Chapitre 10 : Réconciliation

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Un silence de mort s'installe dans la salle, chacun ayant arrêté son activité pour dévisager le nouveau venu. Dust paraît dans un premier temps en colère d'avoir été amené ici, mais finalement la gêne prend le dessus et son malaise habituel face aux inconnus refait surface. La tête basse, il rejoint l'atelier des nœuds en prenant bien soin de ne pas me regarder, ses pas traînants résonnant dans la pièce silencieuse. Puis Pyrite se retourne brusquement et plante sa hache dans le torse d'un mannequin, détournant l'attention de Dust et relançant les activités.

Je reste un instant à observer le jeune mineur nouer quelques cordes sans vraiment faire attention, le cou rentré dans les épaules. Malgré son manque de concentration évidant, il s'en sort assez bien, ses longs doigts s'agitant rapidement pour plier, tordre et serrer, à tel point que l'instructeur vient rapidement lui conseiller d'autres formes et techniques de nouage.

Après avoir encore réalisé quelques classements de plantes, je laisse l'atelier pour me diriger vers celui du bivouac, où j'apprends à dresser une tente, même si je ne pense pas que j'aurai la chance d'en avoir une dans l'arène. Je découvre également comment allumer un feu avec des allumettes, ou avec des silex - ce qui se révèle bien plus compliqué que prévu - et comment l'utiliser pour cuire des aliments. Je termine ensuite la matinée par un apprentissage sur le dépeçage les animaux, avec des essais réels qui auraient presque pu me convertir au végétarisme.

*

A 13h, tous les tributs sont conduits dans une salle adjacente au gymnase, où l'on peut se remplir des plateaux avant de s'assoir sur une des nombreuses tables disponibles, prévues pour bien plus de vingt-quatre personnes.

De nouveau, les Carrières restent en groupe, formant comme une meute bruyante et sauvage dont il vaudrait mieux éviter de s'approcher. A part les deux du Sept, tous les autres tributs s'éloignent les uns des autres, restant seuls en bout de table en face de leur assiette souvent bien garnie.

Après avoir rempli la mienne de pommes de terre et de haricots - impossible de prendre de la viande pour le moment -, je remarque Dust attablé dans le fond. J'hésite un instant, puis décide finalement de le rejoindre et de m'assoir en face de lui.

_ Alors cette première matinée, qu'est-ce que tu en as pensé ? je demande en attaquant mon déjeuner, comme si nous étions de vieux amis et pas des adversaires dans un jeu mortel.

La tête toujours baissée, mon partenaire de district ne répond pas tout de suite. Il se contente de piocher nerveusement quelques boulettes de porc dans son assiette, manifestant un manque d'appétit aussi inhabituel qu'inquiétant. Après presque une minute d'un silence assez lourd, il finit par grommeler :

_ Arrête, Ariona. Arrête de faire comme si rien ne s'était passé, comme si la situation était totalement banale. C'est suffisamment compliqué comme ça sans que tu viennes remuer le couteau dans la plaie.

_ Je n'ai jamais prétendu que les événements étaient normaux ou quoi que ce soit, je remarque. Je t'ai juste demandé comment s'était passée ta matinée. D'ailleurs, pourquoi es-tu arrivé en retard ? Tu n'étais toujours pas sorti de ta chambre quand je suis descendue.

_ J'ai pas vu l'heure tourner et j'ai dormi trop longtemps, c'est tout. Avec tout ce qui s'est passé hier tu vois... C'est pour ça que les Pacificateurs sont venus me chercher.

Le mensonge est tellement évidant que je ne peux pas m'empêcher de le relever.

_ Pourtant, j'ai vu un Muet t'apporter ton petit-déjeuner vers 9h 30 donc tu étais déjà réveillé à ce moment-là.

_ Eh bien je me suis rendormi, voilà, s'emporte-t-il en redressant enfin la tête. Qu'est-ce que tu cherches à prouver à la fin ? Pourquoi tu peux pas juste me laisser tranquille ?

Ariona Maltais - les 73e Hunger GamesWhere stories live. Discover now