aurais jamais imaginé que ma grande sœur avait pu vivre cela. Même si elle était loin de nous j'espérais au moins qu'elle était heureuse.

- Grace à Henry j'ai pu retrouver goût à la vie. Il a été mon sauveur.

Elle continua son récit me racontant comment il l'avait aidé. Son soutien l'a aidé à tenir bon et à avoir de l'espoir. Elle a changé d'apparence, en coupant ses cheveux et modifier radicalement son look vestimentaire. Après cela, elle a mené la fin de sa grossesse dans un autre foyer où notre Henry avait été muté. Elle ne voulait plus le lâcher. Il a été un repère paternel et l'a prise sous son aile le temps qu'elle se libère de son addiction pour la drogue et mener à terme sa grossesse. A l'arrivé du petit Théo, tout s'est enchainé. Au foyer, elle avait suivi une formation, puis repris des études de sociologie, elle voulait aider les personnes.



CoïncidenceWhere stories live. Discover now