Hating, Craving, Falling

Por VicArroyo

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| Gagnant Wattys 2018, catégorie « Acteurs du changement » | Si Charly Sanders est bien sûre d'une chose, c'... Más

Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
Chapitre 26
Chapitre 27
Chapitre 28
Chapitre 29
Chapitre 30
Chapitre 31
Chapitre 32
Chapitre 33
Chapitre 34
Chapitre 35
Chapitre 36
Chapitre 37
Chapitre 38
Chapitre 39
Chapitre 41
Chapitre 42
Chapitre 43
Chapitre 44
Chapitre 45
Chapitre 46
Chapitre 47
Chapitre 48
ÉPILOGUE
Bonus - Lettre
Playlist Hating, Craving, Falling

Chapitre 40

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Por VicArroyo

Si j'étais dramaturge, je crois que je pourrais écrire une pièce en trois actes à propos de cette soirée. Je pourrais jouer sur les émotions exacerbées par l'alcool, et sur les réactions absolument inattendues qui en résultent. Mais dans les faits, j'assiste plutôt au premier acte depuis le strapontin du fond sans vraiment bien saisir les dialogues, pour complètement patauger pendant tout le reste de la pièce.

Quand j'arrive chez Pauline, Chloé est bien là, dans son accoutrement de soirée habituel. Maintenant que j'ai une idée de ce qui tourmente Chloé, j'ai du mal à concevoir qu'elle puisse continuer à passer son temps à arborer cette perruque hideuse et ces tenues en vinyle fluo. En fait, je trouve que cela ne correspond juste pas à la personnalité qu'elle a pu me faire entrevoir ces derniers temps. Et je sais que si elle aime s'habiller comme ça, ce n'est pas mon problème. Pourtant, je ne peux m'empêcher d'avoir cette inexplicable sensation que ça ne lui plaît pas réellement.

Au début, je tente de me comporter comme si de rien n'était, mais impossible. Du coup, en grande courageuse que je suis, je prends le parti de l'éviter pendant les trois premiers quarts d'heure. Je la surprends néanmoins plusieurs fois à m'observer du coin de l'œil sans non plus venir vers moi. S'il y a bien une chose que je remarque cependant, c'est la rapidité avec laquelle elle ingère tout ce qui ressemble de près ou de loin à de l'alcool. À peine finit-elle un verre qu'elle se ressert directement. C'est mauvais signe, et je sens mon cœur se serrer.

Toutefois, un jeu silencieux finit par s'instaurer entre nous, lancé par Chloé. De loin, a commencé à me sourire puis me faire des clins d'œil, formant un cercle de ses doigts me signifiant que tout va bien.

Signifiant qu'a priori, le jugement sera plutôt positif. C'est ce qu'elle semble vouloir croire en tout cas.

Et je décide de ne pas lui enlever ça.

J'oublie alors rapidement tout ce qui m'entoure pour me focaliser sur ses noisettes. Malgré sa tenue qui ne me plaît pas, sa perruque dont la teinte ne rend pas hommage à sa beauté, et son maquillage criard, je vois par-delà son masque. J'ai l'impression qu'une aura scintillante s'échappe d'elle et m'attire irrépressiblement.

Soit j'ai des hallucinations, soit je plane complètement.

C'est le son de la voix bourrue d'un homme au fond du salon qui me sort de ma transe. Une bière dans une main, son téléphone dans l'autre, il semble s'exciter sur un gars, et le ton monte à propos d'une blague de l'un sur la chevelure d'Inès, une vieille copine du lycée. Elle a fait l'erreur d'amener son collègue et le frère de celui-ci, de visite dans le coin. Je n'ai pas le temps de me redresser que Pauline les fout dehors sans tracas. En se retournant, elle lève les yeux au ciel puis s'approche de moi.

– Va la voir !

Elle me plaque ses lèvres sur la joue avant de filer comme une tornade. Je soupire et décide de me faire violence. Je me dirige donc vers la cuisine pour chercher quelque chose à boire et y retrouve Chloé qui semble s'y être réfugiée. Je lève mon verre dans une proposition silencieuse de la resservir et elle y répond avec un sourire. À l'intérieur de mon corps, mon cœur bat plus fort.

Elle s'approche pour me tendre son gobelet. Elle s'attarde une seconde de trop sur mes yeux avant de détourner les siens, sa bouche se retroussant légèrement.

On s'observe en sirotant notre boisson. Je n'ose rien dire de peur de briser l'instant. Je me sens bien avec elle à mes côtés, juste là, comme ça. Parler semble superflu. Au bout d'un moment, cependant, le silence devient pesant et je cherche quelque chose à lui dire.

– Alors, euh... Apparemment ça s'est bien passé ? demandé-je maladroitement.

Son sourire est rempli de lassitude.

– Mon avocat pense que c'est réglé, mais tant que le jugement n'est pas rendu je ne veux pas crier victoire. Surtout que je pensais que ça me rendrait plus heureuse, mais en fait ça n'enlève aucune des conséquences de ce qu'il a fait. Il sera juste puni, et ce serait déjà énorme, mais j'aurai encore à vivre avec tout ça. Mais bon, ce n'est pas comme si je n'avais pas l'habitude...

Je fronce les sourcils sans comprendre, mais je n'ai pas le temps de lui demander de développer. De l'autre côté de la pièce, Pauline me fait un signe pour la rejoindre.

– Ne bouge pas, je reviens.

Ma meilleure amie me réquisitionne concernant le disque qu'elle m'avait prêté il y a quelques semaines. Mais lui ayant rendu récemment, elle n'a plus qu'à le chercher.

Pauline ne m'a pas retenu longtemps, pourtant quand je me dirige vers la cuisine, j'entends un cri strident et désagréable qui dresse les poils de mes bras :

– Alors ça ! Si je m'attendais à te voir ici !

En entrant dans la pièce, je discerne une petite blonde à l'attitude étrange, transpirant l'hypocrisie, qui se rue sur Chloé. Je sens son corps se tendre instantanément, et le mien avec.

Avant même que Chloé ait le temps d'ouvrir la bouche, la fille jauge son accoutrement de la tête aux pieds et se met à rire. À lui seul, ce son déborde de tout le jugement qu'elle lui porte.

– Ah, vous jouez encore à ça ?

– À quoi ? demande Chloé sur la défensive, en se détournant légèrement.

Elles se connaissent, mais elle ne désire clairement pas lui parler.

– Bah vos déguisements et tout, jase-t-elle en balançant une main désinvolte vers la tenue de Chloé. Tu es venue avec Zoé ? Ça fait une éternité que je ne l'ai pas vue !

Le visage de Noisettes se décompose. Son interlocutrice n'a pas l'air de s'en rendre compte, ni même faire semblant de se préoccuper d'elle, en fait. Son attitude m'insupporte rapidement. Je ne sais pas qui est Zoé, mais j'ai soudainement l'impression que Chloé s'est transformée en cocotte-minute et que la soupape ne va pas tarder à lâcher. Je décide d'entrer dans la conversation pour faire diversion, mais Noisettes ne m'entend pas arriver.

– Mais pour qui tu te prends ?! se met-elle alors à crier. Tu crois que tu peux débarquer trente ans plus tard, comme une fleur, et continuer à étaler ton jugement de partout comme de la merde sur les murs ?! Ne t'avise pas de mentionner Zoé à nouveau sinon tu risques de le regretter !

Je cligne des paupières, interdite de stupéfaction. Ce n'est pas la première fois que Chloé se laisse emporter par ses émotions, mais je ne l'ai jamais entendue parler de cette manière. Elle est en train de complètement péter un câble contre cette pauvre fille qui n'a pas l'air de comprendre ce qui lui arrive. Mais en toute honnêteté, je commence à me demander si elle ne le mérite pas un peu.

– Mais... tu es sérieuse ? réplique-t-elle faussement blessée. Je demande juste de ses nouvelles, quoi, je ne pige pas ta réaction.

Ses yeux papillonnent et sans même connaître leur histoire, je vois qu'elle ne pense pas un seul des mots qu'elle prononce.

Chloé semble pétrifiée et ne bouge plus pendant quelques secondes. Sa poitrine se gonfle et s'affaisse frénétiquement, comme si elle peinait à reprendre sa respiration après un effort suprême. Finalement, la blonde hausse les épaules, se détourne vers la table et met une olive dans sa bouche.

Noisettes s'effondre alors d'un coup comme un château de cartes qui ne tenait plus qu'à un fil.

– Tu as raison, chuchote-t-elle à l'intention de Miss Carnage, tu ne peux pas comprendre.

Et sur cette phrase digne d'une adolescente rebelle face à ses parents, elle s'enfuit vers la chambre de Pauline.

Choquée par la tournure des évènements, je reste paralysée sans savoir comment réagir. Que vient-il de se passer exactement ? Celle dont j'apprends le nom quelques secondes plus tard, Laura, reste hébétée dans la cuisine, haussant plusieurs fois de suite ses sourcils et me regardant comme si je pouvais lui apporter une réponse. Je rassemble mes esprits et décide que cette personne ne m'intéresse pas le moins du monde. Je hausse les épaules et la laisse en plan pour rejoindre Chloé, bien contente qu'il n'y ait eu personne d'autre à ce moment-là dans la pièce.

En entrant dans la chambre, je la trouve prostrée sur le lit, reniflant au milieu de ses larmes. Bien que j'aie du mal à comprendre ce qu'il se passe, la voir dans un tel état me brise le cœur. Malgré l'évidente pression qu'elle devait subir ces derniers temps, je l'ai toujours perçue comme quelqu'un d'extrêmement forte, et je ne m'attendais clairement pas à la voir s'effondrer dans un moment pareil.

Je m'assieds près d'elle sur le lit, son dos tourné à moi, sans vraiment savoir quoi lui dire. Alors je ne dis rien.

Je suis complètement déboussolée par la situation. Elle s'est livrée sur son procès mais à part de la colère ses émotions étaient composées. Je ne la connais pas assez pour savoir la réaction que je devrais adopter. Ni même seulement celle qu'elle attend. Dois-je la faire parler ? Apporter la boîte de mouchoirs pour qu'elle évite de détruire la taie d'oreiller de Pauline ? Ou lui tapoter l'épaule en disant que tout va bien ? Mais qu'est-ce que j'en sais ? Si ça se trouve, elle subit le contrecoup de toute cette histoire de procès, ou alors le pire lui est arrivé et je n'en ai aucune idée.

Nous restons comme ça un long moment, mes yeux s'habituant à l'obscurité, mes oreilles s'habituant à ses pleurs. Ce qui la rend triste semble la faire durement souffrir, et je commence à me demander si je ne devrais pas la laisser seule. Elle n'a peut-être pas envie que je témoigne de son état peu reluisant. Et puis, pourquoi souhaiterait-elle que je reste près d'elle alors qu'elle n'a de cesse de me repousser ? Je devrais peut-être appeler Adeline, c'est elle qui doit gérer ça d'habitude, j'imagine. Pourtant, je suis incapable de m'éloigner d'elle, sa peine me renversant les tripes, et je ne bouge pas d'un centimètre.

J'émets mille et une hypothèses sur son état, mais aucune ne paraît vraiment plausible. Au bout de ce qui me semble être un temps interminable, je pose ma main sur son épaule comme une tentative de lui signifier que si je ne sais pas quoi dire, je peux néanmoins écouter. Elle ne réagit pas, ne se retourne pas, ne se met pas à me raconter son histoire. Mais elle ne me demande pas non plus de la retirer, et c'est une première bataille de gagnée pour moi.

J'attends encore longtemps qu'elle se calme, que les sanglots s'espacent les uns des autres, que sa respiration s'apaise, qu'elle ne renifle plus. Enfin, j'entends le bruissement des draps et je la vois se retourner lentement. Dans le noir, je distingue seulement sa silhouette et la forme de son visage, mais je perçois ses yeux briller. Je récupère un mouchoir sur la table de nuit de Pauline et le tends à Chloé. Elle se mouche bruyamment et se redresse légèrement. J'ose à peine respirer, ayant peur de briser la bulle qui nous entoure, dans laquelle, j'espère, elle se sent au moins un peu en confiance pour ne pas m'obliger à l'abandonner dans la torpeur de sa triste nuit.

– Tu devrais me laisser seule, je te gâche ta soirée, souffle-t-elle si bas que je peine à entendre.

Sa voix est traînante, comme si prononcer cette simple phrase requérait un effort surhumain.

– On s'en fout de la soirée.

Ma réponse se révèle plus tranchante que je ne le souhaite et j'espère qu'elle ne se sent pas agressée. Il est juste hors de question que je retourne auprès de mes amis en sachant qu'elle est au fond du gouffre, deux portes plus loin. C'est tout bonnement impossible.

Je l'entends s'asseoir contre la tête de lit en bois et la vois replier ses jambes contre elle pour les enlacer. Elle fuit mon regard et enfouit son visage dans ses genoux.

– Les tendances s'inversent, dit-elle faiblement.

Mais je ne comprends pas de quoi elle parle.

– La dernière fois, c'était toi qui étais dans un état semblable, continue-t-elle doucement, et là c'est mon tour. Enfin, en dix fois pire...

Elle renifle et se frotte le nez contre la dentelle de son bras. Ça semble horriblement désagréable et je récupère la boîte entière de mouchoirs pour la lui donner. Elle se mouche à nouveau plusieurs fois avant de reprendre sa respiration, serrant la boîte contre elle.

Je décide de ne pas tout de suite réagir et ne répond rien. Je me dis que si je n'approuve ni ne contredis ses propos, je laisse peut-être une porte ouverte. Pour une fois qu'elle semble prête à se livrer, je n'ai pas envie qu'une parole mal avisée l'amène à se réfugier derrière ses retranchements.

– Mon procès s'est bien passé mais je ne peux même pas me permettre d'essayer de respirer un peu car tout à côté me détruit... Moi aussi j'ai une date particulière, révèle-t-elle.

Je ne fais pas immédiatement le lien entre ses propos et j'imagine qu'elle perçoit mes sourcils se froncer malgré l'obscurité, car elle précise sa pensée.

– Tu sais, celle qui fait mal à chaque fois qu'on y arrive et qui nous renvoie un tsunami quand on essaie tant bien que mal de mener sa barque.

Je hoche la tête sur le côté, comprenant où elle veut en venir. Je remarque que même dans un moment pareil, ses paroles sonnent comme des poèmes. Elle n'en écrit peut-être plus, mais elle a clairement gardé ça en elle.

Un long silence s'installe, entrecoupé de sa respiration saccadée tandis qu'elle essaie de reprendre le contrôle de ses émotions. Je m'étais imaginé qu'il s'agissait de son procès, mais elle semble peiner à gérer des tourments qui la hantent depuis plus longtemps que cela. Et je ne peux que compatir à ce qu'elle ressent. Combien de jours et de nuits ai-je abandonnés à la noirceur de ma douleur ? Je suis bien placée pour savoir qu'il n'est pas toujours aisé de les dominer, de les dissimuler, et que ce qui nous blesse en profondeur nous submerge parfois jusqu'aux tréfonds les plus lointains.

– Il y a deux ans, mameilleure amie est morte.

*******

Bonjour, 

J'espère que ce nouveau chapitre vous a plu. On entre plus en détail dans l'histoire de Chloé pour enfin comprendre ce qui la tourmente.

On arrive aussi au 40ème chapitre, il n'en reste désormais plus que 9, les jours sont comptés... Profitez-bien de la fin de cette histoire !

A demain pour la suite, 

xx

Victoria

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