Le Monde Flottant [EN PAUSE]

RomyAlexandre

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Jenna. Personne ne sait d'où il vient. Du nord, des dunes, du coin de la rue. Certains disent qu'il vient du... Еще

Prologue
Le Maître des Nuages
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
L'Enfant-Démon
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
Chapitre 26

Chapitre 8

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RomyAlexandre

Lorsqu'elle ouvrit la porte, Eida retrouva le bonheur de vivre avec quelqu'un. Un sentiment de sécurité l'envahit, apaisant l'inquiétude qui la rongeait constamment. Elle n'était pas seule.

Sans qu'elle ne s'en rende compte, le chat s'était engouffré avec elle dans la demeure. Il se faufila dans le salon avant qu'elle n'ait le temps de le rattraper. Eida haussa de nouveau les épaules, résignée. Ce chat avait du caractère.

Après avoir ôté ses chaussures et son chapeau, elle grimpa rapidement à l'étage. Discrète comme toujours, elle s'approcha de la chambre. Elle aimait cette absence de bruit, ce silence que l'on garde lorsque quelqu'un dort, si éloigné de celui, froid et sombre, qu'elle partageait avec la solitude.

Timidement, elle ouvrit la porte et se glissa à l'intérieur. Allongé sur le lit, la tête tournée vers la fenêtre, Jenna avait les yeux grands ouvert en direction du ciel. Alerté par sa présence, comme s'il avait pu entendre l'infime bruit que faisait son cœur, il se tourna vers elle. Un grand sourire illumina son visage, un sourire presque enfantin.

– Tu as faim ? demanda doucement Eida, parce qu'il n'y avait rien d'autre à dire.

– Un peu.

Les yeux de la jeune fille s'illuminèrent, elle posa son panier sur son bureau et en sortit ses achats. Jenna s'était relevé et la regardait avec étonnement.

– Je t'ai acheté des vêtements. Je ne savais pas trop quoi te prendre alors j'ai pris la plus grande taille.

– Merci beaucoup.

– Euh... Tu veux prendre un bain pendant que je prépare le repas ? Durant les soins j'ai essayé de te laver mais... 

Son regard se posa sur les vêtements déchirés qu'il portait toujours. Sentant le rouge lui monter aux joues, elle détourna les yeux et termina rapidement sa phrase.

– Je n'ai pas osé m'occuper de l'intégralité.

Jenna comprit brusquement et eut un sourire amusé.

– Ce ne serait pas de refus ! lança-t-il.

– Bien. Va dans la salle d'eau, tout au bout du couloir. Je vais faire chauffer de l'eau, je déposerai la bassine devant la porte.

Le jeune homme hocha la tête et elle disparut comme un coup de vent. Eida descendit rapidement les escaliers pour s'exécuter. Elle entendit la porte de la salle d'eau se fermer et retint un sourire. Elle remarquait pour la première fois qu'elle aimait s'occuper des autres, les aider et les faire rire aussi.

Perdue dans ses pensées, elle attendit que l'eau soit chaude, puis elle souleva la large bassine et la porta jusqu'en haut. Ses petits bras pleuraient, mais elle s'en moquait. Elle aimait être là, pour lui. Elle déposa sa lourde charge et frappa à la porte.

– L'eau est chaude ! lança-t-elle, avant de redescendre pour ne pas faire brûler leur repas.

Jenna ne se fit pas attendre et il fut en bas quand Eida termina de faire cuir la viande. Si le pantalon lui allait plutôt bien, la tunique était un peu courte et trop large aux épaules. 

Ils s'installèrent pour manger. Eida n'avait pas réussi à remettre la main sur le chat, qui s'était sans doute dénicher un coin pour piquer un somme.

Alors qu'un silence paisible s'était installé entre eux, la jeune fille remarqua que le visage de Jenna était fermé. Son cœur se pressa doucement dans sa poitrine. À force de se fondre dans cette nouvelle vie, elle oubliait qu'elle était seule à croire en son petite bonheur. Elle le fixa quelques secondes et crut voir de l'inquiétude marquer ses traits. Lui, sans doute, ne partageait pas sa joie.

– Tout va bien, Jenna ? demanda-t-elle soudain.

Il releva brusquement les yeux, surpris.

– Oui. Oui, c'est juste que... je dois rentrer. Au plus vite.

Eida l'observa un moment, interdite. Pour une fois, il ne lui mentait pas. Elle pouvait voir dans son regard une angoisse pressante. Pourtant, la jeune fille était certaine que personne ne l'attendait. Alors, écoutant ses doutes, se rappelant des paroles du vieux fou, elle osa lui poser la question qui la tracassait depuis ce matin.

– Jenna ?

– Oui.

– Où se trouve Amode ?

Il blêmit. Sans doute pensait-il qu'elle ne s'intéresserait pas à son village. Cependant, bon menteur, il se reprit rapidement et répondit la première chose qui lui vint à l'esprit.

– À l'ouest du pays.

– Pourtant là-bas, il n'y a que des forêts mortes.

Jenna perdit toute son assurance. Il avait joué avec le hasard et il avait perdu. Comment aurait-il put savoir que l'ouest était désert ? Eida garda pour elle un ricanement de fierté, elle l'avait coincé. Assis face à face, ils se défièrent du regard. La jeune fille reposa la même question que ce matin, lors de leur première discussion :

– Jenna, d'où viens-tu ?

– Je viens d'une région assez lointaine. Amode.

La même réponse. Eida sourit. Lui, pâlissait lentement. C'était un duel. L'air se chargea d'une lourde tension. Il s'agissait de tenir tête à l'autre sans se compromettre.

– Pourquoi étais-tu dans un tel état, si loin de ton village ? dit-elle, presque amusée.

Jenna se crispa. Encore une fois, il était piégé. Eida était plus futée qu'elle n'en avait l'air. Elle lut dans son regard qu'il commençait à perdre patience.

– J'avais quelques soucis avec mon entourage, répondit-il sans broncher. On va dire que je ne suis pas vraiment le bienvenu là-bas... Un groupe d'homme m'ont traîné jusqu'ici pour me battre.

La même scène rejouée deux fois. C'était une situation assez cocasse, mais aucun des deux ne voulaient lâcher prise.

– A oui ? C'est terrible ! s'exclama-t-elle avec innocence. Mais qu'est-ce que tu as fait pour être traité de la sorte ?

– Juste une histoire de...

Malgré tous ses efforts, Jenna n'arrivait pas à rester calme. Qu'avait-il de si précieux à cacher ? Mesquine, Eida se promit secrètement de tout faire pour lui tirer les vers du nez. Elle l'avait sauvé, elle avait le droit de savoir qui il était vraiment.

– Jenna, tu n'es pas honnête avec moi.

– Tu insinues que je mens ?

– Oui.

– Prouve-le.

Eida sourit. Elle savait des choses qu'il ne savait pas, ou du moins, qu'il avait oublié de prendre en compte.

– Lorsque je t'ai retrouvé, tu étais mal en point, mais tu n'avais pas n'importe quelles blessures : coupures, hématomes et brûlures. Si des hommes t'avaient vraiment battu, ils auraient eu besoin d'utiliser du feu pour t'infliger ces dernières. Or, sous l'effet des flammes, la chair fond. Tes balafres auraient été bien plus graves et je n'aurais pas réussi à te soigner. Je répète donc ma question : pourquoi étais-tu dans un tel état ?

Jenna eut un regard amer. Il avait perdu, il l'avait bien compris. Mais il était le seul maître de sa parole et s'il décidait de ne pas répondre, Eida ne pourrait rien contre lui. D'un geste brusque, le jeune homme se leva et explosa :

– Tu as trouvés le bâton ? Où est-il ?

– Le bâton ? demanda Eida, surprise.

– Ma canne ! Un bâton de fer avec des symboles runiques dessus. Tu vois de quoi je parles, n'est-ce pas ?

La jeune fille se leva à son tour, renversant sa chaise.

– Oui, je l'ai trouvé !

– Où est-il ?

– Je l'ai vendu.

Elle vit le visage de Jenna se décomposer. Il balbutia, brutalement refroidit.

– Vendu... murmura-t-il. Tu l'as... vendu. Comment t'as pu faire une chose pareille ?!

– Je ne savais pas qu'elle était à toi !

– A qui d'autre veux-tu qu'elle soit ?!

– Je ne sais pas !

Le jeune homme se prit la tête dans les mains. Son visage, aussi pâle que celui d'un mort, affichait une angoisse bien plus profonde qu'Eida n'avait pu l'imaginer. Le vieux marchand avait parlé de magiciens, mais il n'avait rien dit au sujet de leur canne. Étaient-elles si importantes ? Eida doutait cruellement que son invité soit une sorte de surhomme aux pouvoirs extraordinaires. Peut-être Jenna comptait-il vendre lui-même cette canne, à moins qu'elle ait une importance morale ?

– Comment as-tu pu vendre mon bâton ! cria-t-il désespéré.

– Jenna...

– Je suis foutu ! Comment as-tu pu me faire ça !

– Jenna !

– Explique-moi comment tu as pu...

– Arrête de me crier dessus ! vociféra-t-elle, le coupant sèchement.

Jenna écarquilla brusquement les yeux comme s'il se réveillait d'un mauvais rêve. Eida avait le visage rouge de colère. Effrayé par son cri, le jeune homme s'était tu, la dévisageant à moitié accablé, à moitié déboussolé. On aurait dit un enfant que l'on venait de disputer.

Eida prit une longue inspiration. Il fallait qu'ils se calment ou ils finiraient par s'entre-tuer. Jenna tomba sur sa chaise, défait. Posant à plat ses deux mains sur la table, la jeune fille planta son regard agacé dans le sien.

– Pourquoi as-tu tant besoin de ce bâton ? demanda-t-elle, calmée.

– Si je te le dis, tu ne me croirais pas.

– Vraiment ?

Ils se dévisagèrent longuement. Assis, il était à peine plus petit qu'elle. Eida profitait de sa position pour le dominer, la mine sévère. Après un silence un peu trop oppressant, Jenna soupira, vaincu.

– Je viens du Monde Flottant, je suis un faiseur de nuage, lâcha-t-il.

– Un magicien ?

– Non ! Je n'ai rien à voir avec..., il se tut, observa la mine sceptique d'Eida avant de reprendre : Oui. Un magicien... en quelque sorte.

– Je ne te crois pas.

– Je le savais.

Eida entendait de nouveau la voix du vieux marchand qui lui assurait que les magiciens existaient. Pourtant, elle était persuadée que la magie n'était qu'une fable pour enfants. Si de tels miracles existaient réellement, son père serait déjà rentré.

Fronçant les sourcils, Eida fut soudainement frappée par un mot : Monde Flottant. Elle avait déjà entendu parler de cet endroit, mais ne parvenait plus à se souvenir où.

– Qu'est-ce-que le Monde Flottant ?

– Un pays comme le tiens, mais suspendu dans le ciel.

– Comment est-ce possible ?

Jenna haussa les épaules. Bien sûr, s'il venait vraiment de là-bas, ce genre de question n'avait aucun sens. Mais Eida, elle, n'arrivait pas à comprendre.

– Et l'on ne peut pas tomber du ciel en vivant là-bas ?

– Ben si, justement...

– Qui est tombé ?

– Moi.

Eida retient un soupir. Evidemment, cela expliquait les bleus, les coupures et les brûlures. Parfois, elle ne réfléchissait pas assez.

– Et à quoi te sert ton bâton ?

– À pleins de choses ! Je crée principalement des nuages avec mais...

– Des nuages ? A quoi ça te sert ?

– Pourquoi crois-tu qu'il pleuve, qu'il vente, qu'il neige ici-bas ? Comment expliques-tu qu'il y ait des nuages dans le ciel ?

Eida écarquilla les yeux.

– Alors c'est toi !

– Ouais, c'est moi, reprit Jenna sur un ton insolent.

– Tu pourrais faire venir plus de beau temps chez nous quand même !

– Eh oh ! C'est pas moi qui décide de tout, loin de là ! Je suis un ouvrier, je travaille à l'usine du Prince Leah.

– Une usine ? Un prince ?

La jeune fille sentit ses jambes chanceler. C'était beaucoup trop. Son esprit avide de connaissance voulait tout savoir, mais elle se méfiait. Soit le monde était beaucoup plus mouvementé et incroyable qu'elle ne le pensait, soit Jenna était un très bon beau parleur. En la voyant perplexe, il sourit.

– Le royaume céleste compte treize princes. Chacun contrôle différents éléments pour faire fonctionner les saisons sur Terre.

– Lesquels ?

– Le maître du soleil, celui de la lune et des étoiles jouent le rôle le plus important, celui de faire alterner le jour et la nuit. Il y a aussi le maître de l'aube et celui du crépuscule qui travaillent moins souvent que nous, il faut se le dire ! Pour le reste des éléments, ce sont les maîtres du vent, de la pluie, du froid, des nuages, mais aussi de la chaleur, des tempêtes, des marées et de la neige... qui s'occupent de gérer les différentes saisons.

– Alors tu avais aussi préparé ce mensonge ? dit-elle, admirative.

– Ce n'est pas un mensonge ! riposta-t-il, choqué.

– Il a raison.

Tous deux furent traversé par l'effroi. Une voix souple et élégante avait surgit de nulle part. Leurs regards se croisèrent. Ils savaient que ni l'un, ni l'autre n'avait parlé.

Un chat, le même qui avait suivi Eida jusque chez elle, sauta alors avec grâce sur la table. Ignorant leur surprise, il s'assit au bord de façon qu'il puisse les voir tous les deux.

– Il a raison, répéta-il, calmement.

– Un chat... s'exclama Jenna, irrité.

– Qui parle ! termina Eida, paralysée par la surprise.

L'animal cligna des yeux, comme pour acquiescer, puis il tourna sa petite tête vers Jenna.

– Je ne pensais pas que tu survivrais à ta chute, dit-il, d'une voix posée.

– C'était toi !

– Tu le connais ? les interrompit Eida, incrédule.

– Oui, il était dans l'usine le jour de la tempête !

– Et tu m'as donné un coup de pied, protesta l'animal, hérissant ses poils bleus.

– Tu n'avais rien à faire là !

– Le prince Leah déteste les chats...

– Et moi aussi !

Ils se dévisagèrent furieusement. Perplexe, Eida n'arrivait pas à croire qu'elle discutait avec un chat. Peut-être Jenna avait-il dit la vérité, peut-être que le Monde Flottant existait réellement ? En tous cas, il ne semblait en rien déstabilisé par le fait de se disputer avec un animal.

– Qu'est-ce-que tu fais ici, chat de gouttière ? grogna Jenna, visiblement aigrit.

– Je suis venu chercher le Prince. Mais, apparemment, je me suis trompé d'odeur. Je me disait aussi qu'un prince ne pouvait pas sentir le vagabond !

– Espèce de...

– Je m'appelle Timothée.

Le chat s'était adressé à Eida. D'un geste de la tête, il salua avec courtoisie la jeune fille. Elle n'arrivait pas à croire à ce qu'elle était en train de vivre. Sa tête commençait à lui tourner. Elle avait sûrement lu trop de livre, la fantaisie de ses ouvrages lui montait au cerveau.

– Ne fait pas semblant de m'ignorer ! s'écria Jenna, en se jetant en avant pour attraper l'animal, qui l'esquissa d'un bond.

– Oh ! Excuse-moi, j'avais oublié que tu étais là.

– Très drôle.

Jenna grinçait des dents. Retentant sa chance sans prévenir, il frappa violemment à table à l'endroit où se tenait Timothée. Sa main grande ouverte s'écrasa sur le chat, qui poussa un miaulement aigu, apeuré. Le jeune homme garda l'animal plaqué contre la table, ses côtes prêtes à se briser sous ses doigts crispés. Il se pencha en avant, inclinant la tête comme pour le regarder en face.

– Écoute-moi bien, le gros minet, je ne suis pas là pour rigoler. J'ai des soucis plus importants que la politesse. Puisque tu parles, tu dois t'y connaître en magie. Même dans le Monde Flottant, les rats d'égouts comme toi ne savent pas parler. Dis-moi comment retourner là-haut !

– Doucement, jeune homme, vous allez me briser les os.

– Ça m'est égal. Parle !

– Je ne suis pas certain de savoir comment s'y prendre ! Je vous en supplie, lâchez-moi, miaula-t-il.

Comme Jenna l'observait en silence, l'animal reprit :

– Je... je suppose qu'il faut une magie assez puissante... si vous avez votre bâton avec vous peut-être...

– Mon bâton.

Jenna lança un regard noir à Eida. La jeune fille fit une moue vexée, désabusée, elle croisa les bras sur sa poitrine. Poussant un soupir désespéré, Jenna lâcha l'animal qui resta quelques minutes allongé sur la table, paralysé par la peur.

Un silence agité avait envahi la maison.


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