Broken Rules

~ TWENTY-FIVE ~

De l'espoir, toujours anéanti par la déception.

— Je vais t'emmener à l'université, décide Chase en se détachant de moi avant de s'étirer à son tour.

Je me retourne pour admirer la façon dont ses muscles roulent sous sa peau claire et fine, qui semble briller dans la semi-obscurité de l'appartement. Je pensais qu'il aurait eu plus de tatouages que ça, au vu de son addiction aux aiguilles – ses oreilles en sont la preuve. Mais quelque part, je sais pourquoi il n'en a qu'un.

Pour elle.

Parce qu'elle est unique à ses yeux, et il veut qu'elle soit la seule à marquer sa chair. J'esquisse un léger sourire à cette pensée, tandis que Chase pose sa main contre ma joue avant de caresser la commissure de mes lèvres.

— Tu es magnifique, petit renard... Surtout quand tu brilles de cette façon.

— De quelle façon ?

— Comme si tu étais heureuse.

Mon sourire se fane un peu face à la réalité qui me heurte de plein fouet : je ne suis pas heureuse. Sauf quand il est là. Il n'y a que lui qui arrive à me procurer ce semblant de paix. Mais je sais pertinemment que dès que sa chaleur s'éloignera, je me sentirai à nouveau alourdie par mes peurs, mes faiblesses et mes angoisses. Mon âme a reconnu en lui un refuge, une place où me lover en toute sécurité. Mais je dois parfois sortir de mon terrier, même si ça implique de retrouver le brouhaha dans ma tête et les frissons désagréables sous le regard des autres.

— Hé.

Chase passe ses doigts sous mon menton pour relever mon visage vers lui. Au fond de ses iris ondule une étincelle d'inquiétude, qui se répand dans le vert sapin qui me rassure tant d'habitude.

— Qu'est-ce qu'il se passe dans cette jolie tête ? murmure-t-il en calant une boucle derrière mon oreille. Dis-moi ce qui te tracasse, Vix.

Je pince les lèvres, le nez retroussé.

— Rien, c'est juste que... t'es une bouffée d'oxygène, tu n'imagines pas à quel point... Mais j'ai peur de suffoquer quand tu t'éloigneras. À chaque fois que tu n'es pas avec moi, il m'arrive des emmerdes, et je suis fatiguée de les attirer comme un aimant.

Il dépose un baiser d'une tendresse infinie sur mon front, avant de répondre :

— Mais je ne suis jamais loin, Vix. Parce que je n'arrive pas à faire autrement que de te coller au cul. Quand je m'éloigne, j'ai trop peur de ce qu'il pourrait t'arriver, rien qu'avec Noah. D'ailleurs, tu...

— Non, Chase, le coupé-je en fermant les yeux.

Je sais déjà ce qu'il veut, et je ne peux pas accepter. Tout d'abord à cause de ce qu'il se passe entre nous. Si je cédais et finissais par habiter avec lui, Noah comprendrait très vite. Et je le sais assez fourbe pour mettre Chase dans une position délicate. Je ne veux pas qu'il perde son travail, et que Hope en subisse les conséquences.

— Vix... plaide-t-il en prenant mon visage en coupe.

— Noah reste mon frère, Chase. J'étais seule quand j'ai appris la mort de nos parents. J'étais seule quand j'ai dû m'occuper de toute la paperasse. J'étais seule quand leurs cercueils sont descendus dans le sol. Je serais quoi, si je venais à lui infliger cette même solitude ?

Il lâche un soupir qui s'échoue contre mes lèvres, que j'entrouvre pour goûter son souffle, comme s'il pouvait me donner la force d'affronter son regard réprobateur.

— Je ne serais qu'une lâche, une hypocrite, terminé-je d'une voix plus basse. Et puis, pense à Hope. Que crois-tu que Noah dirait si je venais à emménager avec toi ? Tu le connais assez aujourd'hui pour savoir qu'il n'hésiterait pas à te foutre dans la merde, si ça pouvait te faire regretter de t'être intéressé à moi. Ne lui donne pas une arme qui pourrait avoir raison de toi, Chase... Pas alors que je peux enfin profiter de ta chaleur.