Arte Corpus 1 - Tori et Noah (Sous contrat d'édition chez Plumes du Web)

Chapitre 3 - Partie II

Noah m'entraîna vers un petit café et nous nous installâmes en terrasse, sous le rayon de soleil qui perdurait. Me retrouver assise face à lui m'impressionna finalement plus que prévu et cela m'agaça au plus haut point. J'avais vingt-quatre ans merde, et même si je n'avais pas eu beaucoup d'hommes dans ma vie, j'aurai dû être capable de lancer une conversation au lieu de me dandiner sur ma chaise, ses yeux dorés fixés sur moi avec intérêt. Fort heureusement pour moi, la serveuse fit son apparition et prit nos commandes : mon fameux thé, au citron, et un café noir.

- Donc si j'ai bonne mémoire, Rose veut que nous prévoyions quelques événements pour la soirée du mariage, entama Noah. Tu as déjà pensé à quelque chose ?

Je ne savais pas s'il avait aperçu le semblant de malaise qui avait commencé à me submerger mais me lancer sur le sujet était la meilleure façon de me sortir de mon mutisme. J'extirpai de mon sac à main le bloc note dans lequel j'avais noté quelques idées en vrac suite à la demande de la fiancée et le posai devant moi quand la serveuse revint avec nos boissons.

Au fil des minutes qui s'égrainèrent, nous fûmes bien obligés d'admettre que nous n'étions pas d'accord. Sur à peu près tout d'ailleurs. Je m'adossai finalement au fond de mon fauteuil et observai son léger sourire moqueur avec un brin de malice.

- C'est d'un conventionnel, ce que tu proposes ! Clamai-je.

Noah remua le sucre au fond de son café et en but une gorgée sans me quitter des yeux, une lueur de défi dans le regard.

- Ma famille est très conventionnelle, lâcha-t-il platement.

Certes. Je ne pouvais pas le contredire sur ce point. Simplement, je savais aussi que Rose aimait s'amuser et que se contenter de regarder un diaporama regroupant les photos mettant en scène les mariés depuis leur rencontre n'allait pas lui suffire.

- Bon, ce que je te propose c'est de mixer nos idées et de voir ce qu'on peut en tirer. Parce que je te jure que certains jeux sont vraiment marrants ! Je me souviens qu'au mariage de mon cousin...

La sonnerie de mon téléphone m'empêcha finalement de lui étaler ma vie, chose dont il n'avait certainement rien à faire. J'attrapai mon téléphone depuis mon sac à main et soupirai en apercevant le nom de l'appelant. J'adorai ma mère, vraiment, mais elle avait le chic pour m'appeler quand la situation ne s'y prêtait pas. Et elle avait en plus le culot de m'envoyer paître gentiment quand je râlai parce que, bien sûr, elle était toujours injoignable, elle.

- Excuse-moi, c'est ma mère, soufflai-je en me levant.

- Prends ton temps, je ne bouge pas.

Je lui envoyai un sourire désolé et m'éloignai un peu en direction du fleuve.

- Oui maman ?

- Je te dérange ?

Mon regard se posa sur la silhouette de l'homme qui m'attendait patiemment à notre table.

- Un peu. Je peux te rappeler plus tard ?

- Non, nous sommes invités ce soir et je n'aurai pas le temps de t'avoir demain. C'était simplement pour savoir si tu pouvais venir manger à la maison dimanche midi ?

- Bien sûr, oui.

- Essaie de faire en sorte que Raphaël soit là aussi, gronda ma mère. Cette grande nouille ne répond jamais à mes appels, mais ça ne lui pose pas de problème d'envoyer des textos idiots à ton père.

Je ricanai légèrement. Raph était un peu le troisième fils de la famille Lerouge et j'avais parfois l'impression de me traîner un jumeau diabolique, en plus de mes deux frères de sang. Simplement, l'un d'eux était marié et vivait dans le Sud et l'autre était encore un adolescent pénible, que j'avais parfois envie d'étriper. Ce n'était pas une légende : les parents étaient vraiment plus laxistes avec les petits derniers.