Chapitre 41 - Simon

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J’étais dans la salle de bain, penché à travers la fenêtre à fumer la toute dernière cigarette de mon paquet. C’était le mieux que m’avait permis le psy. Je voulais aller dehors, il ne voulait pas. J’avais alors allumé ma cigarette là, devant lui, à l’intérieur de la chambre de motel. Là, seulement, il m’avait permis d’aller à la fenêtre. Avant, il ne voulait même pas que je m’approche des fenêtres.

Ne plus être en mouvement me mettait sur les nerfs. J’avais l’impression de m’éloigner de mon frère, plutôt que de m’en approcher. Et même l’impression que je ne le reverrais jamais, qui devenait un peu plus forte à chaque minute qui passaient, me rendait peut-être un peu trop rude quand je parlais avec le psy ou Lindsey. Je voulais reprendre la route au plus vide, mais ils étaient d’accord pour rester ici un jour de plus. Ça faisait déjà un gros trente-quatre heure que nous étions ici, et j’en avais par-dessus la tête.

Quelqu’un cogna à la porte de la salle de bain. Je n’avais pas encore fini ma cigarette, et je ne voulais pas sortir tant que ce sera fait. Et puis, si ne pas répondre pouvait énerver quelqu’un, c’était une raison de plus pour ne pas répondre. Mais après trois coups, la personne n’insista pas. J’entendis ses pas s’éloigner de la porte. Ce n’était surement pas une très grosse envie. Mais là, c’était moi que ça énervait. En soupirant un dernier nuage de fumer, je lançais mon magot dans la neige, fermais la fenêtre et allait ouvrir la porte. C’était Lindsey qui avait frappé, mais, comme je l’avais deviné, elle s’éloignait, me tournant le dos, en direction du coin de la pièce servant de salle à manger, où il y avait une table et deux chaises. Le psy était déjà à l’autre chaise, me regardant d’un œil vide, avant de reporter son attention sur ce qu’il mangeait ; une barre protéinée.

Je m’avançais vers eux, trainant presque les pieds tellement j’étais lasse.

- Quelqu’un veut aller à la salle de bain ? La place est libre.

Personne ne répondit ; ils étaient surement tout aussi lasse que moi. Sans insister, je tournai les talons et allait me coucher sur le canapé ; la place qui m’était assigné, puisqu’il n’y avait que deux lits et que nous étions trois. Je fermai les yeux alors que j’entendis quelqu’un se lever, surement pour enfin aller à la salle de bain. J’ouvris un œil pour vérifier, et je vis que je m’étais trompé. La personne qui s’était levé – encore Lindsey – s’avançait droit vers moi. Je fermai les yeux et tournait la tête, faisant comme si je ne l’avais pas vu.

- Tu sœur ne te manque pas ? dis-je.

- Pas vraiment, dit Lindsey au bout d’un moment. Pas du tout, en fait.

- T’as de la chance.

Lindsey ne répondit rien, ne comprenant visiblement pas où je voulais en venir. C’était simple, pourtant ; Lindsey ne s’inquiétait pas pour sa sœur car elle savait qu’elle était en sécurité, probablement en cour, à cet heure-ci. Il n’y avait aucune raison de s’en faire pour elle. Moi, c’était tout le contraire. J’avais déjà été séparé plusieurs semaines d’affilé de mon frère, quand il allait dans des camps d’été. Je ne m’en faisais pas pour lui, car je savais qu’il avait du plaisir, même plus que moi. Je ne m’ennuyais même pas de lui, bien au contraire, je voyais son absence comme des vacances. Sincèrement, ce qui m’ennuyai le plus quand il n’était pas là, c’était d’avoir personne pour jouer avec moi à Mario Kart. Et quand Elwin revenait de son camp d’été, c’était à peine s’il me remarquait ; il fonçait sur le chien pour le prendre dans ses bras en disant comment il lui avait manqué, alors que Roquet se tortillait pour lui échapper, jusqu’à ce qu’il réussisse à le mordre et qu’Elwin le lâche. Ensuite, seulement, il remarquait ma présence.

- T’as vraiment de la chance. Et tu le remarque même pas...

J’ouvris les yeux pour les planter dans ceux de Lindsey qui s’était assis dans le fauteuil près de mon canapé.

BleuWhere stories live. Discover now