13 | Célébration poétique - deuxième partie

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— Aries, le saluai-je en me frottant les yeux.

Relevant la tête, il m'adressa un bref sourire, et il fallut moins d'une demi-seconde pour que ce geste le déséquilibre et qu'il trébuche, se retrouvant étalé de tout son long sur le sol sans avoir résolu son problème. Je lui tendis ma main pour l'aider à se relever, retenant un ricanement amusé.

— Cassiopée. Merci.

Ses joues avaient rosi, et ses traits se tordirent dans une espèce de grimace qui traduisait ouvertement sa gêne.

— Une demi-dizaine de générations avant nous a survécu dans des bunkers ou sous terre pour tenter de perpétrer l'espèce humaine, et moi je ne suis même pas foutu d'enfiler une paire de chaussures sans tomber par terre. C'est malin, tiens. Mais passons, continua-t-il en laissant échapper un rire. Tu avais quelque chose à me dire ?

— Oui, c'est simplement... est-ce que je pourrais t'accompagner à la chasse ? Il s'agit quand même de fournir de la viande à une quarantaine de personnes, et j'aimerais bien recommencer. C'était sympa, la première fois.

Aries hocha la tête et passa une main dans ses cheveux blancs.

— Tu sais, j'achète aussi de la viande – et de la nourriture de manière générale, bien évidemment, l'espèce humaine n'est pas carnivore – au marché avec d'autres membres qui continuent à vivre au-dehors, et l... ma mère m'en donne aussi, de ses réserves, pour son bar. Je ne prétends pas nourrir toute la Guilde avec les maigres réserves que je rapporte de mes parties de chasse. Mais... un grand merci de ta proposition, Cassiopée : une paire de bras supplémentaire ne sera pas de refus !

Je le remerciai, amusée par les routes alambiquées qu'il empruntait pour m'expliquer tout ça avant d'arriver à sa conclusion. Être dans sa tête ne devait pas toujours être de tout repos. Tout devait toujours tourner à mille à l'heure, et penser de cette manière, sans jamais s'arrêter, ne devait clairement pas être de tout repos.

— Je dois aller chercher une de mes vestes, dans ce cas. Il fait toujours plus frais dans la forêt. Oh, et d'ailleurs, dis-je d'une voix basse en me retournant vers lui, pendant que j'y vais, tu devrais chercher Élios. Je l'ai croisé et il te cherche. Il a quelque chose à te dire, je crois.

Je pris soin de passer la raison donnée sous silence. Je ne tenais pas à créer une dispute supplémentaire entre ces deux énergumènes. Aries hocha la tête à mon adresse, les mains dans les poches, comme pour se donner une contenance, et je lui adressai un sourire encourageant avant de foncer vers mon dortoir pour aller chercher ma veste kaki. Je nageais un peu dans le jogging que j'avais enfilé en me levant, aussi resserrai-je le nœud qui faisait office de ceinture jusqu'à sentir mon souffle se couper. J'étais à cran.

— Alors, prête à aller crapahuter dans la forêt ? me lança mon ami lorsque je revins dans le hall de l'immeuble, enfin préparée.

— Prête, acquiesçai-je succinctement. Ça va, avec Élios ?

— Oui, oui.

Aries avait répondu bien trop vite, et son regard d'ordinaire si brillant avait fui le mien. Il ne souhaitait sans doute pas en parler, et je me questionnai sur l'histoire commune des deux garçons en passant le pas de la porte. Je secouai la tête. Cela ne me regardait clairement pas.

Je marchai sur plusieurs centaines de mètres, ma veste dans les bras, sentant le soleil taper violemment sur ma nuque. Le printemps s'installait doucement, et la canicule allait avec, bien évidemment. Je transpirai et, alors que nous nous engagions dans le petit quartier de Gladius que nous devions traverser pour nous rendre dans la forêt, je m'arrêtai pour reprendre mon souffle. J'avais la gorge sèche, et je demandai pardon à Aries pour cette interruption. Lui devait avoir l'habitude de faire des efforts sous cette chaleur : il avait connu cette ville dès son plus jeune âge et avait dû faire très tôt des efforts pour faire subsister la seule famille qu'il avait ici.

La course des étoilesWhere stories live. Discover now