Pourquoi est-ce cette mélodie en particulier me restait en tête seulement après avoir perdu la personne avec qui je m'entraînais? J'ai jeté un regard au piano de l'autre côté de la pièce en me recouchant sur le canapé. Quand j'avais été expulsé, j'avais jeté la touche de piano qui appartenait à ma mère, la seule chose que j'avais sauvée des cendres de ma maison. La touche de piano était à moitié brûlée. Je l'avais jetée par la fenêtre de mon appartement. Je pensais qu'en faisant ça, cette chanson me sortirait de la tête. Je me suis répété, comme toutes ces années auparavant, que je ne toucherais plus jamais un piano.
Tôt le lendemain matin, j'avais couru dans les escaliers, incapable d'attendre l'ascenseur. Je pensais que je m'étais endormi brutalement, mais le soleil s'était déjà levé. Ce que j'avais fait la nuit précédente ont soudainement envahi mes pensées. Le lit de fleurs sous ma fenêtre était vide. Quand j'ai demandé au gardien, il m'a dit que le camion poubelle était déjà passé, et c'est comme ça que j'ai perdu la touche du piano de ma mère.
J'ai abandonné la musique un nombre incalculable de fois après ça. Je ne le ferai pas. Je ne reviendrais pas. La musique n'est rien. Mais même en m'enfuyant, je savais. Je savais que je retournerais vers la musique. Comme la raison pour laquelle je descendais ces escaliers en trébuchant, la musique était quelque chose dont je ne serai jamais capable de me défaire. Au fond, j'étais aussi libre qu'une personne qui souffrait. J'étais confus, mais j'étais en même temps lucide. La peur et la confiance, l'espoir et le désespoir, je vivais entre ces émotions contradictoires.
Soudainement, j'ai été pris d'une envie irrésistible de jouer au piano. Je voulais reconnaître le moi qui prétendais être fort malgré la réalité qui prouvait que j'étais un lâche peureux. Je voulais répandre des calamités, infliger des coups, frapper, détruire, tenir et pleurer. Mais je ne voulais pas m'enfuir. Je voulais finir la mélodie de piano qui hantait mes pensées chaque jour. Pour une fois, j'avais l'impression que je pourrais le faire.