Chapitre 10

672 43 5
                                    

-Elle fonctionne ! Elle fonctionne !

Dean n'eut pas le temps de mettre le pied dans le garage que Katherine lui sauta dans les bras, un grand sourire collé au visage.

-Quoi? La Jeep ?

Sans répondre, la petite fille s'empara de la main à la fois douce et calleuse du chasseur et l'entraîna vers le tout-terrain en gambadant. Le jeune homme la suivit, décontenancé. Jamais, en trois semaines, il ne l'avait vue aussi joyeuse. Ses yeux brillaient de joie et elle souriait de toutes ses dents.

-J'ai réussi à la faire démarrer ! Tu vas m'apprendre à conduire, hein ?

À son tour, Dean sourit. Il n'avait pas encore trouvé l'occasion, ou la force, de lui avouer la vérité quant à leur inexplicable lien ou de leurs futurs rôles dans l'apocalypse. Katherine n'en avait pas besoin. Et lui non plus. Il ne voulait pas briser ces moments de sérénité, les seuls instants où il parvenait à mettre ses problèmes de côté. Ne serait-ce pas idiot de ruiner toute cette paix par la vérité ?

-Qu'est-ce qu'on attend ? Allez, monte ! s'exclama-t-il en pointant le véhicule du menton. Mais ce ne sera pas ma faute si on fonce dans un arbre !

Katherine sauta dans l'habitacle et Dean prit place derrière le volant. La gamine avait bien raison : la Jeep marchait à merveille. Le chasseur sortit lentement la voiture du garage et passa derrière la maison des Hamill. Lucien, Louise, Francis ainsi que Sam, qui s'était pour une fois déplacé avec son aîné, étaient tous quatre assis dans le solarium. Lucien se leva d'un bond lorsqu'il aperçu le 4x4, poussant une exclamation que le jeune homme et la petite fille ne purent entendre. Cette dernière envoya la main aux membres de sa famille alors que le véhicule s'engageait dans un chemin de terre battue qui cheminait en direction de la forêt. Le vent d'automne entrait par les fenêtres entrouvertes et Katherine, sans cesser de sourire, regardait partout autour d'elle comme si elle voyait ce paysage pour la première fois.

-Tu n'avais pas dit que tu voulais conduire ?

La gamine tourna vivement la tête vers son ami. La joie qui perçait sur son visage rendait Dean plus heureux qu'il ne l'avait été depuis longtemps. À quoi bon s'en faire avec l'apocalypse quand il pouvait rendre un enfant heureux ?

-T'es sérieux ? s'écria la petite. Je peux vraiment ?

-Je suis pas encore assez fou pour mettre toute ma vie entre tes mains, mais je suis prêt à te passer le volant. Viens ici.

Dean, en arrêtant la voiture, pointa ses cuisses du doigts, intimant silencieusement la petite fille à s'asseoir sur lui. Katherine suivit ses instructions, prenant place elle aussi derrière le volant.

-C'est moi qui ait le contrôle sur le frein et l'accélérateur, mais ce sera à toi de manier le volant. Donc, si on a un accident, c'est toi que je vais pointer du doigt.

Katherine hocha la tête avec enthousiasme alors que Dean appuyait sur la pédale d'accélération. Pour une fois, des images plaisantes lui revinrent en mémoire. Il se revit sur les genoux de son propre père, lui qui avait appris à conduire de la même manière qu'il l'enseignait aujourd'hui à la petite. Il pouvait voir John comme s'il était devant lui, lui transmettant son amour des voitures.

La jeune fille maniait mieux le volant que le chasseur n'avait pu le penser. La Jeep s'enfonçait dans la forêt un peu plus à chaque seconde et Dean se rendit finalement compte que, contrairement à ce qu'il avait pu croire au départ, la gamine semblait bel et bien savoir où elle allait.

-Où est-ce qu'on va ?

-Il y a un lac pas loin d'ici. C'est très joli l'automne.

Katherine avait bien raison : la vue sur le bord du lac était plus que magnifique. La jeune fille demanda au chasseur d'arrêter le véhicule, puis les deux amis mirent pied à terre. Le chemin que la fillette avait emprunté menait à une toute petite baie où le sable gorgé d'eau s'enfonçait sous leurs pieds. La noirceur du lac comptait des multitudes de ridules, signe que le vent de novembre pouvait déformer même les flots les plus insondables.

Dean et Katherine s'appuyèrent contre le capot du tout-terrain. Cet instant parut si paisible aux yeux de Dean, si magique, que le garçon vint à en croire qu'il ne le vivait pas vraiment. Comme si cette vie n'était pas la sienne.

-Si tu n'es pas un agent secret, alors qu'est-ce que tu es ?

Le jeune homme se tourna vers la petite fille, s'attendant à voir sur son visage ce sourire en coin qu'il connaissait tant. Mais Katherine resta de marbre, les yeux rivés sur les flots sombres.

-J'ai tourné cette question là dans tous les sens, continua-t-elle. Jusqu'à m'en empêcher de dormir. J'ai dû élaborer des centaines de théories loufoques, mais j'ai rien trouvé. Rien d'intelligent, du moins.

-Ah oui ? Raconte-moi en une, que je ris un peu.

-Et bien...au début, je croyais que s'était ces hommes qui t'avaient envoyé. Ceux qui ont tué mes parents.

-Tu as cru ça ?

-Puis, je me suis dit que tu étais peut-être là...à cause de mes parents. Mes vrai parents, je veux dire.

Dean était bouche bée. Même s'il n'avait pas à être surpris, il devait avouer avoir ressenti un certain pincement au coeur en entendant Katherine lui avouer ses soupçons à son sujet.

-C'est un ami qui m'a envoyé pour...pour te protéger. Je ne t'ai jamais voulu aucun mal, Kath.

-Me protéger ? De quoi ?

Le chasseur soupira. Était-ce enfin le moment de tout lui annoncer ? Non. Et, si ce n'était que de lui, il ne se confesserait jamais.

-J'en sais rien.

Faux. Il avait seulement peur que, lorsqu'il laisserait échapper les paroles fatales, ce semblant de bonheur ne lui échappe pour toujours.

-Et si on retournait à la maison ?

Katherine opina de la tête et tous deux reprirent leur place dans la Jeep. Cette fois, cependant, la petite n'insista pas pour conduire. Le trajet du retour se fit dans le silence le plus total, ce qui permit au jeune homme de remettre de l'ordre dans ses pensées. Ce qu'il devait ou ne pas dire, ce qu'il devait ou ne pas faire... Il ne faisait décidément pas dans le psychologique.

Sam et la famille Hamill n'étaient pas dans le solarium lorsqu'ils passèrent derrière la maison. Rien de bien inquiétant...jusqu'à ce que le chasseur n'aperçoive trois hommes, devant le garage, qui attendaient, bien droits, les mains derrière le dos, que les deux compagnons ne sortent de la voiture.

000

Salut !! Alors ce chapitre ? L'action commence bientôt, ne vous en faites pas ! Comment trouvez-vous l'histoire en général, pour le moment ?

Merci infiniment,

Joe.


Sauvés de la PerditionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant