Chapitre 17 : Le Poison

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A Mantua, Sidjil était assis sur les marches de sa caravane, fumant une cigarette à l'ombre et écrivant dans son petit journal. ''Et depuis ce matin, une ardeur singulière me remplit de joyeuses pensées. J'ai rêvé que Maxime me trouvait mort, ses baisers insufflaient tant de vie à mes lèvres que je renaissais, et devenait empereur. Dieu qu'il doit être doux l'amour que l'on possède, si la seule ombre de l'amour prodigue tant de joies.'' Il vit au loin arriver à toute allure une voiture, dépassant celle de la poste. Interloqué, il arrêta d'écrire et le regarda drifter sous la vitesse et la poussière glissante. Il se rendit compte que c'était la voiture de Balthazar et se releva, le sourire aux lèvres.

- Des nouvelles de Verona ! Il courut vers la voiture, son conducteur en sortie la mine affligé, Alors Balthazar ? Il lui fonça dessus et l'enlaça, le petit brun tituba sous l'impact, Tu ne m'apportes pas une lettre du prêtre ? Qu'en est-il de mon homme ? Est-ce que mon père va bien ? Comment se porte mon Maxime ? Rien ne peut aller mal s'il va bien. Il voulait chahuter son serviteur mais celui-ci se défit bien vite de son emprise, perturbant alors Sidjil, il comprit que quelque chose n'allait pas.

- Il est bien, ainsi rien ne peut aller mal. Il rebondit le coeur lourd, Sidjil fronça les sourcils, sous le regard inquisiteur de son maître, Balthazar baissa les yeux avant de prendre une inspiration et d'affronter son regard, son corps repose dans la chapelle de son clan et son âme immortelle vit avec les anges. Il marqua une pause, ne voulant pas continuer, voyant les yeux de Sidjil commencer à briller. Je l'ai vu étendu. Pardonne-moi d'apporter de si tristes nouvelles. Sidjil fixa le sol silencieusement, et se mit à avoir du mal à respirer. Son cœur fut crevé pour la dernière fois. Il n'existe pas un monde sans son Maxime, il le refuse. Pourquoi Dieu est-il sans relâche avec lui ? Il avala difficilement sa salive, la gorge sèche, la bouche pâteuse, l'esprit embrumé et le cœur en miettes. Un sanglot douloureux lui échappa.

- C'est ainsi donc ? Il répondit mollement. Balthazar tenta de le réconforter mais Sidjil se mit à marcher à reculons pour mettre de la distance. Il le rattrapa et tenta de l'enlacer mais son maître le rejeta violemment. Les larmes coulaient à flot sur ses joues. Il passa sa main dans ses cheveux dans un geste purement nerveux, un cri de douleur perçant lui échappa. Il avait trop chaud d'un coup, sa chemise à peine fermée s'ouvrit et s'enleva presque. Il continua de pleurer en marchant, ne distinguant que la lumière du soleil tant sa vision était floue. Il regarda l'apparition d'Hélios. Balthazar décida d'arrêter de le suivre, sachant qu'il ne lui serait d'aucun réconfort. Sidjil tomba à genoux et fondit en larmes, sanglotant bruyamment. Il serra les poings et hurla à qui l'écoutait. Je vous défie, étoiles ! Il s'effondra sur lui-même, frappant le sol de son poing en pleurant à chaudes larmes.

Qu'est-ce qu'il avait mal au cœur. Qu'est-ce qu'il lui faisait mal. Pas son Maxime. Tout sauf son Maxime. Par pitié. Il implora Dieu de lui rendre, les étoiles, la Mort, n'importe qui. Pas son Maxime. Pas son grand amour. Il rejeta tout son corps en arrière et d'un hurlement déchirant, prononça comme seul mot, le prénom de son amour, encore et encore, dans des sanglots atroces. Le monde s'était comme arrêté pour laisser Sidjil le temps de panser son cœur. Il balança son corps d'avant en arrière, se serrant dans ses propres bras, gémissant de douleur sans s'arrêter. Il paraissait fou, complètement détruit par la perte de son époux. Balthazar le regardait, bouleversé, jouant avec ses mains. Il s'en voulait d'apporter tant de peine à son maître. Celui-ci arrêta soudainement de sangloter et de se balancer. Il se retourna vers son serviteur, le regard glacial, les larmes coulant toujours sur ses joues sans un bruit. Il se releva doucement et marcha à grande enjambées vers sa caravane, rattachant sa chemise.

- Je partirai ce soir.

- Arme-toi de patience. Lui répondit le petit brun tentant de le raisonner, Sidjil ne l'écouta guère, s'emparant de son arme qui trônait sagement dans son holster pendant de sa caravane. La tristesse avait disparu, comme s'il enchaînait les étapes du deuil à une vitesse fulgurante. La colère l'animait désormais. Balthazar tenta de nouveau de l'en empêcher mais il fut projeté brutalement par terre. Laisse-moi. Cracha presque Sidjil. C'était comme si toute la douleur qui le transperçait avait disparu, il marcha vers la Ford. Tes yeux égarés présagent un malheur.

In Fair VeronaWhere stories live. Discover now