Chapitre XXII - Celui où ma sœur

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La nuit était complètement tombée quand Nicolas et ma sœur arrivèrent à la colline. C'était la même colline que celle où j'avais été, ayant comme moi était attiré par la lumière émise par le cœur. Comme moi, ma sœur ressenti l'infinie tristesse du lieu et Nicolas, comme elle, ne pouvaient lâcher son regard du joyau incrusté dans l'arbre. Comme nous précédemment ils rentrèrent dans le mausolée. Si Camille n'avait d'yeux que pour les flammes, mon meilleur ami examinait la salle attentivement.

- Apolline ? Cela ne sonne pas comme un nom de fée, nota-t-il.

- Mon père appelait sa fiancée comme cela, se remémora ma sœur.

- Ah bon ? Comment tu le sais ?

Il ne mettait pas en doute ma sœur, se demandant même si ce n'est pas comme cela que maître Perrin avait appelé la fiancée disparu. Mais Camille n'avait pas été présente.

- Tu te souviens du recueil de poème que Kamélia m'avait donné, celui écrit par mon père ? Il était dédié à Apolline, son âme-sœur a jamais disparu, il répète plusieurs fois son nom dedans. C'était de magnifiques poèmes d'amour comme tu mériterais que j'en écrive pour toi.

Il espéra qu'elle n'allait pas se mettre à lui en inventer. Ce que je peux tout à fait comprendre. Ma sœur n'a jamais été douée pour faire rimer quoi que ce soit et elle pouvait déjà être assez lourde sans vous déclamer des vers passionnés. Il se détourna et son regard rencontra le poème. Il trouva que cela faisait pas mal de coïncidence.

- Ton père écrivait des poèmes comme celui-ci ? interrogea-t-il.

Elle le lut et approuva.

- Exactement. C'est assez bien pour toi tu ne trouves pas ? Ou peut-être pas assez ?

Il hésita.

- C'est parfait ! finit-il par dire. Mais cela fait pas mal de coïncidences. Tu crois que ton père aurait pu créer cela ?

Elle poussa un grognement d'assentiment, toujours aussi captivé par les flammes. Comme moi, elle ne résista pas à la tentation de toucher les flammes. Quand la hyène lui fit signe de la suivre, mon meilleur ami, loin d'en être terrifié en eut presque la confirmation que cela avait un rapport avec mon père. Il poussa donc ma sœur à y aller.

Tout se passa comme avec moi, elle trouva mon père, il lui raconta son histoire. Mais elle avait bien plus de questions que moi qui se bousculaient dans son esprit.

- Ce laboratoire, où est-il ?

- Il n'est pas très loin d'ici, j'étais faible et je devais porter Apolline. Tu t'imagines bien que je n'ai pas fait un long chemin.

- Oui mais où ?

- À quelques pas d'ici. Descend la colline en direction du sud, là où ce n'est qu'une immense plaine. Avance jusqu'à un menhir. Là est l'entrée du laboratoire.

- Et on l'ouvre comment ?

- Comme tous les menhirs dévoilant un passage je suppose. Une fée pose sa main dessus et le laboratoire apparaîtra.

- D'accord. Cette machine, elle sert à quoi ?

- Je l'ignore, mais pour cacher cela, c'est que c'est destructeur. Et de toute manière cela coûtera la vie à ceux qui doivent servir d'énergie.

- Comment elle fonctionne ?

- Apolline et moi étions au centre d'un pentagramme fait de menhir, ils tournaient autour de nous. Nous étions liées l'un à l'autre et nos êtres se mélangeaient, nous ne faisions plus qu'un. Toute personne entrant dans le pentagramme se verrait aspirer je pense, mais il en mourrait sur le coup n'étant pas préparé pour, donnant sa magie mais aussi son énergie. De plus, c'est fait pour deux personnes, une personne en plus ou en moins nous sera fatal. C'est ce qui a coûté sa vie à Apolline.

- Comment t'en es-tu sorti ?

- La machine était là pour aspirer à Apolline son insensibilité à la magie, comment je l'ignore, mais elle ne touchait pas à sa magie grâce au ciel. Elle a donc pu s'en servir, pour séparer mes liens du reste. Seul les fées peuvent les défaire normalement, ça a été trop éprouvant pour elle d'utiliser une telle puissance. Elle ne pouvait donc pas sortir. Juste moi. Toute cette énergie allait dans un menhir couché au sol, sous lequel s'ouvrait une brèche. Un passage qui s'ouvrait entre les mondes. J'ai détruit le menhir et tout s'est arrêté. Mais Apolline était morte.

Ma sœur aurait voulu dire quelque chose pour le consoler, cependant, elle savait que la situation était trop urgente.

- Il faut donc une fée pour dévoiler le laboratoire et rompre les liens, personne ne doit pénétrer le pentagramme une fois actif et on doit détruire le menhir pour arrêter la machine.

- C'est cela. Si le processus a commencé, en détruisant le menhir tu délivreras une magie brute. Tu auras peu de temps pour t'en servir, mais elle est immense et puissante. Et aucun sort ne pourra la modifier par la suite puisqu'elle est protégée par l'insensibilité à la magie. Je l'ai utilisé pour faire tout ce que tu trouves sur cette colline.

- Tout ?

- Oui. J'ai même recoloré la couleur des herbes. Je voulais faire un tombeau de reine à Apolline, elle qui n'en méritait pas moins.

Ma sœur fut plus touchée encore. Elle serra la main de notre père pour le consoler. Étrangement, il était solide. Sans doute car c'était un souvenir, pas un fantôme. Elle se leva très vite après ça, sachant que la situation était préoccupante et le remercia :

- Merci papa ! Maintenant, il faut que j'aille secourir Théophile !

Elle se leva. Repartit.

En la retrouvant, mon meilleur ami, mort d'inquiétude, ça restait Nicolas, la serra dans ses bras. Elle, elle retomba sous son charme. Elle allait encore lui conter fleurette quand il l'interrogea sur ce qu'elle avait appris. Malheureusement ma cadette n'était pas d'humeur pour parler de cela. Elle ne voulait que se couler dans ses bras. Agacé, mon meilleur ami la saisit par les épaules et plongea son regard dans le sien et martela :

- Camille je veux savoir ce que tu as appris ! Alors fais-moi plaisir je t'en prie et dis-moi tout !

Il lui avait demandé de lui faire plaisir. Cela suffit à motiver ma sœur à parler. Elle raconta tout dans les moindres détails de peur de ne pas le satisfaire assez et il en en fut plus que content. Au fur et à mesure du récit de ma sœur, son visage s'assombrit. Il finit par lui lâcher les épaules et s'écarter en se tournant pensivement vers l'extérieur et se rongeant les ongles. Quand elle eut fini il proclama :

- Il faut qu'on aille sauver ton frère !

C'était quand même un peu le but de leur présence ici. Je suis content de voir qu'il n'y pensait plus. Heureusement que je n'avais pas que lui pour venir me sauver sinon je n'aurais pas donné cher de ma peau. Même Camille était presque moins à l'ouest que lui et pourtant elle avait une excuse. D'ailleurs cette dernière poussa un soupir ennuyé.

- Ça m'a l'air très ennuyeux, on pourrait plutôt rester ici tous les deux !

Quelle sœur indigne !

- Non ! Camille si tu ne m'aides pas à sauver ton frère je te laisse ici toute seule et moi je rentre ! 

La fée perfideWhere stories live. Discover now