Coma - Piarles

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Pierre n'en pouvait plus. Il était encore dans la même salle, au même endroit, attendant la même chose.

Il connaissait la pièce sur le bout des doigts, aucun détail ne lui avait échappé. Il faut dire qu'il n'avait que ça à faire en attendant aussi.

Dès qu'il pouvait, il revenait ici. Il était connu dans tout le personnel, avait même tissé des liens de pré-amitié avec des médecins à force de venir voir Charles à l'hôpital.

Alors qu'il était toujours aussi sur la même chaise, avec la même main chaude dans la sienne, il contemplait le mur blanc en face de lui.

De toute manière tout était blanc ici. Rien n'égayait cette endroit alors que c'était déjà assez dur de s'y trouver.

Comme à chaque fois, il laissait son esprit divaguer et ses cauchemars le rattrapaient.

Alors, l'accident lui revenait en tête.

Grand prix de Monaco 2023.

Charles ne se sentait pas bien, il semblait qu'il était malade mais il voulait absolument courir. Rien ni personne n'aurait pu le faire changer d'avis. C'était son grand prix, et il pilotera.

Alors il était monté dans sa monoplace, et tout s'était bien déroulé au début. Il était P1, menant la course. Puis, son mal de tête le rattrapa, ses yeux étaient des plus en plus lourds, sa vue se brouillait. Ses mains avait un temps de réaction beaucoup trop long, son corps lâchait prise alors que son cerveau paniquait par instinct de survie.

Et puis, l'inévitable se produit.

Son bras lâcha, cependant sa main resta accrochée fermement au volant. Alors, le volant braqua à droite, et il se prit le mur à 300 km/h.

Il fit une tête à queue, bloquant tout les autres pilotes, et finit sur des tonneaux sur une vingtaine de mètres.

Lorsque les secours avaient réussi à extraire son corps du véhicule bien amoché, il ne répondait plus.

Et ce drame datait de 2 ans déjà.

2 ans que Pierre luttait pour ne pas sombrer.

Il s'était d'abord retiré de la course automobile dès que la fin de saison fut arrivée. Ensuite, il avait passé des mois et des mois à l'hôpital, aux côtés de Charles. Il arrivait dès que les visites commençaient et repartait après de nombreux rappel à l'heure de fermeture de celle ci.

Il s'en voulait dès qu'il n'était pas aux côtés de son ami. Il l'imaginait se réveiller seul, alors que lui était soit rentré dormir ou parti manger.

Puis, la dépression.

Le monégasque était le seul qui maintenait sa santé mentale ainsi que la Formule 1, et il n'avait plus aucun des deux. Il était devenu une coquille vide, sans raison de vivre. La seul raison qu'il ne soit pas passé à l'acte était le brun. Il ne pouvait pas le laisser seul, il voulait être là à son reveil.

Réveil qu'il attendait depuis 2 ans, 3 mois et 17 jours.

Les médecins tentaient de le rassurer, il a toutes les raisons de se réveiller, disaient-ils.

Et ils avaient sans doute raison, Charles était toujours vivant. Il respirait seul, même si au cas où il était sous assistance, sa main était toujours chaude, et le plus important: son cœur battait.

Alors que celui de Pierre était brisé.

Chaque putain de jour il regrettait de ne jamais avoir avouer ses sentiments à Charles.

Car maintenant il était peut-être trop tard.

Peut-être qu'il ne se réveillera jamais.

Il avait mal à sa poitrine. Ses cauchemars, ses peurs, ses aspects les plus sombres de sa vie l'envahissaient encore une fois.

Pierre avait si peur.

Si mal.

Il souffrait un peu plus chaque jour. L'absence de Charles lui était insupportable.

Ses parents, ses frères, ses proches, les autres pilotes avaient tout essayé pour l'aider. Mais rien n'y faisait. Il avait besoin du monegasque pour vivre.

Son cœur s'affolait dans sa poitrine. Mais il ne remarqua pas qu'il n'était pas le seul.

L'électrocardiogramme branché depuis 2 ans à son meilleur ami faisait un boucan pas possible. Les anciens bip légers, réguliers et surtout peu nombreux avaient disparu.

Maintenant, le bpm du brun augmentait, le bruit était plus présent, plus prononcé, plus cinglant.

Mais Pierre se fichait bien de ses oreilles qui sifflaient.

Ce qui lui importait c'était ces yeux émeraudes qui le hantaient depuis si longtemps s'ouvrir de nouveau, causant des larmes dans ses propres yeux.

Ses paupières papillonèrent, ses pupilles aveuglées par la lumière blanche, et ça y est. Pierre pleurait pour de bon.

Il n'en revenait pas. La main qu'il avait tant tenu tressaillait. Le visage si longtemps inexpressif qu'il avait tant fixé et détaillé prenait doucement vie.

Il avait l'impression de revivre, de respirer pour la première fois en deux ans.

_Oh mon Dieu Charles !!

Et il fonça dans ses bras, alors que le plus jeune se redressait doucement et tant bien que mal.

_Ça fait longtemps que j'attendais ce moment, dit doucement Charles d'une voix rocailleuse.

_J'attends ton réveil depuis si longtemps, j'ai eu si peur de te perdre. Ne fais plus jamais ça, je t'aime.

_Moi aussi je t'aime. Ça fait plaisir de pouvoir bouger et parler, ça fait déjà pas mal de temps que je suis réveillé mais pas mon corps.

Sa diction est telle qu'on dirait qu'il vient seulement d'emergé d'une longue sieste.

Ils se séparèrent après une longue étreinte, jusqu'à ce que Charles remarque un détail.

_C'est pas mon pull ça ?

Il désignait le sweat rouge Ferrari que le blond ne quittait quasi jamais. C'était celui que le brun portait tout le temps lui aussi quand il roulait encore.

L'interessé, baissa la tête, gêné.

_Oui, ton odeur me manquait.

Malgré ses mouvements encore durs et laborieux, le monégasque attrapa avec deux doigts le menton de son ami pour le forcer à le regarder.

_Moi c'est toi qui m'a manqué

Et leurs lèvres se scellèrent, le vide qui rongeait Pierre depuis maintenant deux ans se comblant enfin.

OS | Formule 1Where stories live. Discover now