Chapitre 13 Aaron

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On venait tout juste d’arriver et ce que je craignais se produisit en l’espace de quelques secondes. 

Je savais que cette force la protégeait et qu’elle ne la contrôlait pas. Il me fallait faire face à la réaction qui m’anima à l’instant, celle de les punir d’avoir ne serait-ce qu’osé poser leurs mains sur son corps. 

Mes hommes me dévisageaient étrangement, ne comprenant certainement pas pourquoi je prenais parti pour cette femme, et honnêtement je ne le savais pas plus. En tout cas, je n'avais pas envie de me l’admettre. 

Quelque chose en moi se manifestait lorsqu’il s’agissait d’elle. Quelque chose que je préférerais ne pas ressentir. 

Sans avoir à me répéter, tous rangèrent leur épée dans leur fourreau. Le fait d’être l’un des fils de leur roi me conférait un grade important, mais c’était surtout mon dévouement et ma renommée au combat qui inspirait le respect de ces soldats.

— C’est donc ça qui s’est échappé de la brèche ? demanda un guerrier.

— C’est un démon, on ne peut pas lui faire confiance ! rétorqua un autre.

Elle les dévisagea comme pour leur dire « Faites comme si je ne comprenais pas », mais elle se tut, certainement n’avait-elle pas l’envie de se donner encore plus en spectacle qu’elle ne venait de le faire.

— Oui, elle s'est libérée de la brèche, mais d’autres choses en sont sorties également, et elle nous a sauvés d’eux.

Almir, qui nous avait rejoints, la regarda en prononçant ces mots. Elle lui souriait pour le remercier et il lui fit un signe de la tête. 

— Bien, maintenant que les présentations sont faites, nous devons réfléchir aux événements à venir.

Il était accompagné de Dorian, un homme né à Alianis, faisant partie des pères fondateurs. Il s’approcha et lui tendit la main qu’elle ignora. Je jubilai de l’intérieur, cet homme m’insupportait. Je l’avais croisé quelquefois dans la capitale et il avait toujours cet air méprisant sur son visage. Dégageant quelque chose que je ne saisissais pas. Voyant qu’il revenait à la charge, je m’interposai en me plaçant devant elle, comme pour faire barrière entre l’ancien sorcier d’Alianis et cette femme.

— Aaron, écarte-toi, me tanne Almir, il est avec nous. Il peut nous aider à déchiffrer qui elle est !

J’avais envie de lui dire que je m’y opposais, que je voulais être le seul à comprendre qui elle était ! Le seul à poser mes mains sur son corps de déesse. Le seul à connaître les moindres recoins de celui-ci, ainsi que de son esprit… Je me surpris à me lancer dans un monologue sans but dans ma tête, croisant le regard interrogateur de mon frère. 

Quand, sa voix se manifesta derrière moi.

— Comment ? 

— J’ai été élevé à Alianis et, au temps ancien, nous avions le pouvoir de communiquer avec l’au-delà. Laisse-moi lire en toi pour comprendre pourquoi et comment tu es sortie de la brèche. 

— Quelle place occupiez-vous à Alianis jadis ?

— Je n’étais qu’un conseiller, puis j’ai siégé au gouvernement de Métrios après qu’Alianis a été dissoute suite à la Grande Guerre, cela faisait partie du traité de paix. Seuls quelques rebelles peuplent le nord dorénavant. Quant aux autres, nous nous sommes reconvertis dans plusieurs domaines, et voyageons à travers les contrées pour offrir nos services à ceux qui les requièrent.

— Nous avons rencontré un certain Arkan à la lisière du royaume des Syls. Est-ce que vous le connaissez ? demanda-t-elle.

Elle n’avait confiance en personne, sauf peut-être en moi et depuis qu’elle avait réapparu, on dirait que tout le monde lui portait de l’intérêt.

— Ce nom ne me dit rien, désolé. Si vous êtes d’accord, permettez-moi d’entrer dans votre esprit.

— Elle va avoir mal ? 

Lorsque ces mots sortirent tout seuls de ma bouche, tous se tournèrent avec un air interrogateur. Merde, ils vont finir par croire que j’ai un faible pour elle si je continue comme ça. Almir me regarda, intrigué par le fait que je puisse me soucier de quelqu’un d’autre que moi ! 

Merci mon frère, ravi de ton appui !

— Il est possible que la douleur soit insoutenable, rétorqua Dorian. D’habitude, c’est sur les morts que nous réalisons cette pratique. Le sortilège utilisé me permettra d’ouvrir une porte à l’intérieur de votre esprit et de voir le passé à travers vos yeux.

— Il doit y en avoir un autre… 

Je n’ai pas le temps de finir ma phrase, qu’elle me coupa.

— C’est bon, je peux le faire, allez-y.

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