Jour IIIII / II : Ou comment tout bascule. (Aube)

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« Je te préviens, si tu me laisses tomber, j'te crève les yeux. »

Sur ces mots gorgés d'amour à mon égard, je laisse échapper un petit rire sarcastique.

« Tu rigoleras moins avec mes doigts dans les orbites. »

« Excuse-moi si tes menaces n'ont pas l'effet escompté, mais je te vois mal ramper par terre pour venir m'éborgner. »

Elle sert fort ses bras autour de ma gorge. À moitié étouffé mais maintenant complètement hilare, je tire sur ses petits membres pour grappiller l'air nécessaire à ma prochaine pique.

« Est-ce donc une façon raisonnable de traiter sa monture ? »

Elle me donne un coup de poing sur le dessus du crâne.

« Fais pas le malin avec moi, tu as déjà oublié lequel de nous deux à fini les dents dans le sable, l'autre jour ? » Me nargue-t-elle.

Pas encore guéri de cette plaie béante dans le cuir de mon égo, je serre les dents mais pense tout de même à paraphraser Cynthya.

« Comme dirait une certaine rousse, j'étais fatigué d'avoir botté le cul de ton faux petit-ami et de ce tocard de psy. Tu as juste eu de la chance. »

Elle ne répond rien. Je prends ce silence pour un aveu de faiblesse et décide d'enfoncer le clou.

« La prochaine fois, je te mets par te... »

« Comment ça, faux petit-ami ? »

J'hausse les sourcils, surpris de ce soudain changement de sujet.

« Arthur m'a raconté votre plan et ton geste de grand altruisme pour qu'il échappe au pilori de ses parents homophobes. »

Elle met un peu de temps à répondre.

« Depuis quand tu parles avec Arthur, toi ? »

« Depuis qu'il est sympa avec moi, qu'il ne pique pas mes clopes, qu'il ne m'insulte pas et qu'il n'essaye pas de m'étrangler à mort. »

Elle ne semble pas sensible à la provocation.

« Ouais... Arthur est un mec bien. »

« Pas comme certaines personnes ici. »

« Oh, tais-toi. »

Je souris à nouveau. Cette situation est tellement improbable que malgré sa gravité, je n'arrive pas à chasser le comique des événements. Si on m'avait dit il y a quelques jours que je me retrouverais avec Harmony sur le dos, j'aurais ri au nez de l'idiot qui serait allé inventer ça. Ce qui est moins drôle cependant, c'est que malgré sa petite taille et l'affûtage de sa silhouette, elle constitue tout de même une charge conséquente. D'autant plus qu'elle porte sur son dos un sac chargé de viande séchée et de gourdes en ferrailles.

La décision a été prise d'un commun accord la veille. Outre le fait que de rester dans cette grotte réduisait nos chances de survie à un pourcentage négatif, nous avons décidé que le risque de rebrousser chemin pour rejoindre le reste du groupe valait le coup d'être pris, et ce malgré les faibles probabilités de réussite. Ainsi, une fois la totalité de notre gibier réduits en fines lamelles de viandes séchées et fumées, nous avons discuté du moment le plus opportun et le moins dangereux pour traverser le banc de sable. De cette évaluation est née l'idée de se mettre en route au crépuscule de la journée d'hier, idée vite avortée par un nouvel aléa de cette nature qui n'en finit pas de nous mettre des bâtons – voire des troncs – dans les roues : la marée. Nous avons assisté, impuissant, à la disparition de la langue de sable sous le niveau de l'eau. Forcés de passer une nuit supplémentaire dans le renfoncement rocheux, nous avons croisé les doigts pendant des heures, sans dormir, pour que l'èbe soit au rendez-vous juste avant l'aurore. Heureusement, nous avons été témoin avec beaucoup de soulagement d'une baisse significative du niveau de la mer.

Biohazard - Disparus [ Tome 1 Terminé ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant