Chapitre 1 - Renaissance

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Lorsqu'Alia ouvrit les yeux, il lui sembla qu'elle était dans le noir. Il lui fallut plusieurs minutes pour comprendre que ce n'était pas réellement ses yeux qui « voyaient », mais son esprit qui venait de s'éveiller.

Elle détailla la pièce, mais n'y vit pas son corps.

« – Grand-mère Alixia avait raison ! Cette putain de salope Wiccan avait raison ! On peut réellement sortir de son corps !

La porte s'ouvrit sur le garçon aux yeux bleus glacier. Elle le voyait mieux maintenant qu'il était en pleine lumière : autour du mètre soixante-quinze, le corps svelte, semblait-il, assez musculeux et portant un costume trois-pièces d'un bordeaux sombre. Il était suivi par un garçon plus jeune assez frêle et recroquevillé sur lui-même comme pour se protéger d'une forme de maltraitance. Il portait une chemise à carreaux rouge, un jeans bleu quelconque et une paire de chaussures de sport rouge.

- Tu sens, Simus ? demanda le jeune homme au garçon.

- Maître, je ne... répondit celui-ci d'une voix infiniment douce.

- Je sais, tu n'as pas encore atteint le niveau d'évolution suffisant. Mais je t'avais promis que si tu me trouvais l'un de mes cavaliers alors je te récompenserais en conséquence. »

Le jeune homme se retourna si rapidement qu'Alia crut qu'elle avait rêvé. Mais elle voyait la surprise et la terreur s'afficher sur le visage de Simus, alors que l'aiguille d'une petite seringue passait sa peau pour se ficher directement dans sa jugulaire.

Le garçon s'affala sur le sol.

Alia hurla.

« Allons, ma belle, n'est pas peur... ce garçon a très bien fait son travail. Il t'a trouvé.

Le jeune homme, le Maître, prit le garçon dans ses bras et le déposa sur un canapé de velours rouge. Les boiseries de celui-ci, très travaillées, avaient été dorées à l'or fin. Alia vit enfin la pièce en elle-même. Tout le décor semblait riche, mais archaïque : les moulures sur les murs avaient été entretenues avec soins, les peintures sur bois qui s'y incrustaient étaient parfaitement colorées et brillaient même de la laque qui servait à faire tenir les pigments.

Une fois Simus délicatement posé sur le canapé, le jeune homme se retourna vers elle. En tout cas, ce qu'elle percevait comme elle. Son environnement semblait s'étendre alors que les ombres disparaissaient. C'était son champ de conscience. Il y avait des mots qui lui revenaient, des papotages extatiques de sa grand-mère Wiccan, des mots et des concepts qu'elle avait toujours trouvés farfelus même dans sa prime jeunesse. Maintenant, elle en était réconfortée.

- Il sera comme toi dans quelques heures, une trentaine, dirais-je ! Il n'était déjà plus humain. Mais, toi, ne désires-tu pas retrouver ton corps pour que nous puissions parler de vis-à-vis ?

Alia scruta l'homme. Il n'était pas seul, comme si on avait superposé des dizaines de couches de peinture les unes sur les autres. Il restait le relief de l'être, mais les âmes étaient multiples. Elle chercha son propre corps, mais ne vit qu'une étrange grosse bille de calcaire, comme un œuf, trônant sur un piédestal de marbre blanc. Cette chose pulsait, comme si on y avait placé un caisson de basses. Les harmoniques des sons devenaient des couleurs et changeaient subtilement, du vert vers le rouge, puis du rouge à l'orange... avec des taches sombres de plus en plus vaste.

- Tu en découvres trop ! » Sa voix claqua contre les rebords de bois qui commençait à ne plus fermer la pièce, et Alia fut projetée dans un bain d'eau chaude.

Elle se sentit comme incroyablement à l'étroit dans ce costume qu'elle devait reprendre. Celui-ci, son corps, baignait dans du liquide tiède. Non, c'était une substance plus pâteuse que cela. Elle tenta de respirer, mais ce fut du fluide qui atteint ses poumons. Elle expectora violemment sans pouvoir remplacer celui-ci par autre chose. Elle se noyait. Elle frappa contre ce qui la contenait des poings et des pieds, avec fureur et panique.

Je suis ZOù les histoires vivent. Découvrez maintenant