Hating, Craving, Falling

By VicArroyo

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| Gagnant Wattys 2018, catégorie « Acteurs du changement » | Si Charly Sanders est bien sûre d'une chose, c'... More

Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
Chapitre 26
Chapitre 27
Chapitre 28
Chapitre 29
Chapitre 30
Chapitre 31
Chapitre 32
Chapitre 33
Chapitre 35
Chapitre 36
Chapitre 37
Chapitre 38
Chapitre 39
Chapitre 40
Chapitre 41
Chapitre 42
Chapitre 43
Chapitre 44
Chapitre 45
Chapitre 46
Chapitre 47
Chapitre 48
ÉPILOGUE
Bonus - Lettre
Playlist Hating, Craving, Falling

Chapitre 34

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By VicArroyo

Aujourd'hui, toute l'agence assiste à une formation assurée par un intervenant extérieur sur la sécurité en entreprise. Pendant une heure, je me retrouve presque collée contre Chloé dans une salle non dimensionnée pour accueillir tout ce monde, et si ce n'est pas la définition même de la torture alors faites-moi avaler un dictionnaire !

Betty n'a jamais été aussi près de la réalité en parlant d'électricité entre nous. J'ai du mal à me retenir de la toucher, ça en devient maladif, et ça m'énerve d'avoir tant de difficultés à garder le contrôle de moi-même. Ça ne me ressemble pas du tout.

Lorsque la présentation se termine, l'intervenant s'en va et je pense être libérée. Mais c'est sans compter sur Joanne qui souhaite prendre le temps de débriefer. Cela prend des heures et je suis à deux doigts de péter un câble. Finalement, c'est le comportement de Chloé qui m'offre une distraction.

Je la vois pianoter discrètement sur son téléphone et ça m'énerve. Voilà pourquoi je déteste les nouvelles technologies. Les gens ne peuvent s'empêcher de coller leur nez dessus. J'imagine que c'est important si elle l'utilise en pleine réunion, mais ça reste impoli. J'ai le réflexe d'essayer de lire ce qu'elle écrit, mais je détourne rapidement les yeux. Cela ne se fait pas, et de toute façon je ne distingue rien.

Soudainement, son écran s'éclaire et je sens son corps se tendre. Ses doigts se contractent autour de son téléphone et ses jambes entament une samba sous la table. Elle lève la tête et semble prendre conscience de l'auditoire, un air contrarié sur le visage. Je ne sais pas ce qui lui arrive mais son agitation soudaine n'est pas sans me rappeler une cocotte-minute vibrante sur le point d'exploser sous la pression. Elle le lève finalement en s'excusant de devoir prendre l'appel et sort de la pièce.

J'ai l'impression de respirer pour la première fois depuis le début de la réunion et profite de l'espace qu'elle laisse pour m'étirer un peu. Je tente de me reconcentrer sur le sujet, mais j'ai perdu le fil et les allers-retours incessants de Chloé devant la porte me rendent chèvre. Elle aurait pu aller téléphoner plus loin. Comme un morceau de métal attiré par un aimant, mes yeux ne peuvent s'empêcher de suivre sa silhouette contractée. De ce que je vois, je n'aimerais pas être la personne au bout du fil.

Après quelques minutes, Chloé se réinstalle silencieusement sur sa chaise collée à la mienne. Elle tente de garder une certaine contenance, mais je la vois frémir. J'aperçois Joanne lui lancer un coup d'œil avec une pointe d'interrogation dedans. Elle semble au courant de ce qu'il se passe, et je me surprends à ressentir une pointe de frustration de ne pas être au fait de la situation. Pourtant, il n'y a absolument aucune raison pour que ça soit le cas, et je replonge le nez dans mon carnet rempli de gribouillis.

À côté de moi, Chloé se tient droite comme un piquet. Totalement naturel comme position...

Je ne saurais dire ce qu'il se passe dans sa tête à cet instant précis, mais elle a vraiment l'air à fleur de peau. Elle ressemble à une grenade venant d'être dégoupillée, prête à tout ratisser sur son passage.

Des fourmillements dans ma jambe viennent parfaire ce moment des plus agréables. J'exécute une petite danse discrète sous la table pour essayer de m'en débarrasser et cogne le genou de Chloé.

– Pardon, m'excusé-je d'un souffle presque inaudible.

Par réflexe, je pose ma main sur sa cuisse pendant une demi-seconde pour l'écarter, mais ce contact me fait réaliser que ma jambe était collée à la sienne depuis son retour.

Rapidement, je me rends compte que la légère vague de chaleur que provoquait sa cuisse sur la mienne me manque. Je replace alors ma jambe contre la sienne. Sur un malentendu, ça peut passer.

Et ça passe.

Elle ne se décale pas, elle exerce même une infime pression, presque imperceptible. Je ne sais pas si c'est voulu ou si ça relève du réflexe, mais je décide de choisir la première hypothèse. Car les fourmis qui occupaient ma jambe se transforment alors en papillon venant se loger au creux de mon ventre.

***

Ce vendredi, le bowling est ouvert aux personnes extérieures à l'agence. J'ai donc convié Pauline, puisque ça fait une éternité que l'on n'a pas partagé une activité du genre, et je sais qu'elle adore ça.

La route de Passy commençant à être encombrée par les touristes, j'évite les allers-retours et décide de me rendre directement au bowling après le travail. Je me pose au comptoir pour prendre une bière en attendant que Pauline me rejoigne. Quand elle arrive, j'ai à peine le temps de lui dire bonjour qu'elle repère immédiatement qu'il y a un problème. Elle a un radar à la place du cerveau et identifie ma mère comme la source de mon stress en moins de trois minutes. Un record. Je lui résume la situation, et sans grand étonnement, elle soutient ma décision. Savoir qu'elle sera là pour me ramasser à la petite cuillère si ça se passe mal me rassure énormément, et c'est exactement pour cela que je l'aime autant.

Betty, Agnès et Samy arrivent ensemble, une heure et quelques verres plus tard. Nous réservons les pistes tandis que chacun apparaît au compte-gouttes. Je présente ma meilleure amie à l'assemblée et compte sur Betty pour la mettre à l'aise.

Malgré la possibilité d'inviter du monde, nous sommes moins nombreux qu'à l'accoutumée. La plupart des collègues profitent de leurs congés, en prévision des vacances de Noël où nous sommes souvent mobilisés. Seuls quelques chanceux peuvent prendre la semaine entière, alors on anticipe pour équilibrer le service.

J'aperçois Adeline se dirigeant vers nous et lui fait un signe avant d'aller à sa rencontre, mais mon sourire se crispe légèrement en voyant Chloé à son bras.

– J'avais oublié ce détail, marmonné-je à Pauline.

– Je croyais que vous aviez discuté de vos relations respectives.

– Pas vraiment.

En fait, à aucun moment je ne me suis posé la question de sa situation actuelle et je ne sais pas vraiment comment je me sens face à cette information. J'ai un peu l'impression d'avoir été prise pour un jouet, mais en toute honnêteté, je ne peux pas dire que ça m'ait vraiment dérangée...

Je repense à notre nuit passée ensemble, aux heures remplies de nos histoires, et puis ses soupirs, nos caresses, et le bien-être que j'ai ressenti à ses côtés. Il y avait quelque chose de particulier dans tout ce qu'on a partagé. De réel.

Pauline les observe se séparer pour saluer tout le monde.

– J'avoue qu'à chaque fois que je les vois ensemble, ça crève les yeux.

– Merci du soutien, sifflé-je.

Pauline hausse les épaules tandis qu'Adeline s'arrête à notre niveau pour nous dire bonjour. De son côté, Chloé fait le tour des présents, ayant elle-même été absente aujourd'hui. En arrivant vers moi, elle m'embrasse près de la mâchoire qui ressemble plus à un petit bisou dans le cou.

À quoi elle joue ?

À voir le regard suspicieux que me lance ma meilleure amie, la même pensée lui a traversé l'esprit, mais je décide que nous sommes venues pour nous amuser, et je n'ai pas envie de commencer à décortiquer le moindre de ses faits et gestes. Je m'en fiche, non ? C'était ça le principe, il me semble.

Le courant passe immédiatement entre Pauline et mes collègues qu'elle n'avait pas encore rencontrés, mais je n'en doutais pas une seconde. Nous prenons place sur deux pistes accolées et entamons la partie. Je joue en troisième, en même temps qu'Adeline. Nous lançons la boule presque simultanément et la mienne suit miraculeusement une ligne droite pour aller éclater le tas de quilles. Toutes celles de gauche tombent tandis qu'il en reste quatre debout. Mon deuxième tir vient les coucher et je brandis mon poing en l'air en signe de victoire.

– Yes ! Ou comment bien commencer la soirée !

Betty récupère sa boule et me tape dans la main. Je jette un coup d'œil sur ma voisine, malheureusement elle a enchaîné deux gouttières.

– Tu es plus chanceuse que moi, déclare-t-elle bonne joueuse.

– La chance du débutant ! Le prochain tour c'est pour toi.

– Lèche-cul ! m'accuse Pauline en chuchotant pour que je sois la seule à l'entendre.

Je lui enfonce mon coude entre les côtes en guise de réprimande, mais je n'en pense pas moins. En croisant le regard de Chloé, elle me fait un clin d'œil et lève son pouce en l'air avec un grand sourire. Une vague de chaleur parcourt mon corps et je lui rends son sourire. Je sens que je vais passer une bonne soirée !

Au vu du niveau de chacun, on lance une règle pour pimenter le jeu. À chaque fois qu'on enchaîne trois gouttières, on paie notre tournée. Samy est actuellement en train de se saisir de son portefeuille... On commande tous de la bière, sauf Pauline qui doit rentrer tôt.

– Je suis tellement contente que tu sois là, mon Poulin !

Son rire ravit mes oreilles et je lui offre une accolade pour appuyer mes paroles. Avec son boulot, et ses horaires infernaux, on arrive à peine à se croiser et on n'a pas vraiment l'occasion de faire grand-chose d'autre que bavarder avachies sur son canapé, sur le mien, ou autour d'un verre de soda au réfectoire de l'hôpital. Et encore, c'est quand j'accepte de me farcir le trajet.

La partie resserre les scores, et chacun essaie de dépasser la personne à sa tête.

– Mate, elle a dézingué une quille !

Pauline m'enlève les mots de la bouche. Voir Adeline galérer autant à marquer des points – quand elle ne fait pas simplement chou blanc – m'amuse beaucoup et je ne manque pas de le faire savoir.

Betty siffle soudainement en observant le tableau des scores.

– Ben dis donc, ma jolie Charly, la chance semble te sourire ce soir !

Je ris en mimant une fausse révérence, provoquant une grimace amusée sur son visage. Je me tourne vers Adeline et la taquine sur ses talents cachés tandis qu'elle ronchonne amicalement.

– Tu ne peux pas lui enlever qu'elle est bonne joueuse ! admet Pauline en se saisissant de sa boule orange.

Elle passe en même temps que Chloé, et toutes deux réalisent le même score, exactement de la même façon, ce qui déclenche une vague de rires et de commentaires surpris. Chacun trinque avec elles pour marquer l'exploit, mais quand je m'approche du verre de Chloé, deux noisettes me transpercent avec un air entendu. Ce même air qu'un prof qui t'apprécie te sert pour te dire « attention, ne pousse pas trop le bouchon, sinon la prochaine fois, c'est ton carnet » quand tu fais un peu trop le mariole.

– Aurait-elle peur que tu te rapproches trop de sa meuf ? me glisse Pauline ironique.

Je me demande toujours comment elle fait pour avoir les yeux partout, celle-là. Je ricane tout en entrant dans son jeu :

– Mais... serait-elle... jalouse ?

Cette pensée me fait rire intérieurement.

– Si quelqu'un doit se méfier, c'est plutôt Adeline, du coup.

Je hausse les épaules, indifférente.

– Ce n'est pas vraiment mon problème en même temps. Et puis je ne compte pas remettre ça.

À la fin de la partie, Pauline quitte le navire et Agnès décide de partir avec elle. J'enlace ma meilleure amie, un peu triste de ne pas pouvoir prolonger cet excellent moment avec elle, rythmé de nos commérages. On se promet de remettre ça rapidement.

La soirée continue au milieu des rires et du bruit des boules qui heurtent le sol et cognent les quilles. Enfin, quand ça arrive, car elle a beau essayer, Adeline reste à la queue du classement. Je ne me lasse de la taquiner, c'est beaucoup trop drôle. Mais je crois qu'elle commence à en avoir marre. Pour la deuxième fois de suite, elle paye sa tournée.

– Sponsor officiel de la soirée bowling ! Fais gaffe, tu vas trouer ton portefeuille avec des scores pareil !

Chloé me coule un regard condescendant.

– Dans tous les cas on tournera ! Ne t'inquiète pas, va, ça sera bientôt à toi de payer ta tournée.

– Ah, ben vu mon score, je crois que j'assure toutes mes boissons à l'œil, là !

En effet, coup de chance ou coup de pouce du destin, j'enchaîne les strike et les spare et me positionne en tête du classement, bien au-dessus des autres. C'est tellement rare que j'en savoure chaque seconde.

– Mmhh, elle a un petit goût de défaite cette bière ! dis-je en trinquant avec mes collègues.

Oups, j'ai parlé un peu fort et je crois que la moitié du bowling m'a entendue. Forcément, c'est pile quand ma blague tombe un peu à l'eau, mais par chance la musique d'ambiance a partiellement couvert ma voix. Dommage que Pauline soit partie, j'ai perdu mon audience, ou mon soutien, au choix.

Adeline sourit en soupirant.

– Ouais, ce n'est vraiment pas mon truc le bowling. Enfin tous les trucs avec des boules, d'ailleurs.

Je me mets à rire. Très bon jeu de mots !

– J'ai testé la boule lyonnaise, c'était une catastrophe, ajoute-t-elle sans réagir.

Ah.

Bon.

Ce n'était pas fait exprès alors. Je dois avoir l'esprit mal tourné ce soir.

– C'est Charly qui est douée à la pétanque ! mentionne Betty.

– J'avoue, on a fait péter les scores le week-end dernier, laissé-je échapper avant de m'en rendre compte.

Je regarde Chloé avec des yeux écarquillés. Peut-être Adeline n'était-elle pas au courant que nous nous sommes vues ? Est-ce que je viens de larguer une énorme bombe dans leur couple ? Mais le bruit des quilles me détourne de mes pensées et je réalise qu'Adeline n'a pas l'air stupéfaite pour le moins du monde. Noisettes avait dû la tenir au courant. Peut-être même ont-elles une sorte d'arrangement ? Je n'ai rien contre les couples libres, mais ai-je réellement envie d'être la troisième roue du carrosse ?

C'est au tour de Chloé de payer sa tournée. Nul besoin de prendre commande auprès de nous, on s'est à peu près tous mis d'accord pour boire la même chose toute la soirée. L'alcool commence à altérer mes capacités, mais coule chaudement dans mes veines et je sens une légère douleur s'installer dans mon crâne. Je profite du flottement pour lancer ma boule sans grande conviction. Par miracle, celle-ci atterrit à peu près au centre de la piste. J'ai vraiment une chance de cocue ce soir ! Heureusement que je suis célibataire, sinon j'aurais des questions à me poser.

De retour vers la table, Betty me sourit et se prépare à jouer. Je m'assieds à sa place tandis que le serveur apporte les commandes. Pendant qu'il débarrasse son plateau de nos verres de bière, Chloé se saisit d'un diabolo grenadine qu'elle pose théâtralement devant moi.

– Désolée, ils n'avaient plus de jus d'abricot.

Je ricane, saisissant la référence. Pourtant, là où j'aurais habituellement trouvé ça hilarant, je sens une pointe piquer ma poitrine. Comme si je me sentais personnellement attaquée.

J'entends tout le monde rigoler en se demandant quelle est la private joke qu'ils ne saisissent pas, et soudainement mes oreilles se mettent à bourdonner.

Je saisis le verre et ris pour donner le change.

– Rien qui ne puisse s'arranger avec un peu de pastis et quelques glaçons !

Elle capte mon regard et l'accroche de ses noisettes réfléchissant les néons roses.

– Ça serait peut-être bien que tu fasses une pause, dit-elle calmement, presque avec un sourire, hochant le menton en direction de mon verre. Tu commences à devenir un peu conne, c'est dommage.

Je hausse les sourcils en cherchant une remarque acerbe à lui répliquer, mais l'angoisse que je sens monter en moi me fait perdre mes moyens. Et je me retrouve sans rien à redire, ne comprenant pas ma réaction.

Je vois mes collègues esquisser des sourires, mais ils ont l'air d'approuver.

À l'intérieur, une tempête se prépare, mais je ne veux pas le montrer. Je grince des dents et la remercie avec amertume avant de m'excuser pour aller aux toilettes.

Je me jette un peu d'eau froide sur les joues pour me rafraîchir et me frotte le visage vigoureusement.

Pourquoi est-ce que l'action de Chloé me vexe tant ? Je n'ai pas pour habitude de mal prendre les petites blagues. Je suis d'ailleurs la première à m'adonner à ce loisir. Mais depuis que je lui ai confié ma part la plus sombre, la peur a resurgi. Celle d'être constamment jugée, celle de sentir que je ne suis pas assez. Pas assez bien, pas assez intelligente, pas digne d'être appréciée. Et j'ai beau essayer de repousser ces pensées, de rester objective, je n'y parviens pas. Malgré tout ce temps à essayer d'effacer les mots proférés par mon père pendant des années, leur écho me revient encore parfois comme des boomerangs que je ne peux maitriser. Alors je me contente de prendre les coups en passant au mode automatique, puisque je suis incapable de comprendre ce qu'il m'arrive ce soir.

Je vide ma vessie pleine de bière et reviens en essayant de reprendre un peu de contenance. Quelques collègues nous abandonnent en fin de partie, et nous décidons d'en faire une dernière avec ceux restants. Nous n'occupons plus qu'une piste, et c'est Adeline qui casse les premières quilles. Seules deux restent debout.

– Ah d'accord, donc tu attends que la moitié de l'agence parte pour enfin commencer à jouer !

Adeline lève les yeux au ciel et je m'affale sur un des sièges en plastique rouge.

– Elle dit qu'elle a du mal avec les boules, mais elle a juste besoin d'un peu d'intimité pour se dévoiler, murmuré-je à ma voisine en mimant un geste peu catholique avec mes doigts.

Je m'esclaffe et me tourne vers Betty, une main en l'air, pour toper à ma blague, mais elle me fixe avec les sourcils froncés, le regard rempli de... pitié ?

Et merde !

Je me redresse et tente une accolade histoire de montrer que je plaisante, mais elle me repousse gentiment avec un faux sourire, me demandant, en gros, de lui foutre la paix.

Je laisse retomber ma main en blêmissant et reprends mon verre pour me cacher dedans, bénissant secrètement Chloé de ne pas m'avoir redonné de bière.

Mon cerveau part en roue libre et je perds totalement le contrôle de moi-même. Quelle conne je suis ! Heureusement que je n'ai pas dit ça tout haut pour une fois.

Qu'est-ce qu'il me prend à faire le genre de blagues graveleuses que je déteste en temps normal ? J'ai l'impression que mes pensées et mes actions ne concordent plus. Le filtre n'est plus actif et je me retrouve à sortir des énormités pareilles.

La honte.

Je suis en train de complètement m'afficher auprès de mes collègues, et surtout auprès de Chloé. Si elle commençait à m'apprécier, ça risque de la refroidir direct.

Mais en même temps, qu'est-ce que ça peut me faire ? Ce n'est pas comme si j'étais attachée à son avis. De toute façon, Chloé est bien trop occupée avec une autre pour me prêter attention.

Je reste en retrait des autres, honteuse, attendant que ça soit mon tour de jouer. Mais j'ai juste envie que ça s'arrête. Le cœur n'y est plus, et pour la première fois depuis longtemps, je préférerai être tranquille chez moi plutôt qu'ici entourée de mes collègues.

La partie se termine enfin, et je décide de rentrer sans demander mon reste. Je sens la fatigue monter et je me concentre sur la route pour ne pas dévier de ma trajectoire.

Chez moi, je m'effondre dans mon lit, l'esprit encombré. Je me sens bizarre, mais je suis incapable de poser un mot sur cette sensation. J'étais censée passer un bon moment, et pourtant j'en garde un goût amer. Je m'en veux pour mon comportement, mais en y réfléchissant un peu, toute la soirée a été étrange.

Artémis tarde à me rejoindre, et je ronchonne, me demandant où il est encore passé. Je me blottis sous ma grosse couette, attendant impatiemment son retour. Je n'ai jamais autant besoin de mon chat que quand mon cœur tente de me communiquer des messages que je ne comprends pas. Pourquoi est-il tout fripé, tout froissé et si lourd ? Plus la soirée avançait, et plus j'avais l'impression d'être une étrangère face à une horde de gens ne saisissant pas un mot de ce que je pouvais dire.

Finalement, je sens mes paupières me brûler, signe que je ferais mieux d'arrêter de lutter et rejoindre les bras de Morphée. J'en conclus donc que l'étrangeté de cette soirée était due à ma fatigue et que ça ira mieux demain. Sur cette pensée, et sentant enfin une boule de poil se blottir contre moi, je me laisse sombrer.

*******

Bonjour, 

J'espère que la lecture de ce chapitre vous a plu. Grand bazar dans la tête de Charly... Comme d'habitude haha

A demain pour la suite !

xx

Victoria

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