Chapitre 7

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Tandis que je patiente entre Benji et Leila dans la queue du self, l'odeur de frites et de viande grillée torture mon estomac vide. Je n'ai rien avalé ce matin en me levant et je rêve de ce moment depuis que j'ai découvert le menu à 10 heures. En attendant, j'observe les mouvements assourdissants des élèves excités d'être enfin libres après plusieurs heures de concentration. Mes collègues de rugby ne sont pas les derniers à chahuter dans la cantine, un surveillant essaie d'ailleurs de les calmer. En tentant de comprendre les remontrances de ce dernier, je tombe sur Clémence, assise seule sur une table, à l'écart des autres. Elle est devant son plateau, les yeux rivés sur son téléphone. J'ai envie de doubler tout le monde pour la rejoindre et lui demander ce qui ne va pas, mais je suis un dégonflé et je ne veux pas lui témoigner trop d'attention de crainte qu'elle ne se fasse des illusions sur mes intentions. Après tout, je l'ai questionnée plusieurs fois hier soir et elle n'a pas jugé bon de me répondre.

Aujourd'hui, elle est là, tranquillement installée sur sa chaise à grignoter sa pomme, des écouteurs vissés sur ses oreilles. Je suis inquiet pour elle, ce n'est pas parce que je n'en suis pas amoureux que je ne suis pas attaché à elle.

— Oh Paul ! me souffle Benji en me bousculant. Arrête de scotcher sur cette meuf ! Elle n'est pas pour toi !

— Ta gueule !

Le sourire de Leila me fait comprendre que Benjamin est jaloux et que Clémence ne le laisse peut-être pas indifférent. Heureusement, il n'est pas au courant pour Clem et moi et je me garde bien de le dire à qui que ce soit. Mon meilleur ami sait que je crushe sur Fleur et que je tire à droite à gauche des filles de passages en attendant que celle de mes rêves découvre que j'existe.

Tandis que je suis perdu dans mes pensées, nous finissons par atteindre le comptoir. Je suis déçu de constater qu'il n'y a plus de frites et cela me met un peu plus de mauvaise humeur. Je râle en me servant une assiette de spaghettis bolognaise et une crème au chocolat.

— Tu oublies tes carottes, ça rend aimable, sèlàng* ! commente Benji.

En prenant mon plateau, je me dirige directement vers la table de Clémence pour m'asseoir face à elle. Tant pis si je l'emmerde. Tant pis si je me dévalorise. Tant pis si elle lit une ouverture dans ma démarche. J'ai besoin de savoir.

— Salut !

— Salut, chuchote-t-elle en baissant les yeux sur son assiette.

Cette fille si insolente et provocatrice m'apparaît soudain vulnérable. Je vois bien que quelque chose la tracasse et le doute grandit au fond de moi. Et si Clémence était effectivement enceinte. Merde ! En la fixant silencieusement, je remarque qu'elle porte un large sweat rouge aujourd'hui, pas de petit haut sexy et une coupure à la commissure de ses lèvres m'interpelle. Je suis certain qu'elle ne l'avait pas hier. Nos ébats ont été précipités et ardents, mais ni violents ni brutaux...

— Tu t'es fait quoi à la bouche ?

— Rien, je me suis mordue ! se défend-elle en aspirant sa lèvre inférieure.

Elle est tellement attirante quand elle fait ça, mais je ne dois pas me déconcentrer.

— Je voulais te dire pour hier...

— S'te plaît, laisse tomber ! m'arrête-t-elle violemment alors que j'allais lui déblatérer une excuse minable et hypocrite.

Leila et Benjamin s'assoient autour de moi et nous faisons tous les trois face à Clem qui devient de plus en plus mal à l'aise. Ce n'est pas du tout son genre d'éviter les regards. La blonde fonceuse que je connais a disparu pour laisser place à une adolescente farouche et craintive. Quelque chose ne tourne pas rond. Je le vois, je le sens. Mais avec la présence de mes deux amis, je sais bien que Clémence ne se livrera pas.

Happy Halloween ! (Terminé)Where stories live. Discover now