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     Les semaines ont passé, mon quotidien ne changeait pas vraiment. J'allais à l'école puis au centre et à la maison mon père s'occupait de moi. Plusieurs jours après le loto j'ai beaucoup pensé à Iliana et je demandais à ma mère quand elle allait en organiser un nouveau. Elle me répondait qu'elle ne pouvait pas en faire trop souvent car sinon les gens allaient se poser trop de questions. Je ne comprenais pas ce qu'elle voulait dire mais je ne voulais pas la contrarier alors je n'insistais pas.

     A l'école, j'ai continué à faire ma vie au fond de la classe, mais je suivais de plus en plus les cours des maîtres et maîtresses qui devenaient de plus en plus intéressants. Au centre, je n'avais pas non plus d'amis car comme nous avions tous un petit truc en plus, personne ne parlait à personne.

     Les mois ont passé sans que de grands événements n'arrivent dans ma vie, même si j'avais de plus en plus de mal à tenir ma langue, à ne pas chanter, à ne jamais regarder les autres dans les yeux, à continuer de grogner, à me lever en pleine nuit pour caresser les murs, à trier mes jouets, et surtout, à croire à toutes les recommandations que me donnaient mes parents sur le bien et le mal. Mais je les aimais si fort que je continuais à suivre leurs conseils, malgré la torture qu'ils m'infligeaient chaque nuit et tous les nouveaux exercices encore plus fatigants les uns que les autres que mon père inventait chaque jour.


     Un matin, mon père m'amena au centre en me portant dans ses bras car je n'avais aucune envie de marcher. J'étais particulièrement fatigué après une nuit agitée, car il m'avait demandé de dormir sur une chaise parce que j'avais osé lui dire que je voulais me faire des amis. J'étais démoralisé et si épuisé qu'il m'a déposé sur un coussin près du mur du fond et je me suis assoupi là plusieurs heures je crois.

     Ce sont des souliers qui ne m'étaient pas inconnus qui m'ont réveillé car ils étaient postés juste sous mon nez. Comme je ne pouvais pas lever la tête de peur de croiser le regard de la personne qui se trouvait dans ces chaussures, j'ai attendu que quelque chose se passe. Les chaussures n'ont pas bougé pendant de longues minutes, et j'ai ensuite vu deux mains s'approcher des lacets et les caresser à n'en plus finir. Je savais que ces petites mains, et leur façon si singulière de caresser les lacets me disaient quelque chose mais je n'arrivais plus à me rappeler quoi. C'est alors qu'en creusant dans ma mémoire je me suis souvenu de la belle Iliana du jour du loto, que j'avais observée pendant des heures dans la cabane. J'ai levé les yeux, discrètement pour que la maîtresse ne le remarque pas ; il ne faisait aucun doute, c'était bien elle. Je ne sais pas par quel hasard elle s'était retrouvée dans le même centre que moi, sûrement grâce à son truc en plus, mais j'en étais le plus heureux du monde.   

Je suis un actisteWhere stories live. Discover now