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     Il paraît que les voisins de mes parents ont remarqué que j'étais mal en point. J'ai beaucoup maigri, et certaines rumeurs affirment que je sortirais la nuit pour ne revenir qu'au petit matin. Mes parents écoutent avec désespoir les ragots des voisins, qui les plaignent ou qui les jugent. Je m'enferme dans mon mutisme, je ne sors plus, je ne m'alimente presque plus. Juste assez pour rester en vie. Je serais en dépression selon les médecins. Mes parents essaient bien de me remonter le moral, ils ont trop peur que les services sociaux ne s'en mêlent.

     Un jour, Iliana a débarqué avec ses parents. Une idée de mon père. Mais je n'ai pas voulu la voir. Je ne voulais pas lui faire de peine. Quand elle est repartie le soir j'étais encore plus anéanti.

     Puis Marie est arrivée, à la fin du mois de juin, un sac de sport sous le bras. Elle avait ramené toutes ses affaires et revenait s'installer chez nous.

J'étais tellement heureux de la voir. Les premières années elle m'en avait énormément voulu de ne rien avoir tenté quand mes parents l'avaient envoyée en pension. Si seulement elle savait que c'est moi qui leur avais soufflé l'idée... Elle avait bien fini par comprendre qu'elle était mieux loin de nous, loin des problèmes, loin de ma maladie. Elle avait tellement bien réussi ses études qu'elle avait deux classes d'avance et devait rentrer au lycée cette année. Moi, ma majorité était derrière moi, mais je n'avais pas trouvé la force de partir, tout comme je n'avais plus la force de rien. Elle avait décidé d'arrêter son cursus pour se consacrer au sport. Elle rentrerait en seconde dans un lycée sport étude. Elle faisait du hand-ball et était très douée. Je lui voyais une belle carrière devant elle.

     Comme j'étais devenu un vrai légume, et que les voisins commençaient à devenir de plus en plus intrusifs, mes parents ont décidé de déménager. C'est alors qu'ils se sont lancés dans le dur labeur de réunir dans quelques cartons l'histoire de toute une vie. Je ne les ai pas aidés, complètement effrayé à l'idée de quitter mes repères, et de partir loin d'Iliana. Même si je n'avais plus touché sa peau depuis plusieurs mois, le fait de savoir qu'elle était à quelques rues de moi me rassurait. Un matin de juillet, il faisait encore nuit quand la famille partit aussi loin qu'elle le pouvait, afin que la ville oublie toute trace de leur passage.

     Moi, j'ai essayé de m'enfuir loin de ce cauchemar, en succombant à mon sommeil, m'endormant pendant des heures interminables. 

     Quand j'ai ouvert les yeux, la voiture se garait dans un parking au bord de la mer. Avec l'argent qu'ils ont amassé depuis toutes ces années, mes parents nous avaient promis un voyage.

     Marie, près de moi, s'est allongée sur sa serviette, semblant s'être endormie. Mes parents se sont dirigés vers la mer, au loin. Ils plongent, ils nagent, se relaxent. Je me lève soudain, tout engourdi de cette sieste interminable, puis je me dirige vers eux, vers la mer, m'y engouffre, espérant que celle-ci me happe sans plus jamais me relâcher. 

Je suis un actisteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant