22. Une amitié maladroite mais une fraternité rapiécée

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Je racontai tout à mon amie Scarlett lorsque je la vis le lendemain.

– T'aurais pas dû, m'intima-t-elle.

– Parce que j'avais le choix?

– Tu lui as donné le choix de profiter d'un point sensible, et maintenant quoi?

– Parce que toi, tu aurais fait différemment? Parce que toi, tu as toujours la bonne réponse quand il le faut?

Une fois dans le local de classe, j'abattis le bouquin de devoirs sur la table de Cédric. Il m'adressa un clin d'œil accompagné d'un « merci » baveux, sur lequel je m'abstins de commenter. Je retournai prestement à ma place, ayant senti le poids du regard désapprobateur de Scarlett, mais que j'ignorai avec équivoque. Je lui fis dos – l'écho invisible d'une porte claquée en pleine figure.

À la pause du dîner, elle m'arrêta à la sortie des toilettes, nonobstant à ma ferme intention de ne pas lui adresser la parole.

– Écoute, je suis désolée pour ce matin, dit-elle sans préambule.

Facile à dire une fois que tu as cassé la vaisselle. S'excuser ne la répare pas.

– Je suis tellement stressée pour les sciences, je ne retiens absolument aucun concept et le test d'entrée au lycée est la semaine prochaine. Je suis dans la merde jusqu'au cou, et si je n'arrive pas à rentrer au collège international, je serai la blatte finie de ma famille.

Et si tu en es une, c'est censé me faire de quoi?

– Tu es mon amie, je devrais être là pour toi.

– Hmmm...

– Je devrais pas te faire la morale, c'est ce que j'essaie de dire.

Clairement ce que tu as dit ce matin, et maintenant tu améliores ton cas...

Mais son ton se faisait suppliant. Elle me regardait avec ses grands yeux de biche, dépourvus de méchanceté. Que je ne pouvais pas détester. Scarlett avait l'audace d'être... Scarlett. Elle était prête à piétiner sa fierté pour se plier à ma hauteur et offrir un rameau.

À une connasse comme moi?! (Avouons-le, je suis dure à vivre.) J'étais outrée.

Bien que son stress vécu n'expliquât en rien son attitude de Mme-je-sais-tout, je pouvais tenter de l'aider, non? Elle m'avait sauvé les fesses d'emmerdeurs et m'avait consolée quand je m'étais effrondée, je lui devais bien cela.

Une voix rationnelle au fond de moi me ramena à la réalité: Surtout que j'ai accepté d'aider mon ennemi dans une matière inintelligible, je pourrais aider une soi-disante amie dans une matière qui m'est facile.

– C'est bon, c'est bon, la rassurai-je gauchement. Je t'aiderai à réviser Scarlett.

– Oh et au fait, tu peux juste m'appeler Scar.

J'appelai ma mère avec l'accord de l'agente administrative qui me prêta gentiment le téléphone, pour lui demander la permission d'aller directement chez Scarlette-Scar après l'école. Elle me rappela que nous avions préparé un dîner spécial d'anniversaire pour ma petite soeur, donc proposa plutôt que mon amie soit des nôtres pour la soirée. J'acceptai, culpabilisant de ne pas ressentir davantage de considération pour Iris, mais n'eus le temps que de placer un maigre « désolée » avant que ma mère raccrochât.

Scar était fébrile à l'idée de rencontrer ma soeur – elle rassura sa mère que nous allions étudier et non « perdre notre soirée pour des peccadilles », qu'une adulte serait présente à la maison avec nous, lui donna même le numéro de portable de ma mère que je lui tendis sur un bout de papier (malgré que je doutais fort que ma mère répondît même si c'était une urgence nationale).

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⏰ Last updated: Nov 03, 2023 ⏰

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