Chapitre 31

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Louis avait glissé ses doigts entre ceux de Jules qui s'était empressé de les serrer fermement, avant que Louis ne change d'avis et tente de s'échapper si l'envie lui prenait. Il l'avait traîné à sa suite, jusqu'au box de Saol, s'emparant du filet accroché à la porte sur leur passage. Saol harnaché, Jules l'avait guidé jusqu'à la sortie des écuries.

— Viens.

Louis s'approcha à pas mesurés. Une fois à hauteur de Jules, ce dernier plongea de nouveau son regard dans celui du plus jeune. Ses doigts vinrent effleurer ses lèvres pour que Louis cesse de les mordiller. Puis Jules se pencha, pour faire la courte échelle à Louis.

— Et la selle ? s'exclama ce dernier.

— Fais-moi confiance.

Louis se laissa faire. Une main posée sur le garrot, l'autre sur le dos de Saol, il laissa Jules le hisser. Il prit place, les doigts placés dans la crinière. A son tour, Jules grimpa sur le dos de l'équidé. Ses jambes glissèrent le long de celles de Louis, son torse se moula contre le dos du plus jeune et, tous les deux, eurent un souffle de satisfaction. Ce contact leur avait manqué. Puis Jules intima à Saol d'avancer.

Aucun mot ne fut prononcé le temps du trajet. La présence de Jules avait maintenu Louis dans une position parfaite, même lorsque les foulées de Saol s'étaient accélérées. L'étalon avait ensuite ralenti, reconnaissant les lieux qui se profilaient face à eux.

Jules se laissa glisser le long des flancs de Saol, puis l'attacha à l'arbre habituel. A son tour, Louis descendit. Déchargé de son poids, le cheval se mit à brouter l'herbe séchée par la chaleur. Jules s'empara de la main de Louis et se mit à marcher.

Louis aurait pu s'étonner de la direction qu'ils prenaient. Néanmoins, il savait qu'Hélène, la mère de famille, était décédée des années plus tôt. Alors c'est sans résistance qu'il suivit Jules et franchit les grilles du cimetière.

Les gravillons grinçaient sous leurs pieds, alors qu'ils avançaient en silence. Jules le guidait au milieu de ses allées qu'il connaissait par cœur. Leur course se stoppa face au caveau familial et son regard se posa sur la stèle.

« Hélène GUERIN

12 mars 1966 - 20 juillet 2003

A notre mère et épouse bien-aimée »

Jules posa l'une des roses qu'il avait achetées en chemin sur la tombe. La couleur blanche de la fleur contrastait sur le gris de la pierre. Une seconde rose entre les doigts, il fit deux petits pas pour se trouver face à une seconde plaque. Et le souffle de Louis se coupa lorsqu'il lut l'inscription.

« Jade GUERIN

23 octobre 1994 - 20 juillet 2003

A notre sœur adorée »

Jules déposa la seconde rose. Lorsqu'il se redressa, Louis ne manqua rien de ses yeux brillants. Il s'approcha, puis emmêla ses doigts à ceux de Jules. Le silence perdura quelques secondes avant que Jules ne se lance, comme Louis l'avait fait des jours plus tôt.

— Arthur avait tout juste trois ans quand elles sont décédées. Il n'a aucun souvenir d'elles en dehors de ceux que nous, on lui a raconté. Mélanie en avait onze et moi quatorze.

Parler d'elles faisait remonter les souvenirs. Il revoyait le sourire bienveillant de sa mère, ses yeux pétiller de fierté. Tout comme il entendait encore le rire joyeux de Jade. Les années avaient beau s'écouler, il n'avait rien oublié de ce qu'elles étaient.

L'engrenage des champs | BxBWhere stories live. Discover now