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     Comme je culpabilisais beaucoup, j'allais de plus en plus voir Iliana chez elle. On se voyait au centre, c'est vrai, mais je ne pouvais pas me confier à elle, la prendre dans mes bras, car je devais faire l'autiste. Quand je me retrouvais avec elle dans sa chambre, quelques fois ses parents nous laissaient seuls car ils voyaient bien que rien ne se passait. Elle, elle jouait avec une pelote de laine, ou des perles, ou encore ses lacets, et moi, je grattais la moquette par terre, les yeux baissés. Mais dès qu'ils quittaient la pièce, je m'approchais d'elle, elle cessait instantanément de caresser ses perles, elle ne bougeait plus. Je voyais qu'elle s'imprégnait de mon odeur, et qu'elle attendait mes paroles.

     Elle n'avait jamais été aussi sereine qu'à ce moment précis où j'approchais mes lèvres de son cou. Sa respiration ralentissait et son corps se relâchait entièrement. Alors je lui disais des paroles aussi douces que l'était sa peau, je lui disais que je l'aimais, je lui disais que je pensais sans cesse à elle, je lui disais qu'elle était en moi. Ces paroles la calmaient, elle était comme hypnotisée. C'est d'ailleurs pour cela que ses parents nous laissaient seuls et me permettaient de venir aussi souvent. Quand je repartais de chez elle, elle était apaisée, et j'entendais souvent sa maman dire à la mienne le bien que je lui faisais. J'étais fier de contribuer à son bien-être, même si je n'étais pas certain qu'elle en soit réellement consciente.

     Alors j'allais de plus en plus chez elle, je voulais qu'elle s'en sorte, j'aurais voulu qu'elle aussi soit une actiste. Je la stimulais, je m'approchais, je changeais mes phrases et j'observais ses réactions. Elles changeaient rarement. Son souffle s'accélérait quand je lui disais que je devais partir. Elle se calmait quand je posais ma tête sur son épaule. Une fois j'avais tenté de prendre sa main mais ce fut un échec car elle n'avait pas apprécié et s'était repliée sur elle-même. Seuls mes mots et ma présence lui faisaient du bien. 

     Mais moi, j'étais toujours un peu plus frustré. Je ne voyais que du vide dans ses yeux. Je voulais qu'elle me parle, qu'elle m'aime comme je l'aimais. Mais elle, elle était vraiment autiste. 

Je suis un actisteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant