Chapitre 1-1

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Il faisait froid et la pluie menaçait en cette dernière nuit d'octobre, risquant d'écourter les réjouissances de cette soirée d'Halloween. Je marchais rapidement, ma capuche rabattue et la tête basse pour me protéger du vent humide et pénétrant. Des enfants insouciants et des fêtards joyeux déambulaient déguisés dans les rues en s'interpellant bruyamment, leurs sacs remplis de friandises bruissant doucement aux rythmes de leurs pas. Un groupe de jeunes ados déguisés en zombies ridicules me hélèrent avec gaieté, mais j'enfonçai un peu plus la tête dans mon vêtement et pressai le pas...je n'avais pas la tête à ça.

À la vérité, je ne l'avais pas à grand-chose. Comme tous les soirs, ces derniers temps, je n'avais qu'une seule et unique idée en tête, rentrer chez moi au chaud pour passer une soirée tranquille en tête à tête avec ma télé. Chose qui m'aurait horrifié rien que d'y penser, encore quelques mois auparavant.

À l'époque je menais une vie tranquille et insouciante. Partagée entre mon travail de serveuse dans un petit restaurant, mes cours à la fac de psychologie et mes amies, que je retrouvais presque tous les soirs, ne serait-ce que pour discuter. Je vivais avec ma mère, qui m'avait eu très jeune et élevée seule. Nous nous entendions très bien, presque plus comme des amies que comme une mère et sa fille.  Parfois elle se joignait même à nous lors de nos petites réunions improvisées, d'ailleurs mes copines l'adoraient. Puis tout avait basculé, peu de temps avant noël.

La disparition subite de ma mère, renversée par un chauffard sur un trottoir alors qu'elle rentrait de son travail, m'avait anéantie...beaucoup plus que je n'aurais pu le croire. Passée l'hébétude initiale liée au choc, les différentes démarches administratives et juridiques avaient eu raison du peu d'insouciance qu'il me restait. J'avais dû arrêter les cours et trouver un deuxième travail pour assurer les factures, ne trouvant même plus de temps pour voir mes amies.

Mais même ainsi je ne m'en sortais pas et avait bien dû finir par me résoudre à vendre la maison. Une fois que la dernière chose qui me rattachait un tant soit peu à ma mère eut disparu, je ne vis plus de raison de rester là plus longtemps et décidai de tenter un nouveau départ ailleurs, loin de tous ces douloureux souvenirs. Mes amies avaient bien essayé de me retenir et j'avais hésité un bref instant, sachant qu'elles me manqueraient, mais...tout était différent. Désormais j'étais seule. Ma vie ne serait plus jamais comme avant et voir tous ces gens si heureux et insouciants me faisait mal, me rappelant trop ce j'avais perdu et ne retrouverais jamais...

J'étais donc partie m'installer à l'autre bout du pays, dans une mégapole grande et anonyme, par opposition à la petite ville de banlieue d'où je venais. J'avais espéré que le changement d'environnement me permettrait de franchir un cap et de passer à autre chose. Mais presqu'un an s'était écoulé depuis la tragédie, sans que le temps ni la distance physique n'amenuisent la douleur et l'abattement permanent que je ressentais. J'avais au contraire la sensation de m'enliser dans une routine morne et triste, un long tunnel sans fin dont je ne parvenais plus à sortir.

Cela faisait bientôt deux mois que j'étais là. Les maigres économies que j'avais réussi à tirer de la vente de la maison, une fois passés les frais de succession et autres factures, ne s'élevaient pas à grand-chose. J'avais donc dû me contenter de louer une chambre d'étudiante chez une vieille dame en attendant de trouver un emploi fixe. Ce qui, je l'espérais, était en bonne voie.

Je travaillais à l'essai depuis quelques jours dans l'une des bibliothèques de la ville, située dans l'un des nombreux nouveaux quartiers qui fleurissaient un peu partout à sa périphérie. Le sentiment d'être en ville, sans vraiment y être ! Mon travail consistait à ranger et classer les différents ouvrages, rien de très palpitant pour l'instant à vrai dire, mais j'aimais bien l'ambiance feutrée de la bibliothèque et ce travail solitaire me plaisait. Les autres employés gardaient leurs réserves à son encontre, sans doute un peu refroidis par tous les refus polis mais nets, que j'avais émis à leurs différentes tentatives de rapprochement.

Je savais, au fond de moi, que j'aurais dû accepter leurs gentilles invitations et me faire de nouveaux amis, mais je n'y arrivais tout simplement pas.  Je n'avais plus, ni l'envie, ni l'énergie d'essayer de m'intégrer. En fait je n'avais plus goût à rien et tout me paraissait fade. C'était un peu comme si un grand vide que plus aucune émotion ne pouvait remplir, s'épanouissait insidieusement en moi.

J'avais bien conscience, pour avoir fait psycho, que je présentais tous les symptômes de la dépression, autant psychologique que physique. J'avais maigri, mes cheveux d'ordinaire toujours bien coiffés dans un dégradé impeccable étaient trop longs et des mèches rebelles me tombaient constamment devant les yeux et même si j'étais toujours propre et soignée je ne prenais plus autant d'attention qu'avant à ce que je portais. Du moment que c'était propre et à ma taille, cela me suffisait. Ce constat amer était plus qu'alarmant et ce n'était pas la première fois que j'avais cette prise de conscience, me rendis-je compte tandis que je poursuivais mon chemin sous le crachin pénétrant. Je savais bien que je ne pouvais pas continuer comme cela...ça ne me ressemblait tellement pas ! Mais bon, le choc de tout ce qu'il m'était arrivé était encore récent et ma déprime surement accentuée par le temps exécrable que nous avions depuis près d'un mois et demi maintenant. Cela irait certainement mieux aux beaux jours...mais oui bien sûr, je pouvais toujours essayer de m'en convaincre !

Un groupe de jeunes filles déguisées en sorcières et qui parlaient beaucoup trop fort et avec beaucoup trop de gloussements me croisèrent sur le trottoir, me sortant momentanément de mes tristes souvenirs et conclusions pas beaucoup plus gaies.

— Tu crois qu'on va en rencontrer un ? demanda d'un air excité et les yeux écarquillés l'une des filles à ses copines.

— Rencontrer quoi ? T'es encore dans tes délires de vampires ? lui répondit une grande blonde à l'air déluré d'un ton méprisant, avant de lever les yeux au ciel d'un air exaspéré. Tu n'en as pas marre de nous bassiner avec ça. Tu sais très bien que ça n'existe pas !

— Bien sûr que si ! lui répondit-elle sur la défensive. Si les aigles-garou existe, je suis certaine que les vampires aussi !

— Cette vidéo que tu nous rabâche avoir vu était un fake ! c'est d'ailleurs pour ça qu'elle a été immédiatement retirée et que personne d'autre à part toi ne l'a vu !

— Mon père l'a vu aussi. Il est flic je vous rappelle et depuis hier, il est constamment au boulot ! Je vous dis qu'il se passe quelque chose !

— Peut-être...mais certainement pas une invasion de vampire ou de loup-garou ! s'esclaffèrent à nouveau ses deux copines. Tu as toujours été beaucoup trop impressionnable Tina ! Laisse-tomber cette histoire et profitons de la soirée !

Je ne pus m'empêcher d'esquisser un demi-sourire et de lever les yeux au ciel à mon tour, à l'entente de ce morceau de conversation, dont la suite se perdit dans la nuit. Les filles étant dorénavant trop loin pour que je puisse encore les entendre. C'était une conversation typique pour une nuit d'Halloween mais quelque chose dans le ton de la fameuse Tina, m'avais interpellé.

Bien que je n'aie jamais été attiré par les histoires fantastiques et autres délires d'êtres surnaturels, j'avais toujours pensé que des gens « différents » pouvaient exister et cette conversation interceptée résonnait étrangement sous mon crâne.

Non mais vraiment...n'importe quoi, me repris-je en secouant la tête avant de presser encore un peu plus le pas sous l'averse qui s'intensifiait. Pourquoi cette conversation entre trois gamines me perturbait-elle autant ? me sermonnai-je intérieurement, alors qu'un souvenir enfoui remontait brusquement à la surface me replongeant instantanément dans un passé heureux, pas si lointain.

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J'espère que cette première moitié de premier chapitre vous a plu ? :-) Bienvenue sur cette nouvelle histoire ^.^

Des bisous *-*

Ombre FauveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant