Épisode 8 - « Dirty Cash » - Partie 2

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Après la réunion, Mathis décide de prévenir Laura. Il la retrouve au même endroit qu'à son arrivée au lycée. Il est impatient de lui annoncer la nouvelle et il se demande comment elle va réagir. Quand il commence ses explications, le visage de Laura s'illumine peu à peu. Elle est touchée par sa proposition et lui répond qu'elle est d'accord.

— Tu veux que je te donne combien ?

— On ne veut pas d'argent, Laura. On fait ça de bon cœur...

— Alors, qu'est-ce que tu veux en échange ? C'est impossible que tu fasses ça gratuitement ! Quel est ton intérêt là-dedans ?

— Mais, j'ai aucun intérêt, en fait. Je fais ça parce que ça me rend dingue de savoir que des élèves ne profitent pas des meilleures années de nos vies. Je sais qu'on ne peut pas s'entendre avec tout le monde, mais on devrait au moins se tolérer pour que chacun vive comme il l'entend.

Sur ces paroles positives, Mathis explique qu'il va désormais être son ombre et qu'il va bien expliquer à tout le monde que les rumeurs à son sujet sont fausses. Il prend sa mission au sérieux et la commence immédiatement en présentant Laura à certaines filles de son groupe. Quand Mathis voit que Laura est à l'aise, il s'en va et lui dit qu'il sera là à la pause de 15h. Mathis prend sa mission à cœur et adore jouer le garde du corps. Il sait qu'il fait quelque chose de bien, il sait que son rôle peut aider et faire bouger certaines mentalités. Utopique ? Mathis en a conscience, mais il aura au moins le mérite d'avoir essayé.

*

De mon côté, je n'arrive pas à chasser les doutes de ma tête. Je m'installe à côté de Romy pour savoir si elle sait quelque chose.

— Je t'arrête tout de suite Sherlock, je ne mélange pas ma vie personnelle et professionnelle.

— Allez, s'il te plaît, Romy. Elle t'a parlé Clémence ?

— Elle ne m'a rien dit, mais si j'étais toi, je passerais aux toilettes me rafraîchir un peu.

Je ne comprends pas son allusion et je pars en boudant. Après tout, elle a raison, me passer un coup d'eau sur le visage me fera le plus grand bien. Je dévale les escaliers quatre à quatre et me précipite dans les toilettes. Je suis surprise d'y trouver Clémence qui rougit immédiatement en me voyant. Elle ne me dit rien et continue de textoter sur son téléphone. Je ne peux plus et j'explose :

— Franchement, Clem, t'abuses ! On est amies depuis le ventre de nos mères et en quelques semaines, tu me rayes de ta vie sans me donner aucune explication ? Je mérite ça ?

— Putain, mais Eli, t'es chiante. Je suis juste fatiguée par les cours et je commence à en avoir marre que tu m'oppresses avec tes questions.

Furieuse, je sors des toilettes et tombe nez à nez avec mon petit frère.

— Qu'est-ce que tu fous là toi ? dis-je à Milo.

— J'ai plus le droit d'aller pisser maintenant ?

Je m'en vais et plante également mon frère.

*

Milo retrouve Clémence et elle lui explique que leur cachette est désormais condamnée. Clémence craque et s'effondre dans les bras de Milo.

— Je n'en peux plus il faut qu'on lui dise...

— On va lui dire, c'est promis.

*

Assise à mon spot habituel, je suis encore énervée par ce qu'il s'est passé avec Clémence. Je ne comprends pas et je n'aime pas être dans l'incompréhension comme cela. Ruminant les évènements du passé, je ne vois pas Noémie arriver vers moi.

— Je peux m'assoir ? me fait-elle.

Je tapote la table bétonnée et lui indique de se mettre à côté de moi. Noémie me dit qu'elle a bien reçu mes nombreux messages, mais qu'elle préférait me parler de vive voix.

— Je t'écoute, dis-je.

Je la regarde dans les yeux et finalement, les mots deviennent surfaits. Dans une scène au ralenti, Noémie me regarde et m'embrasse. Un baiser rapide, furtif mais si puissant que j'ai l'impression de décoller de la table. Je sens mon cœur battre bruyamment dans ma poitrine et j'aimerais que le temps s'arrête. Pour la première fois depuis des semaines, je me sens bien et à la bonne place. Pendant quelques secondes, j'oublie tout. J'oublie les problèmes familiaux, ceux avec Clémence, j'oublie les cours, l'entreprise. J'oublie tout. Noémie se lève, les joues légèrement rosies et me demande de l'attendre après les cours. J'acquiesce, et je cherche à rester sur mon nuage le plus longtemps possible. Je ne comprends pas ce qu'il vient de se passer, mais cette sensation dans mon cœur est tellement agréable et me provoque un sentiment d'apaisement. Elle aussi ressent la même chose que moi et ce baiser vient de m'en donner la confirmation. Cette sensation de douceur est vite balayée par les cris qui surviennent dans la cour du lycée. Un rassemblement a lieu autour de deux élèves et je vois très vite que Mathis est sur le point de se battre avec l'un de ses coéquipiers. Tous les élèves attisent la bagarre et n'attendent qu'une chose : celui qui mettra le premier coup. Je m'approche peu à peu et me demande si je dois intervenir. Avant que je ne me décide, Mathis tend son poing vers l'avant et vise son coéquipier en pleine tête. Ni une ni deux, je pousse Mathis, et je sens la présence de Simon et Romy à mes côtés pour m'aider.

— Qu'est-ce qui te prend, mec ? demande Simon. Ça ne va pas ou quoi ?

Mathis est hors de contrôle. Nous essayons tant bien que mal de calmer sa colère. Romy lui met une tape sur la tête et lui dit d'arrêter de se comporter comme un animal. Je ne suis pas sûre que la méthode soit la bonne, mais Romy est tellement convaincante que Mathis retrouve peu à peu une respiration normale.

— Explique-nous.

— C'est lui qui a lancé les rumeurs sur Laura, la fille des absences. J'ai voulu discuter avec lui et il a continué de l'insulter. Je n'ai pas pu me retenir.

— Putain, mais mec, on rigolait quand on a dit que ta méthode de taper les harceleurs était la bonne. C'est toi qui vas avoir des problèmes après, pas eux.

Nous n'avons pas le temps de terminer cette discussion. Les surveillants et Myriam arrivent à notre hauteur. Nous expliquons la situation, mais ils ne veulent rien entendre. Mathis est convoqué dans le bureau de Myriam et nous l'observons partir, la tête baissée et le regard amer.

Nous regagnons notre salle de classe et j'envoie un message à l'ensemble du groupe : une réunion exceptionnelle doit se tenir ce soir après les cours. Tout le monde répond par un pouce en l'air et Mathis nous explique qu'il écope de deux heures de colle et que la prochaine bagarre sera sanctionnée d'un conseil disciplinaire. Je suis soulagée par cette sanction plus que légère et soulagée que l'entreprise soit saine et sauve. Pourtant, ce soulagement est de courte durée. La réunion de ce soir risque de mettre en péril toutes nos certitudes.

*

Comme prévu à la fin des cours, je réunis le Squad en permanence. Il se fait tard et le lycée se désemplit à vue d'œil. Face à eux, j'adopte une attitude calme tout en étant angoissée à l'intérieur.

— Bon, je crois que l'on risque d'avoir un léger problème...

Tous me regardent avec attention. Pendus à mes lèvres, ils attendent la sentence.

— Dans quelques jours a lieu le conseil declasse. Et vu notre manque de discrétion... Je crois qu'il va falloir se faire unpetit peu oublier. On traîne tous des casseroles et je pense qu'on ne va pas yéchapper lors du conseil... Je compte sur vous pour être discret et surtout,aucune prise de risque avant le jour du conseil. D'accord ?

Mon€yWhere stories live. Discover now