Chapitre 53 : Insomnie ✔️

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Je n'ai pas fermé l'œil de la nuit.

Je ne le pouvais pas.

Pas après ce que j'ai vu, c'était tout simplement impossible.

Mon cerveau tournait à cent à l'heure, construisait toutes les hypothèses possibles et m'énervait donc au plus haut point.

Son visage envahissait chacune de mes pensées, des souvenirs que je ne voulais qu'ignorer resurgissaient.

J'ai failli me laisser aller bon nombre de fois, mais je n'ai pas flanché.

Pas une seule larme n'est parvenue à franchir les remparts que je me suis construite.

Mes genoux sont encerclés de mes bras, mon menton posé contre eux, mon regard perdu dans le vide.

J'ai passé la nuit dans cette posture, comme figée.

La couverture de laine a de nouveau glissé de mon corps, mais je n'ai pas tenté de la replacer, malgré le froid qui assaillait ma chair meurtrie.

Je n'en avais ni la force, ni l'envie.

Des bruits provenant de l'escalier se font entendre, mais je ne daigne pas me tourner vers eux.

Je conserve ma position, regardant le foyer éteint droit devant moi, le même que je fixe depuis maintenant des heures.

D'autant plus que je reconnais à qui cette démarche appartient et que je n'ai aucune envie de le voir.

Pas aujourd'hui, ni maintenant et encore moins après ma nuit d'insomnie.

Je suis d'une humeur massacrante.

Les pas s'arrêtent soudainement aux pieds des marches et je sais aussitôt que ma présence vient d'être remarquée.

Dommage, j'aurais bien aimé avoir encore quelques minutes de silence et de paix supplémentaire.

Mais il faut croire que même ça, c'est trop demandé.

Ils se remettent en marche après quelques secondes pour se diriger vers la cuisine, me snobant complètement.

Tant mieux.

À peine ai-je pensé ces mots qu'ils reviennent par ici.

Je soupire et appuie mon front contre mes genoux, espérant que je ne sois pas la raison de ce changement.

Je peux le sentir s'arrêter devant le fauteuil sur lequel je suis assise, mais je ne relève pas la tête pour autant.

Je ne lui ferai pas ce plaisir.

Qu'est-ce que tu fais là ? Tu devrais être dans ta chambre à te reposer, lance soudainement sa voix grave, celle-ci se répercutant contre les murs à moitié vides.

Je ne rétorque rien, le laissant avec mon silence comme seule réponse.

Je peux sentir que ça l'irrite et cela ne fait donc que me rendre satisfaction.

Tu vas poiroter encore un peu, monsieur tout puissant.

Est-ce que tu as passé toute la nuit ici ?

Je demeure muette, ne croyant pas qu'il mérite la moindre explication.

Pas encore.

Nous demeurons ainsi pendant de longues secondes, chacune amplifiant son agacement.

Comptes-tu me répondre un jour ? demande-t-il avec mécontentement.

Je redresse ma tête de façon à le regarder et lui lance un petit sourire narquois.

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