Stockholm

Chapitre 14

Sonia

    Je pourrais courir maintenant, sans m'arrêter, sans me retourner, crier à l'aide, dire à tous ces gens que cet homme me retient captive. Mais qui me croirait ? Je n'ai rien pour le prouver, je suis là, libre, rien ne me retient, rien ne m'empêche de partir. Et pourtant je ne peux pas me résoudre à l'idée de le quitter d'une telle manière. De toutes façons, j'ai l'air de tout sauf d'une prisonnière. Mes vêtements sont tout neufs, je suis propre, mon visage ne montre aucun signe de traumatisme et mon corps aucune trace de lutte.
      Il ne mérite pas que je parte, en l'accusant de quelque chose qu'il n'a commit qu'à moitié. Il m'a kidnappé c'est vrai, cependant si je ne l'avais pas décidé de mon plein gré, je serais partie il y a un moment. À vrai dire, il ne me retient pas contre ma volonté, il ne me retient pas captive, mais je ne peux combattre ce manque de liberté qui me ronge de l'intérieur.
      Je lui dois tout, je lui dois ma vie, je lui dois des souvenirs heureux, je ne le quitterais jamais, il en a tellement fait. Je n'ai absolument rien à perdre en restant avec lui et rien à gagner en partant.

     Il s'était finalement endormi sur le banc, les familles reprenaient la route et le temps se faisait plus frais.
      Je guettais autour de moi, il n'y avait plus personne, Dylan dormait toujours à points fermés. Et cette fois, je m'étais décidée. J'avais la nausée depuis quelques temps, cette pensée me terrifiait, il fallait que je le fasse. Alors je pris les clés de la voiture et m'en alla.

      Je roulais vers une station essence, j'entrais dans le libre service, j'attrapais tout ce dont j'avais besoins et me remis en route. Et si Dylan s'était réveillé ?

      J'accélérais, j'allais aussi vite que la limitation me le permettait.
J'étais arrivée, j'avais fait le nécessaire et j'attendais patiemment ce qui déterminera mon avenir. 
       Positif, le test était, positif. J'étais enceinte. Assise dans les toilettes de l'aire routière, je songeais à tout ce qui m'attendait, à la réaction de Dylan quand il l'apprendra. Et s'il s'avérait que ce bébé soit de nouveau une fille ?

-Maria ?

Dylan s'était réveillé, j'entendais ses pas se rapprocher de moi.

-Je suis là.

-T'es allée quelque par ? Je ne trouve plus les clés de la voiture et elle n'est pas garée au même endroit.

-Oui, je suis partie m'acheter a manger.

-Ah, d'accord, tout va bien là dedans ?

J'étais par la suite sortie des toilettes, je devais lui dire, à quoi bon le lui cacher ?

     Ma gorge se resserrait, mon cœur battait plus vite, je ne savais pas comment m'exprimer, aucun mot ne sortait de ma bouche pourtant ouverte.
      Il me regardait l'air inquiet, il se demandait qu'est-ce qui pouvait bien me mettre dans un tel état.
D'une voix monotone et sèche je m'exclama :
-Je suis enceinte.

      Un long silence pris place. Tous mes membres se crispaient à l'attente insupportable d'une réponse, ou même d'une expression de sa part. Les secondes me paraissaient infiniment longue. Ma respiration s'était coupée. Quand allait-il réagir ?

-Oh.

Il ne bougeait pas non plus, il me regardait droit dans les yeux, analysant mon comportement, essayant de savoir si je disais la vérité ou pas.

-C'est magnifique, c'est merveilleux... depuis combien de temps ? Tu sais depuis quand t'es enceinte ?

-Non, je viens de fair le test, au début je me disais que ça pouvait pas être possible. Enfin je voulais peut-être pas que ça le soit. Je suppose que ça remonte à la dernière fois qu'on la fait. Ou même avant j'en sais rien.

Je priais le plus fort possible pour qu'il n'évoque pas le sexe du futur bébé, je voulais qu'il l'aime qu'importe qu'il s'agisse d'une fille ou d'un garçon.

La nuit commençait à tomber, il fallait que l'on reprenne la route, Sarasota n'était plus très loin à présent.

       Je m'étais endormie dans la voiture, Dylan s'était bien reposé, je lui faisait confiance, il ne prendrait aucun risque et ne quitterait pas la route du regard. Il y avait un être de plus à protéger, notre bébé.

       J'ouvrais les yeux, j'étais allongée sur un lit, il faisait bon, la pièce dans laquelle je le trouvais était propre. Elle était sobre, toute de blanc et de bleu pastel, les voiles qui servaient de rideau flottait dans l'air, poussés par le vent. L'ambiance était étrange, peu commune, douce, les nombreux coussins m'ensevelissait et les baldaquins donnait une impression de luxe. Où étais-je ?

     La porte s'ouvrit délicatement, Dylan y passa sa tête.

- Maria, ma chérie, tu es réveillée ?

Il entrait la pièce, un plateau de petit déjeuner dans les mains.

-On est où ? C'est quoi cette chambre ?

-C'est notre chambre, la chambre de tes rêves, selon tes croquis. Je l'avais préparé spécialement pour toi. Malheureusement, le reste de la maison n'est pas encore tout à fait prête. Finis tes crêpes et je te fais faire le tour de notre baraque.

En effet, seule la chambre était bien ordonnée et décorée, le reste de la bicoque était presque en lambeau. Il n'y avait pas de porte, juste des rideaux en coquillages, les fenêtres n'avaient pas de cadres, les seuls meubles du salon étaient un canapé et une table basse. Il y avait une cuisine ouverte vers l'extérieur, le plancher du porche avait des lattes brisées et les poteaux penchaient vers la droite.
Nous étions tout près de la plage, dans un coin caché par les arbres. L'environnement me plaisait, j'étais contente de savoir que l'on resterait ici.

     Mon bébé, tu as de la chance d'avoir un père comme lui.

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