Chapitre 33

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Lana Parker

Je passe l’entrée principale du pensionnat, grande ouverte comme chaque fois qu’il fait beau, c’est à dire jamais, et m’interrompt brusquement alors que je traversais le hall pour regagner mon dortoir. Adam est là. Ça fait trois jours que les congés de Février ont débuté, trois jours que je l’ai fait descendre du toît, et trois jours qu’il m’évite. J’ai réussi à lui parler une seule fois, c’est même lui qui m’a abordé pour me proposer qu’on révise ensemble, j’ai acceptée, mais après ça, plus rien. 

Sans hésiter une seconde, j’avance vers lui. 

— Salut. 

Il ne me regarde même pas. Simon, dont je réalise seulement la présence à ses côtés, croise les bras d’un air réprobateur. C’est étrange, je ne l’avais pas reconnu de loin. 

— Tu tombe bien toi, Adam était justement en train de me parler d’une vidéo que tu as faite de Luke et moi… 

Et qu’il m’avait ordonné de ne montrer à personne. Je me mord la lèvre sans savoir quoi dire. Adam parle à ma place :

— C’est bon, j’en parlerais pas à la directrice si tu veux pas, mais je trouve ça… 

— Stupide ? l’interrompt Simon. C’est juste parce que tu comprends rien !

— Non, je trouve ça dommage. Dommage que Luke ne soit pas sanctionné. 

Simon soupire. À peu près tout le monde au pensionnat est exaspéré par la naïveté d’Adam, ça ne m'étonne pas qu’il en fasse partie, mais ça m’étonne qu’il le montre à ce point. Il finit tout de même par reprendre d’un ton moins tranchant :

— C’est gentil de t’en préoccuper, mais dans la vidéo on m’entend clairement parler du devoir que j’étais censé faire pour Luke, si ta mère entend ça, ça va juste me retomber dessus. 

Je me retiens d’intervenir pour ajouter que Luke ne paierait jamais de toute façon, je l’ai déjà dit, et Adam a affirmé qu’il réfléchirait à tout ça. C’est inutile d’insister. Tout ce que j’aimerais pour l’instant, c’est qu’il arrête de m’éviter. J’essaye d’accrocher son regard. 

— Est-ce qu’on pourrait parler ? 

Il fait non de la tête. 

— Pas maintenant désolé, j’ai des choses à faire. 

— Mais… 

Je suis obligé de ravaler ma réplique, il s’en va déjà. 

— Moi par contre j’aimerais bien te parler, intervient Simon. 

— Mais je t’en prie, ça me consolera de ce vent magistral. 

Je revois la même scène en boucle depuis trois jours. Des flashbacks qui ne s'arrêtent que lorsque Adam est sous mes yeux, quand je peux constater moi-même qu’il est bien là, que le pire a bien été évité. C’est pour ça que je supporte mal qu’il fasse tout pour m’éviter, je voudrais le voir plus, pouvoir m’assurer en permanence qu’il n’est plus sur le point de faire une chute mortelle… 

Mais je ne devrais pas être aussi amer juste parce-qu’il refuse de me parler, c’est ridicule, complètement futile. S’il préfère m’éviter, je devrais même m'arranger pour lui faciliter la tâche au lieu de lui courir après, et tant pis pour les flashbacks. Ce n’est pas moi qui suis à plaindre dans l'histoire, c’est lui qui allait mal au point de se retrouver au bord du toît.

Simon se racle la gorge à côté de moi. 

— Il faut que tu m'écoutes si tu veux que je te console de ton vent… 

Le pensionnat KeppelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant