Chapitre XVI : La raison l'emporte toujours

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"Essaye de comprendre Mathilde, ça lui a fait un choc à ton oncle !" S'exclama ma mère en descendant péniblement de la voiture qui venait de nous redéposer à la maison. Il faut dire qu'il y a de quoi... Tout cela s'est passé si vite que je me remémore difficilement le contenu de cette soirée, tout ce qui me revient en mémoire ce sont les quelques mots de ma prof de maths avant qu'elle ne pose de son plein gré cette fois, ses lèvres rosées sur les miennes...
Je laissais ma mère s'éprendre en leçons de morale en tout genre, perdue dans un flot mirobolant de pensées en tout genre... Aller Mathilde, concentre toi !

... Un mois auparavant...

"Et si c'était possible...?" Murmura Isa avant de déposer délicatement ses douces lèvres sur les miennes. Mon cœur se souleva si soudainement que j'en fus déséquilibrée, me raccrochant par mégarde aux hanches de ma prof, ce qui n'eut pour conséquence que de rendre ce baiser encore plus irréel... Elle esquissa un léger sourire avant d'approfondir ce baiser auquel mes lèvres répondaient sans que je puisse les contrôler. J'avais comme l'impression de renaître, comme si pour la première fois depuis quinze jours j'avais enfin pu respirer à nouveau.

Cependant, un bruit de gobelet renversé retentit non loin de nous, coupant ce langoureux écrin amoureux en un seul instant. Je me tournais vers le bruit avant de découvrir mon oncle, stupéfait devant une pareille scène.
Et merde...

"Oncle Adam, attend !" M'écriai-je en essayant de rattraper l'homme qui s'éloignait dans le couloir, avec plaqué sur le visage un mélange de colère et de surprise...

"Laisse moi t'expliquer !" Insistai-je en arrivant à sa hauteur... Enfin, expliquer l'explicable, c'est à dire pas grand chose...
"C'est ma prof, 'fin mon amie mais on s'aime, je crois et c'est moi qui ai commencé mais elle voulait pas au début et puis je..." Crachai-je sans respirer. Adam me fixait perplexe mais ne dit pas un seul mot... Il resta interdit durant de longues, très longues minutes.

"Et ta mère est au courant ?" Demanda-t-il simplement, une fois assis sur une des chaises dans le hall de l'hôpital.
Je baissai les yeux vers mes pieds, honteuse de cette situation et fit non de la tête. Avant que je n'eu le temps d'ajouter quoi que ce soit, Isabella apparut dans l'immense hall, et à en juger par son expression faciale, elle non plus ne semblait pas très fière d'avoir été démasquée.

"Monsieur Cohen, je, je peux vous parler un instant ?" Déclara Isa d'une voix tremblante. Je ne l'avais jamais vue aussi embarrassée auparavant.

"Attends, je viens avec..." Commençai-je mais Isa m'arrêta net dans ma course en posant sa main sur mon épaule avant d'ajouter à demi-mots "fais moi confiance Mathilde". Je restais donc immobile en les voyant se diriger vers la sortie de l'hôpital...
Je ne pouvais plus contenir toutes mes émotions mélangées et m'effondrai en sanglots devant les regards étonnés des patients et médecins présents sur place.
J'étais tellement perdue, ne sachant absolument pas si Isa s'attendait à devoir assumer aussi rapidement, ni même si elle comptait assumer tout court. Je ne savais pas non plus comment Adam allait réagir, ni ce qu'en penserait ma mère une fois que son frère lui aura tout dit... Enfin ça c'est seulement si elle se réveille un jour...

Adam réapparu au bout de ce qui me semblait être une éternité. Je scrutais la moindre de ses expressions faciales dans l'espoir d'y lire ma sentence mais je ne pu rien en tirer... On a vu plus expressif que lui. Il prit calmement place à mes côtés. Je me sentais ridiculement petite à présent. Je n'osais entamer la discussion, ignorant ce qu'Isa avait bien pu lui dire... D'ailleurs je ne savais même pas où elle était passée, ce qui n'est pas très bon signe. Je cherchais discrètement du regard une silhouette féminine aux cheveux de feu mais je n'apercevais que des perruques grisonnantes à l'horizon.

"Je lui ai demandé de partir Mathilde..." Commença mon oncle lentement. Je sentais une énorme boule se former dans ma gorge au fur et à mesure que mon oncle parlait. Toutefois je parvins à aligner quelques mots sur un ton qui laissait paraître toute mon angoisse intérieure.
"Mais pourquoi ?"
"Parce qu'elle n'a rien à faire ici !" Répondit-il en me fixant froidement. Je crus m'évanouir... J'ignore combien de temps il lui avait fallu pour qu'elle se décide à franchir la limite qu'elle s'imposait, qu'elle vienne jusqu'ici pour me confesser ses sentiments et... Tout est gâché.
Mon cœur s'emballa, il tambourinait contre mon torse frêle qui déjà se tordait de douleur, pourtant je n'y prêtais même plus attention... Trop absorbée par mes dernières pensées : Tout est gâché...

La suite, je ne m'en souviens pas très bien, à vrai dire... Je crois que je suis morte à ce moment là, je sais que ma mère s'est réveillée peu de temps après, ça a été un soulagement pour tout le monde, c'est aussi la dernière fois où j'ai vu Adam, après il s'organisait pour rendre visite à ma mère quand je n'y étais pas. Et si je le croisais par hasard dans le hall de l'hôpital, il détournait le regard, mimant de ne pas me connaître.
Pour ce qui est d'Isa, je n'eu pas le courage de la confronter... Elle devait certainement se sentir humiliée et je n'avais pas envie de l'ennuyer davantage.

Seule la visite de Pélagie la veille de la sortie de ma mère vint redonner un peu de couleur à mes yeux, délavés par les larmes.

"Mathilde, il faut que tu m'expliques ce qu'il se passe... Tu ressembles à un cadavre comme ça... Parle moi !" S'inquiéta mon amie alors que je tappais mon poing contre le distributeur pour essayer en vain de débloquer ma barre chocolatée qui s'échoua à mes pieds après deux ou trois tentatives...
Au point où j'en étais, je me lançai dans un récit complet de tout cette histoire à mon amie, avec dans la voix les dernières larmes dont mes yeux rouges semblaient capables... Mon cœur lui, se brisait encore un peu plus à chaque fois que j'évoquais ma prof de maths, Pélagie, quant à elle, écoutait mon récit sans m'interrompre avec dans les yeux cette lueur qui me fit comprendre que tout n'était peut-être pas perdu...

Juste pour cette fois...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant