Chapitre 5

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Nous étions le 9 Mai 1752, soit plus de 265 ans en arrière... Ce petit village n'était autre que Pienza, en Italie. Nous avions changé à la fois d'époque et de pays.

-Bordel Alexander qu'est-ce que tu as fait ?!

-J'en sais rien moi je voulais te réconforter en te frottant le dos mais il y a eu cette lumière aveuglante et on s'est retrouvés ici.

-Mais... Pourquoi ?

-COMMENT VEUX-TU QUE JE LE SACHE ?!...

Son attitude avait changé du tout au tout. Il était devenu distant, froid, presque violent. Puis il redevint normal, ses yeux doux, son regard hésitant, tout ce qui m'avait fait craquer à l'époque...

-Maria... Je suis désolé...

-Ce n'est rien, tu es à bout de nerfs et je le comprends.

Il ne dit plus rien. Ne sachant que faire, j'observais les différents éléments qui m'entouraient, jusqu'à ce que mon regard se pose sur mon reflet dans le grand miroir en pied. J'avais la peau légèrement mate, les yeux verts, les cheveux bruns avec des reflets couleur miel. Nous étions vraiment revenus à l'époque ou nous nous étions rencontrés.

J'étais tentée de lui en parler mais il me semblait que ce n'était pas le bon moment. Pendant des heures il resta silencieux, errant de pièce en pièce sans avoir vraiment de but. Ne pouvant plus supporter de le regarder faire ses allers et venues, je retournais dehors et m'allongeais sous un soleil de printemps.

Le temps passa, encore et encore. Après des longues heures passées à me prélasser comme un lézard au soleil, cherchant ce qui aurait pu nous faire changer d'époque sans raison, je me levais et le rejoignis.

Alexander était allongé sur le sol, les yeux rivés au plafond. Il ne cilla même pas quand je m'assis à côté de lui.

Un silence gêné s'ensuivit. Après tout, se retrouver seule avec son ex d'il y a plus de deux siècles et demi c'est un peu perturbant... De plus, Alexander ne me paraissait plus aussi insupportablement crétin qu'au château. Je ne savais pas quelle force magnétique me poussait à me rapprocher de lui.

-Tu t'en souviens ?

Je sursautais, je ne m'attendais pas à ce qu'il rompe le silence.

-De quoi ?

-De notre rencontre.

Je soupirais, un frisson me parcouru. Bien sûr que non je n'avais pas oublié. Comment effacer de ma mémoire le souvenir de mon premier grand amour ?...

-Oui...

Je m'en souvenais comme si c'était hier, le sort de Lucifer étant levé à sa mort, tous mes souvenirs m'avaient été restitués.

**Quelques siècles plus tôt* *

Je venais d'arriver en Italie dans le but d'éliminer un certain riche qui terrorisait le village où vivait Alexander. Il leur demandait un genre d'impôt et si quelqu'un avait le malheur de ne pas le payer, il leur tranchait la tête et brûlait toute la famille dans leur maison. De temps en temps, pour s'amuser – beurk je vais vomir tellement c'est dégueulasse – il violait les jeunes filles qu'il trouvait à son goût...

C'est pourquoi j'ai pris un malin plaisir à l'attraper et lui peler lentement les couilles et le bout de saucisse qui l'accompagne, avec un couteau fraîchement – ou chaudement – sorti de chez le forgeron. Il hurlait et se débattait, attaché à un poteau, devant une foule hilare et encourageante.

Bref faisons l'impasse sur ce type sans intérêt. Enfin c'est un peu grâce à lui que j'ai rencontré Alexander. Le soir même de la mort du bourgeois violeur, je me tenais au centre du village, je m'étais fabriqué un petit feu de bois pour passer la nuit avant de continuer dans une autre ville italienne non loin de là. C'est alors qu'il était apparu à mes côtés.

-Tu risques d'avoir froid tu sais, on a beau être au mois de Mai, les nuits sont encore fraîches.

Je regardais droit dans les yeux ce beau jeune homme blond aux yeux de jais. Une chaleur intense parcouru l'intégralité de mon corps et je ne pus bouger aucun de mes membres, comme paralysée par ce magnifique regard.

Cette nuit là, je finis par la passer dans le lit de ce bel inconnu tandis que celui-ci dormait sur une couverture d'hiver à même le sol. Mais je ne dormis pas, je passais mon temps à regarder chaque muscle, chaque parcelle visible de sa peau. J'étais littéralement subjuguée par la beauté de ses traits.

Lorsqu'il bougeait je me retournais sur le dos et faisais semblant de dormir, de peur qu'il ne me prenne en flagrant délit de reluquage. Mais il ne se passa rien, mis à part qu'il ronflait comme une donzelle.

Le lendemain matin c'est une main douce mais ferme qui me réveilla en me secouant comme un prunier. J'avais du m'endormir au moment où le soleil pointait son nez. Et c'était toujours le délicieux jeune homme qui me tenait par les épaules pour me forcer à me lever.

-Navré de te réveiller de la sorte mais tu as des ennuis...

-Pardon ?!

-Regardes par la fenêtre.

Me levant d'un bond je me ruais directement dehors, et me retrouva face à un énorme cheval aussi laid que celui qui était avachi sur son dos.

-Par tous les Saints ! Quel est ce monstre ?!

L'homme se renfrogna et me répondit d'un ton bourru.

-C'est un cheval pauvre ignorante !

-Ah non, mais je parlais de la chose qui écrase le pauvre dos de cette malheureuse bête !

Vexé il dégaina son épée, qu'il ne put pointer sur moi vu que je l'avais désarmé en une fraction de seconde d'un coup de pied.

-Tu viens de signer ton arrêt de mort petite !

-Ah mais parlez, parlez monseigneur, les paroles sont les armes des lâches qui ont peur d'agir.

Le rouge lui montait aux joues ce qui rendait son visage boursoufflé encore plus affreux. Il descendit de son cheval et fourra ses rênes dans les mains de mon hôte comme s'il était son écuyer. Ce genre d'action avait le don de m'énerver.

-Allez, approchez vieux croûton, que je vous botte votre richissime derrière comme il se doit !

-Alors c'est toi, petite garce, qui a tué celui qui était chargé de me ramener les impôts de ce village ?

J'effectuais une petite révérence, ce petit jeu me plaisait.

-Pour vous servir !

Le gros bonhomme bomba le torse, ce qui eut pour effet de le grossir d'une manière presque ridicule.

-Que quelqu'un lui attache les mains et les pieds ! Je vais l'emmener et elle devra courir derrière mon cheval pour ne pas être traînée sur le sol.

-S'il y en a un qui aurait besoin de courir c'est vous !

Malheureusement pour mon ego, cette phrase ne provenait pas de ma bouche, mais de celle du beau blondinet qui m'avait offert son hospitalité. Il vint se placer devant moi, bras croisés, le regard plein de défi.

C'est à ce moment là que mon cœur avait flanché pour lui, même sans l'avoir étudié, je le savais au fond de moi...

Je venais d'avoir un coup de foudre...

Immortelle - T2 - RenaissanceWhere stories live. Discover now