Charlie - Partie 1

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‑ C'est encore loin, demanda Charlie. Je suis fatiguée, bâilla-t-elle.

‑ Encore quelques pâtés de maison. Ne t'en fais pas, on est bientôt arrivées, la rassura Anaël.

‑ Tu sais que tu es complètement dingue ! Ça pourrait être super dangereux ton truc.

‑ Mon truc ?

‑ Oh, oui, c'est bon ! Ton escapade ! Ton aventure ! Ton expédition ! s'enthousiasma-t-elle, les yeux plein d'étoiles.

‑ Je te rappelle que c'est toi qui as voulu venir avec moi !

‑ Oui, je sais, mais... maintenant, je me dis que c'était peut-être pas une bonne idée.

‑ Arrête ton char...

‑ Ben-Hur ! l'interrompit Charlie en éclatant de rire.

‑ Franchement, ne me dis pas que tu n'en meures pas d'envie depuis que je t'en ai parlé, souffla sa sœur, alors remballe tes blagues pourries, ravale tes craintes et suis-moi en la fermant ! la gronda-t-elle excédée.

Charlie bougonna dans son coin. Après trente secondes de silence, elle reprit :

‑ Oui, mais quand même ! On sera deux filles, seules, au milieu de tas de gravats. Ça ne craint pas ? Tu es sûre de ton coup, là ? s'inquiéta la petite rouquine.

‑ Tu te fiches de moi ? Si tu es si trouillarde, il fallait rester à la maison ! Je n'aurais jamais dû t'emmener ! Tu vas m'attirer des ennuis !

‑ Arrête ! Arrête de crier Ana ! Je ne voulais pas rester avec papa et maman. Ils étaient trop bizarres ce matin.

‑ Oui, je sais. Je n'ai pas compris non plus...

‑ Ana... Ils ont mis du fromage dans mes céréales ! Du fromage ! Pas du lait ! Du fromage pourri qui pue ! s'énerva la fillette le visage crispé.

‑ C'est toi le fromage qui pue, dédramatisa Anaël en lui faisant un clin d'oeil.

‑ Même pas vrai !

Depuis peu, leur vie était décidément très étrange. Elles devaient affronter de grands changements qui perturbaient leur existence. Anaël s'arrêta et prit sa petite sœur dans ses bras.

‑ Allez Charlie, un peu de courage. Je ne sais pas ce qui se passe dans la tête des parents. Je sais, c'est bizarre, mais je crois qu'il va falloir s'y faire. Et puis, je suis là, moi. Tu peux me faire confiance, je ne t'abandonnerai pas.

Elles marchaient sur le large trottoir de la rue principale de la cité, le long d'immeubles grisâtres qui léchaient les quelques nuages blancs du ciel azur qui les surplombait. Il faisait lourd. Chaud et humide. Bizarre en cette saison. Elles auraient presque déjà dû porter leurs vêtements d'hiver. Pourtant, elles arboraient encore fièrement de petits t-shirts à manches courtes sans frissonner : un pur régal, sans compter cette lourdeur ambiante.

C'est peut-être pour ça que Charlie est si pénible.

Encore quelques minutes et elles seraient arrivées à destination : un lieu unique et magique en plein cœur de la cité. Un sanctuaire sauvage au milieu de la froideur de l'urbanisme effondré environnant. L'impatience chatouillait le ventre des deux sœurs. Elles pressèrent le pas. On ne pouvait pas visiter une ancienne clinique abandonnée tous les jours ! Charlie l'imaginait déjà dévorée par les arbres devenus fous et une végétation luxuriante.

Alors qu'elles arrivaient devant le bâtiment, Anaël stoppa net sa cadence. Elle se retourna vers sa cadette et plongea son regard émeraude dans ses yeux.

La Légende de la MéduseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant