• Cheikh Bilal •|
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- Alors ça a été ? Me demande Cheikh pendant que nous traversions le couloir.
- Oui, et d'ailleurs merci beaucoup Cheikh de m'avoir permis de passer autant de temps avec elle.
- Et c'est quoi ce sachet si c'est pas trop indiscret ?
- Des habits, des effets de toilettes, deux ouvrages sur l'islam, un dictaphone pour écouter le Coran et le Coran lui-même avec une traduction en français. Dis je aussitôt comme une recitation.
- Attends ! Quoi ? Le Coran tu as bien dit ? S'exclame t'il en s'arrêtant de marcher.
- Oui oui t'as bien entendu le Coran ! Riais je. Allé marche, on pourra parler une fois dans ma cellule vu que les autres détenus sont à la cour.
- Ouesh ! J'y crois pas.
- Tu y croirais moins si je te disais que j'ai appris la Sourate Al-Fatiha comme le dit si bien Ihsane.
- Non !
- Sisi !
- Vas-y récite ! Dit-il tout excité une fois dans la cellule en s'asseyant sur le "lit" en face du mien.
Sans me faire prier, je me mis à reciter la Sourate sans pause ni hésitations.
- Bravoooo mec. Waouw chapeau bas ! Applaudit-il.
- Bon certainement il y a quelques maladresses mais je m'en débarasserais une fois que je saurais lire l'arabe.
- Non il y en a pas. Et si tu veux je peux t'apprendre à lire In Sha Allah !
- C'est vrai ?
- Oui ! Et même je peux aussi t'aider avec l'apprentissage des Sourates ! Je crois que de ce fait, tu auras le temps de discuter avec Ihsane d'autres choses.... Enfin c'est juste une proposition hein !
- Si Ihsane n'en voit pas d'inconvénient, je te dirais. Parce que je sais pas si elle a une autre idée donc...il....faut que je la consulte avant de prendre une décision. Tu comprends ?
- Bien-sûr que oui je te comprends parfaitement, je suis pareil que toi, je ne fais jamais rien sans consulter l'avis de ma femme avant. Donc c'est normal !
- D'accord ! Super alors.
- Je n'aurais jamais cru qu'un jour ce genre de phrase sortirait de ta bouche !
- Et bah moi aussi ! Haussais je les épaules. Dieu a vraiment donné aux femmes le pouvoir de dompter les hommes, c'est incroyable.
- Non je t'assure, jusqu'a preuve du contraire, elles sont magiciennes. Dit Cheikh avec un rire amusé.
- Je te dirais pas non hein. Je me vois avoir des comportements que je ne connaissais même pas. C'est dingue !
- Ah oui, un truc de fou. C'est pareil pour moi. Ma femme a su faire d'un lion, un chat. Regarde moi. Rit t'il.
- Dis donc t'en as de la chance toi, moi elle m'a fait passé d'un lion à une mouche.
Il éclate de rire.
- Non mais sérieux.
- T'abuses ! Rit-il. Mais bon Alhamdoulilah, peu importe notre vie et sa difficulté, Dieu nous a quand même fait dons de magnifiques femmes.
- Ouais totalement. Rajoutais-je.
Un silence s'installa pendant quelques secondes.
- Tu m'as l'air anxieux. Qu'est-ce qu'il y a ? Questionna t'il.
- Eh bien. Je sais pas ! Je suis un peu perdu. Je sais pas si Dieu me pardonnera, je sais pas si...enfin je sais pas. Je sais pas. Ihsane me dit que si mais tu sais que les femmes ont l'habitude de prendre tout à la légére. Tu sais j'ai fait des choses vraiment grave. Toi penses tu que Dieu me pardonnera ? Acceptera t'il mon répentir ?
- Si tu es sincère et sérieux dans ton répentance, alors Allah pardonnera tout tes péchés.
- Mais Cheikh j'ai fait des choses terribles, très terribles. Rajoutais je.
- Je vais te raconter le repentit d'Al Fudayl :
Un homme escalade un mur pour rejoindre son amante. C'est un homme à la triste réputation, un voleur, un bandit, aux péchés innombrables. Il grimpe le long de ce mur dans le but de commettre d'autres péchés, sans savoir qu'il est à un tournant de sa vie. Effectivement une voix s'élève alors, récitant :
" Le moment n'est-il pas venu pour ceux qui ont cru, que leurs coeurs s'humilient à l'évocation d'Allâh et devant ce qui est descendu de la vérité ? " Sourate Al-Hadîd, verset 16
Si tu doutes parfois que d'une terre ingrate peuvent pousser de très belles fleurs, tu changeras d'avis en écoutant ce récit. Le récit d'un homme considéré comme l'un des plus grands criminels de sa région, qui, foudroyé par un verset comme on l'est par une flèche; se repentit et fut élevé par Allah SWT au rang d'ascète. Cet homme n'est autre qu'Al-Fudayl Ibn 'Iyâd de la tribu des Banu Tamîm. Dit-il.
- Je t'écoute ! Hochais je la tête.
- Al-Fudayl Ibn 'Iyâd était un bandit de grand chemin , courageux et bien bâti, qui opérait avec sa bande entre les villes d'Abîward et Sarakhs. De nuit, armé d'une hache et d'un couteau, il barrait la route aux caravanes qu'il dépouillait. Les gens se faisaient entre eux ces recommandations : " Faites attention à Al-Fudayl ! Prenez garde d'Al-Fudayl !". La mère disait à son enfant afin de l'effrayer et l'inciter à ne pas chahuter et dormir : "Tais-toi si tu ne veux pas que je te donne à Al-Fudayl !"
Il manifesta son repentir un jour qu'il rendait visite à une femme dont il était épris. Alors qu'il escaladait le mur de la maison de sa maîtresse, il entendit une personne réciter le verset suivant : " Le moment n'est-il pas venu pour ceux qui ont cru, que leurs coeurs s'humilient à l'évocation d'Allâh et devant ce qui est descendu de la vérité (le Coran) ? Et de ne point être pareils à ceux qui ont reçu le Livre avant eux. Ceux-ci trouvèrent le temps assez long et leurs coeurs s'endurcirent et beaucoup d'entre eux sont pervers." Sourate Al-Hadîd. A peine eut-il entendu ce verset qu'il dit : " Ô que si Seigneur ! Le moment est venu."
Il fit alors demi-tour et s'en alla. La nuit tomba alors qu'il se trouvait à proximité de la ville de Kharibah où il croisa des voyageurs. Il les entendit dire : "Levons le camp ! ". Mais l'un d'eux fit la remarque suivante : "Attendons que le matin se lève car Al-Fudayl rôde dans les parages et pourrait bien nous attaquer." Al-Fudayl se dit alors : " Je me suis mis à songer à ma situation, moi qui m'employait la nuit à commettre des péchés et qui inspirais de la peur aux musulmans.Je me disais qu'Allâh ne m'avait fait venir près d'eux que pour me dissuader et m'obliger à me repentir. Ô Allâh! Certes je me repens auprès de Toi ! Mon repentir consistera dès lors à m'installer à proximité de la Maison Sacrée. "
C'est pour dire, qu'après ce repentir sincère, qu'Al-Fudayl changea, même si l'amour d'Allah et de Son Prophète Saws avait peut-être toujours été présent dans sa vie passée, lui qui, même en pratiquant le brigandage, ne manquait jamais le sermon du Vendredi à la mosquée. Vivant désormais à la Mecque, personne n'aurait pu imaginer que cet ascète, cet homme pieux était un ancien bandit de grand chemin. Me raconta t'il.
- Waouw ! Je suis outré ! Dis-je. Est-ce le seul qui a eut cette chance ?
- Non il y a aussi le repentit de Malik Ibn Dinar.
(Ensuite, il se mit à me raconter à nouveau l'histoire et le repentit de ce dernier.)
- Allah te pardonnera Bilal si tu es sincère ! Répéte t'il. Dieu dit : Demandez pardon à votre Seigneur; ensuite, revenez à Lui. Il vous accordera une belle jouissance jusqu'à un terme fixé, et Il accordera à chaque méritant l'honneur qu'il mérite. » Sourate 11 Verset 3).
- Mais comment savoir si je suis sincère ? Demandais je.
- Sois sûr que tu ne le fais pas parce que ta femme te l'a dit, ou parce qu'une personne te l'a suggérer mais parce que tu en as besoin, parce que dans ton cœur, il y a un vide et que tu as besoin de t'approcher de ton Seigneur.
- C'est exactement ce que je disais à ma femme, quoi que je puisse faire je ressens ce vide que nul créature ne peut combler, pas même elle. Lui confiais je.
Il émit un petit sourire avant de baisser la tête et ferma les yeux, comme s'il se remémorait un événement.
- Ya Bilal, dit-il sans lever la tête. Si Allah veut du bien pour quelqu'un oui..je.. je...je pense que quand Allah veut du bien pour quelqu'un alors IL soumet son coeur à la mélancolie. Au nom d'Allah, que mon cœur était tellement serré et triste que je me suis vu revenir vers Allah malgré moi. Wallahi j'étais tellement mal qu'au fond de moi rien ne m'allait, je volais, je couchais avec des filles, j'aggréssais, j'allais en boîte de nuit, je mentais et pour finir j'avais de l'argent illicite, beaucoup d'argent mais je n'étais pas heureux Bilal. C'était pas le luxe ou les filles qui me manquait mais je n'étais pas serein, j'avais pas cet apaisement. Souvent au milieu de la nuit, je sentais littéralement mon coeur se déchirait. Je souffrais et personne le savait. Puis j'ai rencontré ma femme, elle m'a aidé et m'a fait savoir que ce vide était lié au fait de mon éloignement envers Allah. Puis je me suis repentit, et aujourd'hui je suis dans un bonheur, dans une sérénité et dans un repos que seul Allah SWT connaît. Leva t'il enfin son regard avec les larmes aux yeux.
-.....
Je ne savais que dire ! Je l'enviais, car de là où je suis, je sens le bonheur et la reconnaissance qui émane de ses paroles.
- Tu sais Bilal Quand ton amour sera l'amour d'Allah, lorsque tu seras passionné par Allah, tu aimeras Allah, tu te rapprocheras d'Allah, l'esprit se mettra à attirer ton corps vers Allah. Le vide sera plein et toutes les difficultés seront surmontées. Car tu n'auras plus qu'un seul but : Allah. Dit-il lorsque des larmes remplirent son visage. IL aurait pu prendre mon âme pendant que je volais, que j'aggressais, que je commettais la fornication mais IL m'a épargné alors que d'autres en sont mort, je ne peux être que reconnaissant. Allah est tellement patient. Soubhan'Allah.
Là il éclate discrètement en sanglot.
Moi, j'étais là, le fixant droit dans les yeux, immobile, sans aucune réaction. L'ambiance et la douceur de la foi qui s'éveillait de ses paroles me donnait moi-même une sensation de bien-être.
Lorsqu'il s'est calmé, je lui tends un paquet de mouchoir que m'avait amené Ihsane.
- Mon frère ! Je te souhaite vraiment la guidée, le coeur ne peut ressentir le frémissement et sa douceur qu'une fois qu'il a gouté à la saveur de la croyance et que la lumière de la foi y brille à ses quelques mots : La Illaha Ill'Allah Mouhamada RassouLoulah ! Dit-il en pointant son index vers le ciel.
Les larmes me montérent aux yeux et je baissais la tête à mon tour.
- Veux-tu faire tes grandes ablutions ?
J'hochais la tête.
Il me fit signe de le suivre et se débrouilla pour m'amèner dans les toilettes du personnel. Je fis les grandes ablutions tels que Ihsane me l'avait appris et ensuite mes petites ablutions. Pour chaque partie de mon corps, je pensais aux péchés qu'ils ont commis alors j'avais la ferme intention qu'en me lavant je me débarrassais des souillures.
Ensuite je m'habillais d'un qamis blanc. Et cet instant là coincida au moment où les detenus sont retournés en cellule.
Je ne sais pas comment Cheikh a fait mais il m'a amené en cellule d'isolement, où il n'y avait personne et m'a donné une torche pour éclairer cette dernière étant donné qu'il y faisait nuit noir.
Il me posa mon tapis en direction de la qibla.
- Tu peux y passer la nuit si tu veux !
- Comment t'as fait ?
- T'inquiète, avec les autres gardiens on se soutient et toi-même tu sais que le directeur de prison ne traîne jamais par là. Explique t'il.
- D'accord. Merci Cheikh, pour...pour tout !
- Je t'en prie ! T'aurais pas besoin d'appeler Ihsane après ?
- Avec quoi ? Demandais je incredule.
- Prends ce téléphone, je ne l'utilise pas vraiment, il y a du crédit.
- Non....
- Vas-y prends le mec, c'est un téléphone simple voyons.
Il prit ma main et y déposa le téléphone.
- Merci beaucoup. Lui fis-je un câlin d'homme.
- Je t'en prie, le numéro d'Ihsane y est d'ailleurs. Elle me l'a donné pour au cas où.
- Ah D'accord. À demain !
- In sha Allah ! Dit-il en fermant la cellule avant de s'en aller.
Je dépose la torche dans un coin et posa le téléphone non loin du tapis.
Je m'asseyais pendant une dizaine de minutes à réfléchir.
Je pris le dictaphone et par hasard, j'appuyais sur un bouton et un audio s'intitulant : " Oh ! Si j'avais su" se mit en lecture.
Quelques secondes plus tard, je me mis à pleurer en même tant que le prêcheur. À la fin de cet audio, je déposais le dictaphone par terre et me mit debout.
Je pris mon souffle et levais mes mains.
- Allahou Akbar...
Je ne pouvais plus continuer, mes larmes se précipitérent sur mon visage et ma gorge se noua.
La sensation de bien être que j'avais dés lors où j'ai prononcé mes mots, était tout simplement indescriptible. Comme un vent d'apaisement, ces mots ont percés mon coeur.
J'essayais de parler pour reciter la Sourate Al-Fatiha mais je n'y arrivais pas.
Je pleurais, je suffoquais et je perdais mon souffle. Je n'y arrivais pas. Mes larmes me brouillérent la vision et je me sentis molle, n'arrivant plus à tenir mon corps.
Je me laissais alors tomber sur le tapis, en position à genoux, la tête baissée, je sanglotais, je pleurais tellement que parfois je ratais quelques souffles.
En mon fort intérieur, j'entendis comme si on me disait :
[<Ô Serviteur d'Allah SWT, si Allah ne voulait pas ton bien, il te laisserait dans l'insouciance et les passions, Il te donnerait toutes les facilités dans cette dunia afin que ton pauvre cœur s'ancre et s'attache à ce bas monde maudit. Peut-être que tu n'aurais même pas le temps ni l'envie de penser à ton Seigneur !
Voilà pourquoi Allah t'a très tôt et durement éprouvé. Non pas pour te briser mais juste afin que tu connaisses la valeur de la foi, et que ton coeur ne soit pas trompé par le mirage de cette vie. Les épreuves, les difficultés, les déception et les pertes sont des grâces d'Allah. Et c'est Allah qui sait alors que tu ne sais.
Reviens vers Ton Seigneur, répents toi et Glorifie ton Seigneur.>]
Je mis encore du temps avant de me prosterner au sol :
« Ô mon Seigneur, j'ai été négligent, j'ai commis des péchés et je n'ai pas accompli mes devoirs envers Toi, j'ai transgressé Tes droits et j'ai été injuste envers moi-même. Le diable qui m'accompagne a triomphé, ma passion a dominé et j'ai été tenté par mon âme, grande incitatrice au mal. Je me suis trop reposé sur Ta patience immense, Ta générosité, Ta compassion et Ta miséricorde. Je viens maintenant vers Toi en me repentant, en regrettant et en implorant Ton pardon. Pardonne-moi, absous mes péchés, excuse mes fautes et mes manquements et efface mes péchés. Je n'ai d'autre Seigneur que Toi et nulle divinité n'est digne d'être adorée en dehors de Toi.
Ô Seigneur, si mes péchés sont énormes, Ton pardon est encore plus grand et plus vaste.
Pardonne moi ! Pardonne moi ! Pardonne moi ! »
Répétais je sans cesse avant d'éclater en sanglots.
Ayant besoin de parler à ma femme, je pris le téléphone, recherche son nom et l'appelait aussitôt.
- As Salamou Aleykoum Cheikh ! Dit ma femme juste après avoir décrocher.
- Wa Aleykoum Salam Ihsane !
- Bilal ? S'exclame t'elle. Ça va ?
- Ihsane..tu sais.... Le cœur remplit de péchés avant le repentir et le retour vers Allah c'est comme une pièce sombre, tu entres dans la pièce sombre où le noir t'enveloppes, tu cherches avec tes mains l'interrupteur et quand un de tes doigts le touche et que tu appuis dessus doucement, la lumière émise par la lampe transforme la noirceur profonde en une lumière éclatante. C'est pareil pour le coeur assombri par les péchés s'il est touché par la lumière de la guidée , la lumière du pardon et la lumière de la miséricorde du Seigneur de la terre et des cieux. Par Allah , la noirceur se transforme en lumière et l'étroitesse se changera en aisance, en apaisement, en joie et épanouissement.
Par Allah, Ô Ihsane, j'ai fait à mon Seigneur la promesse que je ferais de mon mieux pour être un bon serviteur. Et j'atteste qu'il n'y a pas point de divinité en dehors Allah ! Pleurais-je.
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Le repentit de Malik Ibn Dinar est posté dans mon oeuvre "Rappels Islamiques" ...)
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