Chapitre 6

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  Quand j'étais petit, je dessinais beaucoup. Des soleils, en particulier. Ma mère me disait que c'était le symbole de mon père ce que, à l'époque, je ne comprenais pas puisque je ne savais pas encore qui était mon père.

Mais je ne dessinais pas que des soleils. Je dessinais aussi des stéthoscopes, ma maman, des pansements, des sirops pour la toux et moi. Oui, je me dessinais, on reconnaît bien là le narcissisme de mon père!

Bref, je me dessinais, mais pas que moi. La plupart du temps, j'étais au côté d'un garçon aux cheveux noirs, la peau pâle, les yeux sombres et portant un tee-shirt noir et un blouson d'aviateur (enfin, je crois que c'était censé être un blouson d'aviateur). La première fois que ma mère vit mes dessins, elle me demanda: « Oh, mon petit Willychou! C'est un de tes amis, ce petit garçon? ». Je répondais que non. Je ne le connaissais pas. Après quelques instants de réflexion, elle s'exclama: « Eh bien, dans ce cas, c'est sûrement le pouvoir de prophétie de ton père qui se manifeste! Tu verras, un jour, tu rencontreras un jeune homme qui ressemblera à ça et tu diras: « Elle avait raison, ma vieille maman! » ».

Ben oui, elle avait raison, ma vieille maman. Ce garçon jusque ici imaginaire est le portrait craché de Nico.

- Eh, Docteur! me helle Nico en chuchotant.

- Hmm, grogne Allie qui dort dans le lit voisin.

Nico lui murmure quelques mots à l'oreille et Allie se met à gigoter en marmonnant des insultes contre Tintin et Milou.

Nico se marre et je m'approche:

- Death boy, arrête d'embêter Allie, je chuchote.

- M'appelle pas Death boy.

- Tu m'appelles bien Docteur.

- Tu peux continuer, alors, abdique-t-il.

- Tant mieux. Bref, pourquoi tu m'as appelé? Il fait nuit, Nico!

- J'arrive pas à dormir.

- Tu veux des somnifères?

- Non.

- Un autre coussin?

- Non.

- La clim?

- Non.

- Mais tu veux dormir?

- Non.

- T'es insupportable.

- Merci.

Je soupire. Je voudrais rester mais je dois aller dormir au bungalow 7.

- Allez, salut, je lance.

- Non.

- Quoi non?

- Reste.

- Pourquoi?

- Hmm... Parce que?

Je fais semblant d'être agacé mais je préfère rester avec Nico qu'aller dormir dans mon bungalow.

- Ok, je cède en tirant une chaise pour m'asseoir près de lui.

Un silence gênant s'installe entre nous. Finalement, Nico lâche en regardant le plafond:

- J'ai rencontré ton père, un jour.

- Ah bon?

- Oui. Tu vois qui c'est Thalia Grace? Bah quand elle l'a vu, elle a dit, je cite: « Il est trop chaud, Apollon! ». Elle est chasseresse, maintenant.

- J'ai jamais rencontré mon père, moi.

Nico cesse de fixer le plafond et se tourne vers moi:

- Vraiment?

- Oui.

- Je suis désolé pour toi.

- T'inquiète, c'est pas grave. Je suis pas le seul demi-dieu qui n'a jamais rencontré son parent divin.

- Dis, c'est qui ton parent mortel? me demande Nico, totalement hors-sujet.

- Ma mère? Une chanteuse de country. Beaucoup trop collante à mon goût mais elle est géniale. Et toi, c'est qui ton parent mortel?

- Ma mère... C'était une actrice. Italienne. On habitait à Venise, avec Bianca. Dans les années 30, m'informe-t-il avec tristesse.

Je savais déjà que sa sœur a disparu et qu'il a été bloqué dans le temps et que, scientifiquement, il a environ 70 ans. Mais je n'étais pas au courant qu'il était italien (avec un nom pareil, me direz-vous...). Ni que sa mère est décédée.

- T'es italien? je le questionne pour le distraire.

- Oui.

- Tu parles la langue?

- Hmm hmm.

- C'est cool, ça!

- Moui. C'est pas très utile, ici.

- Bah, c'est cool quand même! Dis, pour voir: « Will, tu es le plus beau gars que j'ai jamais rencontré. Tu es un dieu! ».

Je rougis. Je lui fais dire n'importe quoi. Nico aussi devient rouge pivoine, mais se reprend vite. Il revient à sa couleur normale et sourit démoniquement.

- Will, sei il dottore più strano che abbia mai incontrato. Mi fai pensare a una pecora bionda, con quei capelli! (Traduction: Will, tu es le docteur le plus étrange que j'ai jamais rencontré. Tu me fais penser à un mouton blond, avec ces cheveux!)

- Je sais pas pourquoi, mais j'ai pas l'impression que c'était ce que je t'ai demandé de réciter.

- Je ne vois pas du tout pourquoi! ment Nico avec un air innocent.

- Bon, dors, Nico!

- Non.

- Tu m'énerves.

- De rien, ça me fait plaisir.

On a continué à discuter de tout et de rien jusqu'à ce que Nico s'endorme. A quatre heures du matin. Sans commentaire.

Death Boy et Docteur 💀☀️ {Ff}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant