VII - Intégration

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Septième épisode
« Intégration »

« Comment ça, une soirée de bienvenue ?

Je regarde fixement Spencer devant moi qui s'est -encore- invité dans mon garage. Apparemment, sa mère aurait eu la brillante idée de m'organiser une soirée de bienvenue. Pour, soi-disant, faciliter mon intégration à leur échantillon de société. Sérieusement, si c'est ce que ça prend pour me faire accepter, aussi bien ficher le camp fissa. Le jeune homme me sourit. De la saleté lui marque le front, mais je ne lui dis pas. Je n'y vois pas l'intérêt.

- Oui, une soirée de bienvenue. Ce sera sympa, non ? 

- Non. »

Je lui réponds du tac au tac et ça semble le déstabiliser. Ce n'est pas tout, mais j'en ai marre de faire semblant, moi. Je me le suis coltiné toute la journée cet idiot. S'il ne lit pas entre les lignes alors je lui dirai clairement en anglais. Et s'il ne pige toujours pas, je ne garde pas loin l'idée de lui faire un dessin. Je veux qu'il foute le camp. Qu'il me laisse tranquille. C'est trop demander ? Lorsque la surprise s'éclipse de son visage et que son air jovial revient au galop, je soupire. Visiblement : oui.

« Tu n'as pas le choix de toute façon. Elle a déjà invité presque toute la ville. »

Je grimace, mais il ne me regarde plus. Chiffon en main, il continue de frotter une étagère qui, au fil de ses mouvements, se révèle blanche. Depuis ce matin, après l'épisode du cinglé qui a frappé mon chien, ce crétin aux mille et une questions me suis plus que Vita. L'après-midi touche à sa fin et je n'ai réussi à le faire partir qu'une seule fois. Une heure unique et le voilà revenant avec cette idée saugrenue d'organiser une soirée d'intégration. Tu parles d'une bonne idée. Pour faire sortir la frustration, je donne de solides coups de balai au plancher sale.

J'ai des plans pour ce garage. Je compte en faire mon atelier. De quoi, je ne sais pas encore. Je n'ai ni crayons, ni peinture, mais y faire le ménage me garde occupée alors je n'y pense pas tout de suite.

Toute la ville a-t-il dit ? J'ai envie d'aller me terrer dans un coin et ne pas en ressortir avant demain. Une trentaine de personnes. Toutes là juste pour moi. Youpi.

Je soupire. Même ironiquement, je n'arrive pas à dire que ce sera génial. J'ai l'impression de faire un cauchemar dans un cauchemar.

« Arrête, ce ne sera pas si terrible...

Marmonne Spencer qui m'a entendu soupirer. Je l'observe de mon coin. Depuis déjà quelques heures, je me pose la même question en boucle :

- Qu'est-ce que tu me veux, Spencer ?

Il arrête de frotter, me regarde quelques instants, puis reprend sa tâche.

- Seulement t'aider pour ton atelier. Pourquoi ?

Je ne réponds rien. Je continue de l'observer, silencieuse. Il ne savait pas ce matin que je comptais nettoyer le garage. Comment l'aurait-il sus puisque moi-même je l'ignorais ? Et pourtant il m'a suivi. Il ne m'aura pas et il le sait. Il s'arrête et laisse s'échapper l'air de ses poumons bruyamment.

- C'est la première fois que je vois quelqu'un d'à peu près mon âge depuis plus d'un an. Tu ne peux quand même pas m'en vouloir d'essayer de sympathiser un peu ?

Je continue de le détailler. Ouais. J'avais déjà noté qu'il devait être un peu plus loin que la mi-vingtaine aussi. Moi, pourtant, ça ne m'a pas donné envie de m'en faire un pote. Quand il me lance un regard sournois, je comprends qu'il y a une suite à venir :

- En plus il s'agit d'une jolie fille. Je ne peux quand même pas laisser passer sans rien tenter. »

À ses mots, mon visage se ferme et je lui balance mon chiffon en pleine figure avant de quitter la pièce, tête haute. J'appelle Vita qui d'un bond me rejoint.Non, mais. Pour qui il se prend celui-là ?

Dead LandOù les histoires vivent. Découvrez maintenant