Chapitre 17 Aaron

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À l’instant où je m’engouffrai dans les sous-sols où elle avait été placée avec son accord, je n’aurais su dire si j’avais envie de la voir ou uniquement envie d’être rassuré. 

Pourquoi ce besoin permanent de proximité m’habitait, je ne suis pas ce genre d’homme ! 

Mais elle ! Elle était tellement différente des autres. 

À ses côtés, j’avais la sensation de vivre. D’exister ! 

Sa silhouette se dessinait dans l’obscurité de cette pièce, assise à même le sol, poussiéreux, elle restait immobile.

— Ta nouvelle chambre ? Certainement l’endroit que tu mérites ! commençai-je.

J’étais blessé dans mon orgueil, et mon air arrogant et méprisant revint au galop. Elle détourna le regard en restant silencieuse. Les cornes se mirent à chanter, annonçant l’arrivée des Skells.

— Je dois y aller, conclus-je aussitôt, d’une voix froide et dure, sans attendre un mot de sa part. 

Les Skells n’eurent que peu de mal à franchir les murs de l’enceinte qui les séparaient des autres guerriers. C’était des monstres, mi-hommes, mi-animaux, assoiffés de sang. 

Après un combat sanguinaire, il n’y eut aucune perte de notre côté, uniquement des blessures plus ou moins superficielles. Le sang de mes ennemis qui me recouvrait était le résultat d’un combat qui avait fait rage, et l’odeur se répandait sur le sol. Soudain, quelque chose m’interpella ! Une force approchait. 

Le mal ! Je pouvais le sentir. Comme un mauvais pressentiment. 

J’abaissai mes épées au sol en prenant le temps d’observer l’horizon, l’air intrigué. Tandis qu’une nouvelle corne se mit à chanter pour annoncer la reddition ou la victoire. Peu importe, mes yeux fixaient le ciel, je reconnus cette couleur qui commençait à se dessiner tout autour. Des nuages rouges en approche, ainsi qu’un vent venu d’Est qui s’élevait. 

C’était elle ! 

C’était son pouvoir qui se manifestait de la sorte lorsqu’elle faisait appel à lui.

Le murmure de sa voix résonna en moi, elle m’appelait, ne cessant de prononcer mon prénom. Troublé, je me retournai pour comprendre, et la vis. 

Elle avançait dans ma direction. 

Ses yeux aussi noirs que la nuit, comme à chaque fois qu’elle était possédée par le mal. 

Le vent souffla de plus en plus fort, et ses mains s’enroulèrent de flammes de plus en plus imposantes. 

— Arrête ! hurlai-je, mais mes mots n’eurent aucun effet sur elle, et le feu grandissait de plus belle. Calme-toi ! Je vais bien ! Ce n’est pas mon sang. 

Je savais qu’elle avait perçu le combat, mais peut-être ne pouvait-elle pas savoir qui avait l’avantage. 

Le sang qui recouvrait mon visage ne jouait certainement pas en ma faveur ! Je la fixai et mes yeux la supplièrent de se ressaisir, de peur que ce feu démoniaque ne tue tout le monde autour de nous. 

La seule idée qui me vint n’était sans doute pas la plus brillante et pourtant, à ce moment précis c’était la seule envie à laquelle j’aspirais. 

Comme une évidence, je mis mes mains de part et d’autre de son visage pour lui maintenir la tête fermement, une fois sûr qu’elle ne me ferait aucun mal, je m’emparai de ses lèvres. L’embrassant avec engouement, espérant que cela aurait l’effet voulu. Mes lèvres la dévoraient sans rien attendre en retour. Elle les effrayait pour la plupart, mais moi, elle ne me faisait pas peur. 

Quand elle reprit ses esprits, elle aperçut le feu sur ses mains s’éteindre petit à petit. Elle me regarda, meurtrie en imaginant sans doute ce qu’elle aurait pu accomplir si je ne l’avais pas arrêtée.

— Ils ont fait demi-tour, annonça l’un des guerriers.

— Pourquoi ? s’interrogeaient les autres.

Tout le monde s’en étonnait. Nous, nous restions là, face à face, à nous fixer, mes mains maintenant toujours ses joues, je laissai se dessiner un sourire au coin de mes lèvres, et lorsqu’elle s’apprêtait à me le rendre. 
Une ombre traversa l’horizon à la vitesse d’un éclair. 

— HAAA. 

Un cri de douleur sortit de sa bouche la faisant tomber à terre. Une flèche lui transperça le dos, puis arriva une deuxième, et très vite une pluie s’abattait sur l’enceinte du domaine.

— BOUCLIER ! hurla Almir.

Je me penchai au-dessus de son corps pour créer une armure avec le mien. Almir fit un mur au-dessus de nous avec l’aide d’autres guerriers.

— Reste avec moi ! Ne t’endors pas ! Reste avec moi, ça va aller !

— Aaron… soupira-t-elle.

— Je suis là ! Ne t’en fais pas, je ne te quitterai pas ! Regarde-moi ! Il ne faut pas que tu t’endormes ! Si tu restes éveillée, tout ira bien ! ma voix essayait de la rassurer autant elle que moi.

— Les Skells n’étaient qu’une diversion ! Que tout le monde reste sur ses gardes ! cria Almir.

— Aaron ? Retire-moi… les… flèches… je… n’arriverai… pas… à… cicatriser.

Elle disait vrai. Si je ne lui retirais pas ces flèches immédiatement, elle perdrait beaucoup trop de sang.

— Ça va faire mal ! soufflai-je et sans attendre de réponse de sa part, je lui plaqua la tête contre mon torse, et la maintint fermement immobile de mon bras gauche, puis petit à petit je lui retirai les flèches une à une, sans jamais m’arrêter. 

J’étais conscient que sa force la guérirait alors je n’hésitai pas et ses hurlements se firent de plus en plus sourds. 

Quand le calme revint, je la pris dans mes bras pour m’excuser de la douleur que je venais de lui infliger. 

— Quelque chose approche, soupira-t-elle. 

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