6. Juste un débroussaillement

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Mikael

Gabriel s'est engouffrée dans un bâtiment complètement neuf, entièrement constitué de bureaux grouillant d'employés. La puce GPS dans son téléphone ainsi que le flux habituel des lieux devraient éviter le moindre pépin. Trois heures, c'est le temps que je lui laisse avant de repasser la chercher. Sa mine absente et concentrée à la fois me convainc de lui faire confiance. Évidemment, je ne devrais pas, mais mon cerveau est en vrac, effet déplorable qu'a ma queen sur mon bon sens.

Alors que les premières rougeurs du crépuscule obscurcissent le ciel de L.A., je prends la route pour me diriger vers le parc avoisinant, plutôt calme, car le passage s'y fait rare.

Je reconnais immédiatement sa Q7 noire, aux vitres teintées, parquée sous les branches nues d'un des arbres qui peuplent cette parcelle déserte. Je me gare non loin de là, et termine mon chemin à pied, me disant que j'aurais sans doute dû faire un effort et me parfumer pour l'occasion. Après tout, c'en est une, car depuis le drame qui m'a plongé dans les tourments de la dépression, je n'ai plus supporté qu'elle me touche.

Elle sort du véhicule, vêtue d'un pantalon large à pinces gris, et d'un chemisier bleu sans manches, perchée sur des talons qui lui donnent toujours autant d'allure. Ses yeux azur me fixent, bien qu'elle ne m'adresse aucun sourire. Elle n'est pas dans son assiette, aujourd'hui. Forcément, puisqu'elle fait appel à moi. Comme je connais la suite des évènements, la cadence de mon cœur commence à accélérer, parce qu'elle me fait toujours autant d'effet.

Ses mains ouvrent la portière arrière de son SUV, m'invitant à y pénétrer, alors qu'elle se hisse à ma suite avant de verrouiller absolument toutes les portes dans un bruit discret. Nous sommes côte à côte, et ma respiration se fait de plus en plus courte. Elle ne se tourne pas tout de suite dans ma direction, comme si elle savourait « l'avant ». Enfin, sa voix se fait entendre, alors qu'elle demeure toujours immobile.

— De la douceur, aujourd'hui.

Je déglutis. La douceur. Compliqué. Compliqué, étant donné tout ce temps passé où nous ne nous sommes pas retrouvés une seule fois dans cette situation. Mais elle a besoin de moi, et moi aussi, en quelque sorte. Ma main glisse jusqu'à la sienne, et s'en empare pour la tirer vers moi avec délicatesse. Nos lèvres se frôlent, nos langues se jaugent encore. Mon nez se niche dans sa nuque et je la hume en me disant que ça fait bien trop longtemps. Sa paume se pose sur ma joue, je ne la sens pas comme je le voudrais à cause de cette barbe qui recouvre une partie trop importante de mon visage. Ses doigts la caressent, et alors, elle recule pour me faire face. L'expression grave, elle cherche mes yeux du regard.

— Mikael, tu dois faire un effort.

Je pose ma main sur la sienne, malgré mon désir de fuir ses orbes troublants. Je sais que je ne dois pas être des plus désirables, la horde de gamines excitées avec laquelle je vais devoir composer dès à présent me l'a assez fait comprendre, et, pour elle, j'aurais aimé être parfait. Elle me connaît et elle passera outre ce détail, mais je désire la faire décoller.

Pressé, angoissé à l'idée qu'elle regrette de se trouver là, avec moi, je précipite ma main entre ses jambes et appuie mes doigts contre la couture de son pantalon. Elle exhale un souffle en laissant presque entièrement retomber ses paupières, puis décide de me laisser prendre les choses en main. Je la caresse, je l'embrasse avec toute la lenteur dont je suis capable, tentant de réfréner ma soif inassouvie depuis un bon moment déjà. Sur la gorge, les clavicules, les bras. Nous nous déshabillons mutuellement.

Le regard qu'elle porte sur mon torse me laisse supposer qu'elle apprécie ce qu'elle voit, malgré les quelques abdos en moins de ceux dont elle avait l'habitude. Une lueur incandescente brille dans ses yeux, faisant naître l'envie frustrante qu'elle me prenne dans sa bouche, là tout de suite. Mais aujourd'hui, elle a besoin que je m'occupe d'elle. Dans le plus grand des silences, je la tourne sur le côté et me glisse derrière elle, allongé sur la banquette en cuillère. Ensuite, elle me tend une capote que j'enfile avant de la pénétrer. Jamais face à face, c'est sa règle. Malgré ça, j'en avais besoin. La manière dont je me suis agrippé à elle témoignait du manque qu'elle avait créé, et pendant mes lents va-et-vient, elle tourne sa tête dans ma direction. Mon front appuyé contre sa tempe, je la sens haleter contre moi, jusqu'à ce que l'orgasme raidisse chaque membre de son corps, dans un petit cri étouffé que je n'aurais pas entendu si mes sens n'avaient pas été aux aguets. Je ne tarde pas à venir également.

Mission Rédemption (publié Chez Black Ink Éditions )Where stories live. Discover now