Chapitre 22 : COUP DE FOUDRE AUX TOILETTES

23 4 0
                                    

28 janvier 2022, 00 : 19

"Voilà, t'es contente ?"

Ses mots résonnent dans ma tête, j'ai du mal à y croire.
Dire si je suis satisfaite ou non de sa réponse me serait difficile : ça met encore plus le bordel dans ma tête.

Je ne vais pas m'en plaindre pour autant : mon dulciné qui me fait une déclaration en mode coup de foudre à Nothing Hill, c'est pas tous les jours. Bon, sauf que dans notre cas précis, ce n'est pas Julia Roberts mais simplement moi (et je ne vis pas non plus dans le déni total : je suis bien consciente que ce n'est pas le même calibre)
Ce serait plutôt coup de foudre aux toilettes - autrement dit la comédie romantique foireuse qui passe sur TF1 le dimanche après-midi.

N'en déplaise aux esprits trop étriqués, le PQ et les désodorisants à la lavande, ça peut avoir un côté romantique (bon ok, là je suis dans le déni).

En tout cas je me retrouve soudainement comme possédée par un élan passionnel et je m'avance avec toute l'assurance que je peux prétendre avoir  vers Samuel qui écarquille les yeux à mesure que je m'approche dangereusement de son visage.

Quelques centimètres nous séparent et soudain nos lèvres se rencontrent, pour la toute première fois. C'est doux, un peu maladroit au début mais doux. Et puis petit à petit, la timidité laisse place à une forme de fougue incontrôlable : mes mains s'agrippent à sa chemise tandis que les siennes entourent mon visage d'un mouvement pressant.

J'ai le souffle court mais je ne peux pas m'arrêter : son contact devient addictif.

Nous sommes pourtant interrompus dans notre étreinte par un raclement de gorge provenant de l'entrée des toilettes.
Je m'écarte brusquement de Samuel, comme une voleuse pris en flagrant délit, et me retourne pour découvrir le visage de Paul, ébahi :

"Ça a l'air drôlement festif par ici ! Vous auriez dû nous prévenir, on se serait joint à vous !" ironise-t-il

Je tente tant bien que mal de remettre un peu d'ordre dans ma chevelure ébouriffée et redresse ma bretelle de soutien-gorge qui s'est fait la malle. Je constate avec dépit que je ne ressemble plus à un épouvantail qu'aux héroïnes de films qui ressortent avec une allure sauvagement sexy après une partie de jambes en l'air improvisée sur la photocopieuse. Hollywood n'est décidément qu'un tissu de mensonges.

Samuel, quant à lui, a le visage qui vire à l'écarlate. Il faut dire qu'il n'a pas de quoi être fier : il vient d'être surpris en train de fricoter avec une femme qui n'est pas sa copine. On a connu plus élogieux.

Paul tente de nous rassurer - à sa façon :

"Vous verriez vos têtes, c'est à mourir de rire ! Relax, je sais garder un secret"

C'est bien ça qui me fait peur : je ne suis pas si sûre qu'il en soit capable. Je connais mon meilleur ami et son amour pour les ragots. Quand bien même il est plein de bonne volonté, son alter ego totalement desinhibé qui risque de surgir à tout moment sous l'emprise de l'alcool m'inquiète un peu.

Je ne réponds rien, échange un regarde furtif empreint de panique avec Samuel puis m'enfuit retrouver la piste de danse.

La soirée se poursuit comme si de rien n'était, je ne vois plus Samuel dans les parages. Puis quand vient l'heure de quitter les lieux - horaires de municipalité obligent - j'aperçois Paul qui titube dangereusement vers le micro placé sur l'estrade et qui se lance dans un désastreux discours de remerciement :

"J'veux vous dire, vous zetes vraiment des abis...amis en or. Et n'oubliez jamais : qui vole un oeuf vole un bœuf"

Ses propos n'ont ni queue ni tête : on devrait le filmer, ça ferait une bonne publicité de prévention contre l'abus d'alcool.

Je crains le pire et décide de prendre les devants. Je lance un appel général :

"Maintenant tout le monde dehors sinon les flics vont débarquer, et cette fois ce sera pour de vrai !"

Ma tentative n'a pas l'effet escompté puisque la plupart des invités sont inertes ou se déplacent telles des cadavres ambulants. C'est pas gagné.

28 janvier 2022, 13 : 10

La lumière éclatante transperce mes paupières. Le réveil est difficile. J'émerge de mon lit et me retrouve nez à nez face mon reflet dans le miroir- digne d'un film d'horreur. Un reste de mascara   sous les yeux, ma tignasse emmêlée comme si je sortais d'un combat de boxe et un vieux tee-shirt taché de sauce bolognaise en guise de pyjama.

"C'est ton heure de gloire toi dis donc"

Je me retourne et découvre Paul qui m'esquisse un sourire complice.

"Parle pour toi ! T'as les yeux tellement bouffis de fatigue, on dirait Afida Turner sans la chirurgie" je lui rétorque, pas peu fière de ma trouvaille.

"Alors là, c'est un coup bas. Même venant de toi" me dit-il avant de quitter ma chambre en lançant son plaid sur son épaule, dans une démarche théâtrale.

Son air faussement outré m'amuse. Je ne sais lequel de nous deux fait le plus peur à voir.

Je me dirige vers le salon pour y trouver de quoi m'alimenter : un bol de chocapics noyé dans une piscine de lait. Le premier qui me dit que ce n'est pas un vrai repas aura affaire à moi.

Pendant ce temps, Val est déjà en tenue de sport en train de faire sa séance de yoga en ligne. Une salle, deux ambiances. On a pas tous la même conception du dimanche.

Le reste de ma journée se déroule dans la même dynamique, à savoir proche de la limace. J'alterne entre le canapé et mon lit, allers retours ponctués de quelques passages aux toilettes pour évacuer la quantité d'alcool ingérée la veille.

Alors que j'effectue mon énième pipi de la journée tout en scrollant de façon frénétique sur Instagram, je reçois une notification intriguante. Message de Samuel.

"Je viens de quitter Paula. Il faut qu'on parle"

Toc, toc : ce sont tes conneries d'hier soir qui te rattrapent ma vieille.

Décidément, tout nous ramène aux chiottes dans cette histoire.

__________________

N.A. : Alors, votre avis sur ce premier bisou ? Et les lendemains de soirée, vous les vivez plutôt comme Sasha ou Val ?

__________________

A SUIVRE... (prochaine chapitre publié le 03/12)

Si vous avez aimé ce chapître, n'hésitez pas à voter, commenter, partager. Ça fait toujours plaisir !

Les critiques constructives sont toujours les bienvenues.

Le hasard fait bien les chosesWhere stories live. Discover now