Chapitre 34

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Yassen bondit sur ses pieds pour l'éviter. C'était quoi ces images ?

— Ça va ? Tu fais une drôle de tête.

Ce flash était déconcertant. C'est impossible que cela se soit passé ainsi, ce doit être sa mémoire qui lui joue des tours. Ils ont trop bu hier, cela peut expliquer cette hallucination.

Hakim voit très bien que Yassen lutte contre une évidence, il devine déjà laquelle, ça le blesse un tout petit peu.

— Tu as vu un autre flash ?

— Hein, euh, non... Pas du tout.

Malgré sa réponse, il met une distance visible entre eux, Hakim avance d'un pas pour la faire disparaitre, ce qui braque son interlocuteur, et lui par la même occasion. Voir le malaise défiler dans les prunelles du plus jeune le met hors de lui. Il n'est pas censé ressentir de l'aversion en sa présence.

Non.

— Dis-moi précisément ce que tu penses savoir.

— Ne retourne pas la question, s'énerve Yassen. Comment tu voudrais que je le sache ? C'est pour cela que je suis ici !

Le plus grand soupire et s'éloigne enfin, Yassen peut à nouveau respirer normalement. Il n'a pas peur de lui, mais en cet instant, il a l'impression que c'est le mieux à faire. Hakim est devenu de plus en plus bizarre ces dernières années, et bien qu'il l'ait remarqué, il refuse de laisser cela altérer la confiance qu'il lui accorde. C'est pour cela que malgré tous les avertissements de Jonathan, il peine à couper les ponts avec son aîné.

— Je te préviens que la vérité va changer beaucoup de choses à l'avenir.

— Quelles choses ? Tu me fais peur.

— Pourtant ça ne t'arrête pas.

Il se relève et jette un œil de l'autre côté de la route, où Félix attend à l'ombre. Ce dernier a le regard braqué sur eux et ne tente même pas de viser ailleurs. S'il y a bien une personne qu'il apprécie presqu'autant que lui-même, c'est bien ce gars. Toujours prêt à secourir Yassen en cas de danger.

Attendez... Ça veut dire que Yassen l'a emmené parce qu'il se sent en danger avec lui ?

Sérieux ?

Cette pensée ajoute de l'eau dans l'huile brûlante. Il décide de changer les règles du jeu.

— Je veux bien t'en parler, mais ce n'est pas le lieu approprié pour ça. Il faut que tu passes à la maison ce soir.

— Attend, quoi ?

— C'est ma seule et unique condition. Tu auras besoin d'être bien assis pour entendre ce que je vais te dire, et tu ne pourras t'en prendre qu'à toi-même si jamais ça te choque. Je dois retourner bosser, maintenant.

Ainsi ils pourront enfin avoir ce moment à deux qu'il a toujours espéré. Sans alcools, sans stupéfiants, juste entre eux.

Choqué, une autre facette de Yassen prend le dessus. Il rigole.

— Non, mais tu te prends pour B2O ou quoi ? Tu me fais dahak, quoi. Azy, tu fais trop le fou ! réplique-t-il avec son accent de la rue. Arrête de crari et dis-moi tout. J'ai un programme chargé tout à l'heure, j'ai des courses à faire, donc deuspi, s'il-te-plaît.

D'abord étonné, Hakim se détend enfin. Yassen ne parle pas souvent de cette façon, parce que sa mère le lui interdit catégoriquement. N'en déplaise à sa famille, l'adolescent grandi avec les autres «pelos» de la tèce, il connaît comment ça marche dans la rue.

— Je ne te suivrai pas sur ce terrain, Yassen. C'est toi même qui me dit tout le temps que je devrais travailler sur mon vocabulaire.

Sur ce, il caresse sa joue tendrement et ramasse son torchon.

Feutre vertOù les histoires vivent. Découvrez maintenant