Chapitre 19

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C'est le grand jour ! Le banquet a lieu ce soir. Après plusieurs jours de couture acharné et de secret presque découvert, je viens de finir les derniers détails.
Il y avait pas mal de travail tout de même mais je suis plutôt fière de moi. Et j'adore le résultat. Le haut de la robe est donc moulant et le bas s'évase à partir de la taille. Je suis fan de ces manches ouvertes. Enfin bon en résumé, ma création me plaît beaucoup.

Comme je ne sais pas à quel heure le bal commence, je me poste à une distance rapprochée de la salle en tendant l'oreille. J'attends de déceler une note de musique ou les bruits des carosses, à l'abri des regards et surtout du sien. Je n'ai pas la moindre envie qu'il me voit et qu'il me balance ses réflexions à la noix. Ce soir, c'est toi qui va être à fleur de peau.
Plusieurs minutes plus tard, je ne saurai vous dire combien - j'ai perdu la notion du temps ici - je discerne une mélodie. C'est le signal. Il est temps de se préparer...

Après avoir enfilé ma robe, je m'attelle à mes cheveux. Je les brosse, prend deux mèches à l'avant pour les tresser tandis que je rassemble le reste en un chignon haut.
J'ajoute un collier incrusté de rubis, assorti à ma tenue, autour de mon cou.
Pour les chaussures, je porte des talons noirs volés à une des créatures séjournant au palais. Ils étaient tous si obnubilé pas la soirée que ça a été d'une facilité sans nom. J'imagine déjà vos visages qui me jugent, alors laissez moi ajouter qu'elle en avait une telle collection que celles-ci ne lui manqueront pas et qu'elle ne remarquera peut-être même pas leur disparition. C'est pour la bonne cause. Vous voulez une véritable revanche oui ou non ? Ou vous préférez une pauvre petite vengeance de pacotille ? Bon et bien voilà, les talons étaient nécessaires.

Les débuts des préparatifs ont beau avoir eu lieu dans la salle du trône, la soirée se déroule dans la salle de bal, devant laquelle je me trouve pendant que deux gardes ouvrent les portes. Je m'infiltre dans la pièce, subjuguée par la beauté du décor. Des moulures des murs au plafond, de majestueux lustres, c'est à couper le souffle. Les mains posée sur la rambarde devant moi, je ferme les yeux pour apprécier la musique. Cela fait si longtemps que je n'en ai pas écouté.
Lorsque je rouvre mes yeux et qu'ils se posent sur les créatures en contre bas, je me rends compte que tous me fixent, certains même font des messes basses.

Je deglutis. Je n'avais pas imaginé que j'attirerai autant d'attention même si cela me paraît logique maintenant. Je ne me laisse pas intimidé pour autant et garde la tête haute. En parcourant la salle du regard, je tombe sur la silhouette du roi qui se retourne dans ma direction, se demandant sûrement pourquoi tout le monde est devenu aussi immobile qu'une statue.
Lorsque nos regards se croisent, je le vois passer de la stupeur à la colère progressivement. Je ne regrette absolument pas mon acte, l'objectif étant atteint. Ses yeux détaillent ma silhouette de haut en bas avec une telle intensité que cela me donne la chair de poule. J'ai l'impression d'être mise à nue, sans mauvais jeu de mot, par son simple regard.
Je me ressaisis rapidement et descends les escaliers dans l'intention de le rejoindre.

Daefir

Je n'arrive pas à croire qu'elle est vraiment là. Comment a-t-elle pu trouver une robe ? Et la voir vêtue de rouge ne m'étonne absolument pas de sa part. J'admets être presque content de la voir, son côté persévérant est aussi agaçant que fascinant.
Tout le monde l'observe et je les comprends, elle est à couper le souffle.
-- Cette fille est confiante, arrogante, provocatrice et têtue. N'est-ce pas exactement les qualités de sa majesté ? ironise Norlar
Je pourrais le remettre à sa place mais il n'a pas tort alors je me contente de sourire.
Il est présent depuis le début de mon règne. C'est sans doute le seul en qui j'ai confiance. Le seul avec qui je m'autorise à ne pas être ce roi cruel en permanence. Il est ce qui se rapproche le plus d'un ami.

Lorsqu'elle arrive, je lui tends ma main, dans laquelle elle dépose la sienne et l'entraîne au milieu de la salle. En tendant l'oreille je perçois la conversation entre deux fées.
-- Qu'est-ce qu'il lui trouve ?
-- Ce n'est pas d'originalité dont elle a fait preuve mais d'irespect.
-- Quand bien même ce le serait, n'importe qui pourrai le faire. Il n'y a rien d'audacieux.
J'imagine qu'elle aussi a entendu leurs remarques vu la manière dont elle sourit. A en croire l'expression sur son visage, leur jalousie la rendu fière.
Face à moi, mon autre main se pose dans son dos tandis que l'orchestre se met à jouer un morceau.

Automatiquement, elle place la sienne sur mon épaule. Rapidement, nous nous mettons à danser. Enfin je la guide et elle suis.
Personne d'autre ne danse. Le roi ouvre le bal. Et c'est avec elle que je le fais. Ils nous observent mais elle ne semble pas y prêter attention. Quand à moi j'imagine déjà le sermon auquel je vais avoir le droit pour cette décision. Mais je suis le roi, je fais ce que je veux après tout.

Le regard impassible que j'arborais précédemment a disparu. Et son apparition en est pour quelque chose. En revanche, j'espère qu'elle ne saurai dire de quelle émotion il est traversé.
-- Comment ?
Je n'ai pas besoin de développer d'avantage pour qu'elle sache ce à quoi je fais allusion.
-- Première information me concernant : je suis têtue. Quand je veux quelque chose, je l'obtiens.
Je ne l'avais pas remarqué tiens...
Elle rapprocha son visage du mien avant de me chuchoter :
-- Deuxièmement, j'adore la couture alors la prochaine fois interdis-moi les merceries aussi.
Je tente tant bien que mal de cacher ma stupeur. C'est elle qui a fait ça ?
Plus j'en apprends sur elle et plus elle m'intrigue. Cette fille est pleine de surprises.

Les regards sont toujours braqués sur nous, qui dansons. Honnêtement, je pensais que danser avec elle me serait impossible mais cela ne me paraît pas si difficile. Elle ne se débrouille pas trop mal.
-- Alors qu'en penses-tu ? demanda t-elle en désignant sa robe du regard.
Et je la fit tourner sur elle-même.
En revenant, son dos heurta mon torse si bien que je lui susurrais ma réponse au creux de son cou.
-- Je la hais.
Je la hais de t'aller aussi bien
-- Tout comme je te hais.
Je te hais pour les émotions que tu provoques en moi
Je la fis pivoter pour qu'elle se retrouve de nouveau face à moi et qu'on retrouve la position classique de cette danse.

Nous reprîmes notre valse.
-- Tes oreilles. désigne-t-elle Elles ne sont pas à l'horizontale comme habituellement mais verticale.
-- Tu poses beaucoup trop de questions petite chose.
Je la fis basculer en arrière pour esquiver sa remarque. La voir dans cette robe...
En la remontant, son visage dégagé se retrouva proche du mien, ses lèvres frôlant les miennes. Je sentais son souffle saccadé contre ma peau.
Et merde...

Ni elle ni moi ne bougions. En vérité j'en suis incapable. C'est même pire que ça j'ai envie de me rapprocher encore plus et de combler cet espace entre nous. Je ne peux détourner mon regard de sa bouche. Mon rythme cardiaque s'accélère. L'avoir si proche de moi me rend nerveux.

La mélodie en fond s'arrêta, les invités se mirent à danser à leur tour, ce qui fit disparaître cette énergie entre nous. Elle lâcha ma main et s'éloigna, me laissant là, déboussolé.

dream or nightmareWhere stories live. Discover now