Partie treize

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J'ai la certitude qu'on ne naît pas mauvais mais qu'on le devient. Et là où vous avez tort, c'est de croire que le mal est facilement reconnaissable. Il arrive qu'il soit juste en face de nous et qu'on ne s'en rende même pas compte.

~~~ Point de vue de June. ~~~

Il est midi trente exactement et comme une petite stagiaire qui a obtenue un stage grâce à sœur, tous les regards sont sur moi. Je marche silencieusement, les yeux qui fixe les grands carreaux en marbre jusqu'à la cafétéria.

— Purée ou haricots verts ?

Une femme rondouillarde me toise de ses grands yeux trop maquillé en attendant ma commande.

— Haricots verts, s'il vous plaît.

Une grosse louche à la main, elle verse une grosse quantité dans mon assiette et deux petits morceaux de viande saignante. J'ai déjà connue mieux en terme d'hygiène et de gentillesse, mais je comprends que ça doit être lassant de reproduire tous les jours la même chose.

— Est-ce que je peux prendre de la sauce ?

Je murmure cette petite phrase gênée et pourtant cette vielle femme aux cheveux courts sous une charlotte balance la louche dans un contenant en s'adressant à son voisin dans la cuisine.

— Occupe-toi de la sauce, Charlie. Dit-elle en enlevant son tablier. Ils me prennent tous la tête avec cette sauce. La cuisine est fade, c'est ça ?

— Non, non.. c'est juste que..

Je me sens minuscule devant cette femme aigrie qui jure devant le bon dieu qu'elle ne supporte plus son boulot. Je remercie Charlie de sa gentillesse et du muffin gratuit puis rejoins une place encore disponible dans la salle. Dans tous les cas, je commence à croire que ce n'est pas difficile non plus d'être un minimum sympathique avec les autres.

— Pourriture..

Je parle a voix basse en repensant à son attitude du matin. Je lui en veux encore terriblement et c'est peut-être à cause de ça que je n'ai pas pris la peine de répondre à son message. Qu'il le jette, je n'en ai plus rien à faire maintenant.

— Je peux ?

Ma fourchette retombe brutalement dans mon assiette. Cette voix rauque, je jure qu'elle est la plus incandescente que j'ai connue de toute mon existence. Les voix des gens dans la pièce ne deviennent que murmure alors que je lève les yeux sur le garçon aux yeux clairs devant moi.

— Non, tu ne peux pas.

J'ai un noeud dans la gorge en regardant une seconde son visage. Tout est toujours trop parfait, ses yeux verts sous des cils plus long que les miens, ses lèvres rosées, son parfum enivrant.

— Regarde ailleurs toi. S'adresse-t-il a un homme qui rigolais jusque-là avec ses amis.

Le silence qui s'ensuit me glace le sang. J'aimerais être partout tant qu'il n'y est pas.

— Il faut qu'on parle, June.

— Chouette, j'espère que tu crois très fort à ça parce que ça n'arrivera plus jamais.

La tristesse est certainement ce que je supporte le moins chez moi. Facilement irritable, on me retrouve facilement dans une marre de larmes. Il n'aura pas cette chance, je m'en fais la promesse.

— Juste une minute et je te laisse tranquille.

J'ai envie de lui foutre une bonne gifle en public, peut-être qu'il voudrait bien me lâcher la grappe après ça.

— L'ironie du sort, non ? Grognai-je en parlant à voix basse. D'habitude c'est moi la sangsue de service.

Ma voix est dure tout comme mon comportement digne d'une enfant pourrie gâtée. Je veux juste qu'il me fiche la paix avant de se prendre mon plateau repas en pleine figure. Est-ce que c'est si difficile à comprendre ?

— Rancunière en plus, putain c'est le jackpot.

Je me lève soudainement, mon plateau repas dans les mains mais son poing déjà bien amoché rencontre la face vernis de la table dans un bruit assourdissant. Bon dieu, si quelqu'un est susceptible de m'entendre alors j'ai besoin d'aide de toute urgence.

— Reste ici, j'ai pas encore fini.

— Tu as un gros problème, va te faire soigner.

Je contourne mon voisin de table basse en marchant à toute allure jusqu'à la sortie du bâtiment, je suis déjà assez honteuse comme ça non ? Évidemment, le bruit de ses godasses s'amplifient dans mon dos jusqu'à ce qu'il me freine dans ma course en m'attrapant le poignet.

— Lâche-moi espèce de..

Sa main contre ma bouche m'empêche d'en dire davantage sous les yeux médusés des fumeurs.

— Espèce de quoi ? Chuchote-t-il en arborant cet air insolent. Personne ne viendra à ta rescousse, c'est moi le patron de cette boîte.

Ses derniers mots au creux de mon oreille sonne subitement comme un affront. Je me vois déjà rendre ma place au sein de l'entreprise à cause de cette ordure aussi divin à regarder qu'un fruit défendu.

— Je ne te crois pas et si c'est le cas et bien je vais te le dire quand même.

Les gens qui s'amassent devant la bâtisse me regarde comme un clown venant d'un cirque. Suffoquant en silence, je lutte contre moi-même et cette colère soudaine qui m'assaille.

— TU ES UNE GROSSE MERDE, PAS ÉTONNANT QUE TOUT LE MONDE TE DÉTESTE.

Un homme qui vient d'entendre mes propos sourit perversement en me tapotant dans le dos comme à un caniche qui a besoin de tendresse. Mon poignet libre me brûle soudainement en comprenant que je peux vraiment dire adieux à mon travail. J'ai rêvé de cette opportunité toute ma vie et voilà que tout s'effondre à cause de mon maudit caractère.

— Tu peux faire ta valise blondinette, il ne te ment pas en te disant que c'est lui le patron.

Je rencontre ses yeux qui virent soudainement noirs et toute mon audace disparaît comme de la poudre. Je veux me faire toute petite jusqu'à disparaître mais je suis toujours bien là demeurant statique comme une statue de cire. Je vais m'en prendre plein la gueule, je peux dire adieux à ma chance de vivre à New-York.

My only one Where stories live. Discover now