Chapitre 30

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Habituellement, lorsque Dean Winchester se retrouvait dans une situation dangereuse, une multitude de plans d'attaque ou de défense l'assaillait. Charger l'ennemi avec une arme, si possible, ou bien avec le premier objet à sa disposition. Tenter d'échapper à la vue de l'adversaire le temps de reprendre contenance ou d'être foudroyé par un éclair de génie. Essayer de distraire l'opposant avec du sel ou un jeu de mot ridicule en espérant que le karma ait pitié de lui.

Mais en cet instant, et pour l'une des premières fois de sa vie, c'était le trou noir intersidéral. Il lui était totalement impossible de penser correctement, voire même de penser tout court. Tout ce dont on aurait pu le croire capable, c'était de fixer son frère avec intensité, les yeux exorbités par la surprise, l'horreur et l'incompréhension.

Katherine ne paraissait pas être dans un bien meilleur état avec sa bouche entrouverte et ses mains crispées autour du bras de son père. Un voile de peur incommensurable obscurcit son regard alors qu'elle se figeait devant le sourire narquois qu'arborait Sam. Enfin...si c'était bien Sam.

-Qu'est-ce que t'as fait à mon frère, espèce de fils de pute ? cria brusquement Dean, dont la rage venait de délier la langue.

Peu lui importait de savoir qui venait tout juste de prendre possession de l'enveloppe charnelle de son petit Sammy tant qu'il n'avait pas à songer à son frère, probablement prisonnier à l'intérieur de son propre corps et possiblement déjà mort. Son cerveau était bien décidé à filtrer toutes les informations n'étant pas susceptibles de l'aider à se débarrasser de ce démon ou de cette quelconque créature qui venait de voler les traits de Sam.

-Ne t'en fais pas, Dean, sourit Sam d'un doucereux ton ironique. Le petit Sammy est toujours à l'intérieur, en train de me crier de le laisser sortir. Ce que je ne manquerai pas de faire, en homme charitable que je suis. Ce sera néanmoins seulement après en avoir fini avec toi.

Le chasseur aurait dû trembler, il s'en rendait bien compte, comme Sam irradiait depuis son réveil d'une puissance qui n'était pas la sienne. Pourtant, il lui était impossible de songer à autre chose qu'à sa rage et à son effroi. Un bref coup d'œil en direction de Katherine lui donna l'impression qu'elle ressentait exactement la même chose. Enfin...à l'exception de cette étrange étincelle qui brillait dans les yeux plissés de la gamine, qui semblait sur le point de se consumer de l'intérieur.

Le jeune homme ne se serait pas inquiété davantage de la situation de sa fille si Sam ne s'était pas à son tour tourné vers la fillette, ses pupilles dilatées par une joie mauvaise que Dean ne connaissait pas à son frère cadet.

-Ma chère enfant, souffla-t-il d'une voix qui, Dean n'aurait pas pu en jurer, semblait gorgée d'une certaine fierté. Tout ceci n'aurait pas été possible sans toi, sache-le, et je n'aurais pas pu espérer un meilleur dénouement à cette histoire.

-Un meilleur dénouement ? cria Dean en forçant Katherine à reculer de façon à ce qu'il puisse la protéger de son corps en cas de besoin. Quel dénouement ? Qui es-tu, espèce de salaud ?

Les cris du chasseur n'avaient pas seulement pour but de récriminer sa haine envers celui qui lui faisait face, mais aussi de prévenir Bobby et Castiel qui, de l'autre côté de la porte, devaient sûrement attendre un quelconque signe de sa part.

Mais pas un seul de ses amis ne répondit à ses plaintes. L'envie prit à Dean de courir vers la sortie et de défoncer la porte qui le séparait de la sécurité que pourrait lui procurer la proximité de ses proches.

Sam se releva du lit, les yeux illuminés par une malice indomptée qui n'appartenait aucunement à son jeune frère. Il fixa un instant ses doigts, qu'il plia et déplia à sa guise, comme émerveillé par l'effet que produisait sa peau moite lorsqu'il collait ses paumes ensemble.

-Ne l'as-tu pas encore deviné ? sourit Sam sans même lever les yeux vers son interlocuteur. Je suis Saint Michel.

Tout s'embrouilla dans la tête de Dean et il en vint même à croire qu'il était sur le point de s'évanouir. Sam, ou plutôt Michel, daigna enfin fixer son regard dans celui du chasseur, un sourire condescendant accroché au visage. Voyant que le jeune homme, trop ébahi qu'il était, n'était plus en état de parler, l'archange prit l'initiative de son éternel air hautain.

-Oh ! Bien sûr, le corps de ton frère n'est qu'un vaisseau de passage, un simple moyen pour atteindre ma véritable enveloppe charnelle : toi.

-Et qu'est-ce qui t'empêche de prendre possession de mon corps dans l'immédiat, sale fils de pute ? parvint à articuler l'aîné des Winchester. C'est pas ce que tu as fait il y a dix ans, hein, espèce de salaud ?

Contre toute attente, Michel éclata de rire. Encore une fois, Dean fut surpris de ne pas entendre celui qui caractérisait Sam, ce gloussement sage et timide que le petit garçon qu'il avait déjà été n'avait pas perdu en vieillissant. Non, ce rire-là n'était que grossièreté et cruauté. Ce rire-là n'avait aucune pitié.

-C'est ce que ton petit ange de compagnie t'a raconté ? Que j'ai pris possession de ton corps pour la concevoir ?

Michel servit un signe de la main dédaigneux en direction de Katherine, qui blêmit davantage, bien que Dean eut crut cela physiquement impossible.

-Et bien, le renégat t'a induit en erreur. Je ne l'ai pas fait seul, cette enfant, Dean Winchester.

Le sourire de Saint Michel s'étira un peu plus alors que le coin de ses lèvres s'affaissait, signe évident que, malgré la pesanteur qui régnait dans la pièce, l'archange trouvait la situation particulièrement amusante.

-Nous l'avons engendrée ensemble.

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Ave !! Comment avez-vous trouvé ce chapitre ? Vous attendiez-vous à ce que ce soit Saint Michel qui ait pris possession du corps de Sam ? Et que pensez-vous de la révélation de la fin ?

J'ai conscience que je publie beaucoup moins qu'avant, mais ce n'est pas du tout un manque d'inspiration ou d'intérêt, loin de là ! C'est seulement un manque de temps, mais je peux vous assurer que j'ai l'intention de finir cette fiction, que j'aime toujours autant qu'à ses débuts :)

Mille milliards de mercis,

Joe.

Sauvés de la PerditionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant