Satan est une femme

16. Femme de tête

18 décembre (j-2)

Mettons quelque chose au clair tout de suite :

Non.

Je ne compte pas coucher avec lui. Et ce pour plusieurs raisons :

1. Ce n'est jamais une bonne idée de coucher avec son ex.

2. Ce serait moralement condamnable de faire ça en sachant ce qu'il m'a fait. Ce serait mal.

3. J'ai fait la promesse à Chanel de ne pas retomber dans ses bras.

4. Aaron est encore en attente de ma confirmation quant au statut de notre relation. Batifoler serait parfaitement injuste envers lui et il ne mérite pas ça. D'ailleurs il va falloir que je trouve le temps de répondre à ses message.

5. Je ne veux pas non plus qu'Hugo révèle la raison de notre séparation, certainement pas à cause d'un stupide pari.

Non.

Pour être franche, le défi qu'ils se sont lancé entre hommes dans leur élan de masculinité toxique ne m'intéresse aucunement. Ce qui m'intéresse moi, c'est le sous-entendu défi qu'Hugo m'a lancé à moi en affirmant qu'il me résisterait. Que le faire craquer en neuf jours m'était impossible.

Je ne tiens pas à ce qu'il perde aux yeux de Darryl et des autres, je tiens à ce qu'il perde pour faire mal à son égo surdimensionné. Cet égo qui fait qu'il se croit le droit de parier sur moi. Donc je ne vais pas vraiment coucher avec lui, juste le pousser à bout, lui rendre la tâche impossible pour que quand il aura craqué, quand il sera à genoux, me suppliant de me prendre, je le rejette pour lui expliquer que je sais pour le pari et qu'il peut aller se faire voir. Que personne ne me résiste, que rien ne m'est impossible.

Et qu'il a perdu.

Ça, c'est la meilleure partie.

Le simple fait d'imaginer sa tête quand je refuserai au dernier instant pour mettre à nu leur petit complot contre moi m'émoustille. Il se sentira encore plus coupable, mais cette fois il l'a cherché ; on ne parie pas sur moi et encore moins sans m'informer du jeu.

Car pour faire jeu égal, il faut être deux à jouer. Et moi aussi, je suis joueuse.

Tu ne chercherais pas un peu une excuse pour te rapprocher de lui sans te sentir toi coupable ?

Quoi ?! Non, du tout.

Hmmm, si tu le dis...

— Ariès, il y a de coquilles dans les œufs.

Je reviens à la réalité pour regarder Darryl qui découpe des fruits en face de moi. Mon regard descend sur le bol d'œufs que je suis en train de casser pour voir les morceaux de coquille tombés dedans.

Je souris timidement avant de les ramasser.

Il est 7h du matin. Lui et moi nous sommes réveillés aux alentours de 5h, moi parce que je ne dors pas beaucoup et lui parce qu'étant notre hôte, il doit s'assurer de notre réveil le plus agréable. Il est allé cherché du bois pour que la maison soit chaude au réveil des autres, a fait le ménage des canettes et verre vides de la soirée d'hier, a déneigé l'accès à la cour arrière et un peu l'avant et maintenant il fait à déjeuner pour tous. Je me suis jointe à lui.

J'aime le voir aussi proactif, prendre des initiatives, prendre soin de ses invités. Ça lui donne un côté séduisant.

— Quoi ? dit-il en riant. Pourquoi tu me regardes comme ça ?

— T'es sexy.

Il sourit.

— Je sais.

Je ris en levant les yeux en l'air. Quand les deux douzaines d'œufs sont tous cassés, je les fais brouiller. Des pas à l'étage nous indiquent que la maisonnée commence à se réveiller.