- Maman ! Maman ! héla James en faisant rentrer Sirius, un bras sur son épaule. Regarde qui est là !
Mrs Potter, une femme aussi mince que James et à l'allure aussi gracile sortit de la cuisine un chiffon dans les mains, visiblement affairée. Mais, dès qu'elle aperçu Sirius, son visage s'éclaira et elle s'approcha de lui à bras grands ouverts.
- Sirius ! Quelle bonne surprise. Comment vas-tu ?
- Très bien et vous ?
- Ca va, ça va. James n'a pas été encore trop dissipé pour une première semaine de vacances, fit-elle en montrant son fils d'un regard moqueur.
- C'est parce que je n'étais pas là, se contenta de lancer Sirius avec ironie.
Mrs Potter éclata de rire et lui caressa la joue. Le jeune homme n'avait jamais été féru de démonstration affectueuse devant tout le monde –il y était bien trop peu habitué- mais avec la mère de James, c'était différent. Ce simple geste démontrait tout l'amour qu'elle lui portait et signifiait qu'elle le considérait comme son propre enfant.
Le regard de Mrs Potter se porta sur la valise de Sirius et elle comprit subitement que le jeune homme n'était pas simplement venu rendre une visite pour l'après-midi à James.
- Que s'est-il passé ? demanda-t-elle avec un froncement de sourcil.
- Les avis opposés habituels, répliqua Sirius avec un sourire triste.
- Alors monte vite mettre ta valise dans la chambre d'amis, s'exclama-t-elle en tentant de prendre une voix enjouée pour le rassurer. Moi je dois aller finir ce gâteau avec Mindy.
Sirius hocha la tête et attrapa son énorme malle, tandis que James lui emboîtait le pas. Bien que la maison des Potter fut gigantesque, elle n'était pas aussi spacieuse que le 12 Square Grimmaurd. Cependant, le jeune Black aurait donné cher pour pouvoir échanger ne serait-ce qu'une journée de domicile avec son meilleur ami. Sa demeure était accueillante et décoré avec énormément de goût. Elle n'avait rien à voir avec les salles sombres où les instruments de magie noire se superposaient les uns sur les autres comme chez Sirius.
Parfois, le jeune homme rêvait d'être à la place de James. Il était curieux de voir à quel point ils se ressemblaient tout en étant sensiblement différents. James et lui avaient le même caractère et certains traits physiques identiques. Pourtant, ils n'avaient jamais eu véritablement la même vie. Mr et Mrs Potter étaient certes très riches grâce à leurs héritages familiaux mais ils ne faisaient jamais étalage de leur richesse. C'était des gens simples, accueillants et d'une générosité sans borne. James tenait d'eux sa bonté et sa gentillesse.
Ils avaient toujours été tous les trois très unis : c'était une famille moderne et tolérante, qui n'avait aucuns soucis avec les Moldus ainsi que les nés-Moldus. Et Sirius enviait cette mentalité qui lui avait toujours fait défaut au sein des « siens ». James avait connu le vrai amour maternel, la complicité paternelle ; il avait été si gâté, si choyé, qu'il était une personne pleine d'assurance et légère. Sirius, lui, s'était toujours senti à part de n'importe quel côté où il se positionnait. Comme s'il était systématiquement de trop.
- Alors, fit James en ouvrant la porte de l'une des chambres d'amis, tu te casses définitivement de chez toi ?
- Et bien si ça ne dérange pas tes parents... commença Sirius, gêné.
- Voyons, mec ! s'exclama son meilleur ami en s'ébouriffant les cheveux. Tu sais aussi bien que moi que Maman a limite un calendrier où elle marque les jours pour savoir quand tu atterriras chez nous.
Patmol eut un léger rire mais son esprit ne partageait pas la même joie que James. Il ne pouvait pas comprendre... même si Sirius savait au fond de lui-même qu'il avait fait le bon choix, il laissait de côté sa famille, de nombreux souvenirs. C'était un déchirement quoi qu'il puisse en dire, même s'il tentait de se mentir à lui-même.
James eut l'air de comprendre sa gaffe et s'empressa de changer de sujet :
- On replante la tente ce soir, hein ? dit-il d'un ton enjoué en bondissant sur le nouveau lit de Sirius.
- Bien sûr mon vieux, répliqua l'intéressé visiblement enchanté.
Puis ils descendirent quatre à quatre le grand escalier en chêne et déboulèrent dans la cuisine où Mrs Potter s'affairait devant les fourneaux, aidée de Mindy, l'elfe de Maison.
- Tu essaies encore de cuisiner ? demanda James d'un air sournois à sa mère. Quand est-ce que tu abandonneras Maman ?
- Une Gryffondor n'abandonne jamais ! s'exclama Mrs Potter avec virulence. Et puis, je ne suis pas si nulle que ça... hein Mindy ?
- Oh oui Madame ! s'empressa de répondre le petit elfe en se courbant.
- Voyons Mindy, ne lui ment pas ! fit James d'un ton moqueur. Ou sinon un jour elle risque de tous nous empoisonner.
Sirius ne put s'empêcher de pouffer tandis que Mrs Potter administrait une légère tape sur le haut de la tête ébouriffée de son fils.
- Au fait Maman, Sirius et moi campons dans le jardin ce soir, dit James tout en sortant un énorme paquet de Chocogrenouilles d'un des tiroirs d'un mouvement de baguette magique.
- Vous n'êtes pas trop vieux pour ça ? questionna sa mère en haussant les sourcils.
- On n'est jamais trop vieux pour dormir à la belle étoile ! Hein Sirius ?
L'intéressé hocha vivement la tête, la bouche pleine de chocolat.
- Allez viens, s'exclama James en le tirant par le bras. On va aller chercher la tente dans la cabane.
- Hé oh ! fit Mrs Potter en montrant le sachet de Chocogrenouilles d'un air accusateur. Cela te dirait-il de ranger derrière toi ?
L'adolescent soupira et sortit sa baguette en soupirant. Puis alors que le paquet voletait jusqu'au placard, sa mère le regarda, les mains sur les hanches :
- Un jour je t'enlèverai cette baguette magique et tu te sentiras nu comme un ver ! Ah, les garçons, soupira-t-elle à l'intention de Mindy tandis que James et Sirius s'enfuyaient en courant tout en pouffant de rire.
Après avoir pris tout ce qui leur servirait à monter la tente et à l'aménager, Sirius et James traversèrent le grand jardin de la maison des Potter et décidèrent d'installer la leur tout au fond, le long de la clôture qui longeait un sentier tranquille.
- Puisqu'à présent nous pouvons utiliser la manière magique, fit Sirius d'un air songeur. Tu connais un sortilège pour monter cette tente ?
- Absolument pas, murmura son meilleur ami tout en s'ébouriffant les cheveux, en proie à une intense réflexion.
- C'est dans ces moments là qu'une Lily Evans nous serait utile, soupira Black.
En entant le nom de la jeune fille, James sursauta et se retourna violemment vers son meilleur ami :
- Et pourquoi ça ? questionna-t-il sèchement, sentant une pointe de jalousie l'envahir.
- Parce qu'être majeur et devoir se contenter de la manière Moldue, ce n'est pas génial, expliqua Sirius en haussant les épaules.
James se gratta la tête et se sentit rougir jusqu'aux oreilles. Il devait vraiment apprendre à contenir ses émotions. Mais c'était plus fort que lui : il l'avait à peine « quitter » depuis une semaine –la fin des cours à Poudlard- que déjà elle lui manquait. Elle accaparait son esprit jour et nuit. Il pensait à elle tout le temps : que faisait-elle donc chez elle avec ses parents Moldus ? Partait-elle en voyage ? Trouverait-elle un amour de vacances...
Sirius claqua des doigts sous les yeux de son ami qui sursauta brusquement.
- Hé, mon vieux, tu m'écoutes ?
- Hein ? Désolé, grogna James en détournant le regard. Tu disais ?
- Je disais qu'il y a quelqu'un près de la clôture, je crois qu'elle veut te parler.
Sachant très bien qui était ladite personne, James soupira, remit correctement ses lunettes et regarda en direction de la haie qui longeait le sentier pour voir la silhouette d'une personne lui étant étrangement familière depuis les quatre derniers jours.
- Oh non, pas elle, murmura-t-il en fermant les yeux.
- Qui est-ce ? questionna Sirius en fronçant les sourcils.
- Je t'expliquerai, marmonna son ami en agitant la main d'un air négligé.
Puis il s'avança en traînant le plus des pieds, main dans les poches, jusqu'à la clôture, Sirius sur ses talons. James ouvrit la petite porte en fer qui permettait de faire passer des gens par l'arrière du jardin. Une jeune fille entra et l'enlaça avec vivacité.
Sirius ne l'avait jamais vue, et pourtant cela faisait bien longtemps qu'il venait à Godric's Hollow. C'était une sorcière qui devait avoir leur âge mais il ne l'avait jamais vu non plus à Poudlard. Elle était très grande pour une fille, faisant la même taille que James qui mesurait plus d'1 mètre 75. Ses jambes étaient très longues, et ses cuisses très fines, comme put en juger discrètement Sirius en voyant la jupe écossaise qu'elle portait. Son visage ne lui disait absolument rien : ses cheveux bruns descendaient en cascade jusqu'en dessous de ses épaules, elle avait un visage fin aux pommettes hautes et des yeux en amande qui épousait ses traits.
L'adolescent dut avouer qu'elle était plutôt attirante. Elle semblait légèrement austère, avec ses vêtements impeccablement repassés, son menton levé et ses gestes rigides mais elle dégageait une certaine grâce, une élégance discrète. Il regarda James d'un air interrogateur : qui pouvait être cette mystérieuse jeune fille qui lui faisait un câlin pour le saluer.
- Emmeline, dit James avec un sourire faux, je te présente Sirius Black.
- Enchanté, fit l'intéressée.
Elle s'approcha de Sirius et l'enlaça également, ce qui le décontenança sur le moment. Mais l'expression exaspérée de James lui fit comprendre que c'était totalement normal, et il répondit à son accolade le plus dégagé possible.
- Je ne savais pas que tu avais de la visite aujourd'hui ! s'exclama Emmeline, et Sirius s'aperçut qu'elle avait un accent qui lui était inconnu.
- Et bien comme tu vois, c'est le cas, dit James avec assez de froideur pour faire court à la discussion.
- Ah, très bien, répliqua la jeune fille sans que son sourire disparaisse. Et bien je te laisse, je dois aller voir ta mère, elle voulait que l'on fasse un gâteau ensemble.
- C'est ça, oui, marmonna le Gryffondor tandis que l'adolescente s'éloignait en lui faisant des grands signes de la main.
Puis, il s'accroupit de nouveau dans l'herbe pour étendre la tente.
- Tu m'expliques ? questionna Sirius avec grand intérêt.
- C'est ma nouvelle voisine, grogna James en haussant les épaules.
- Elle a l'air plutôt sympa, répliqua le garçon.
- Elle n'est pas méchante, marmonna James, c'est juste qu'elle est tout le temps fourrer chez moi. Oh vous voulez que je vous aide Mrs Potter ? Oh comment allez-vous Mr Potter ? Oh bonjour James comment vas-tu depuis LES TROIS MINUTES DERNIERES ? Cette fille est une sangsue.
- D'où vient-elle ?
- Je crois avoir entendu ses parents dirent aux miens qu'ils étaient américains...
- Ce qui explique l'accent, conclu Sirius. Elle va étudier à Poudlard ?
- Aucune idée, dit James avec dédain, je ne lui ai pas demandé. Mais je n'espère pas. Elle est collante comme pas possible !
- Ce n'est pas ton genre d'être aussi désagréable envers quelqu'un que tu ne connais à peine. Sauf pour Servilus, mais lui, il a toujours été un cas à part.
- Tu devrais voir ses parents, de vrais snobinards...
- Et alors, ça ne fait pas d'elle une snob, fit remarquer Sirius qui n'avait jamais apprécié qu'on l'identifie à ses parents.
- Evidemment que non, s'empressa de rectifier James en comprenant là où il voulait en venir. Mais tu l'as bien vu : elle est ennuyeuse à mourir. Je t'assure : toujours propre sur elle, à se sentir obligée d'être polie... Elle ne se décoince jamais.
Sirius ne dit rien et se concentra de nouveau sur la tente. Mais un petit sourire apparut sur ses lèvres. James pouvait dire ce qu'il voulait, son meilleur ami avait bien remarqué la façon dont il avait fixé les jambes de la jeune Emmeline. Et bizarrement, il avait absolument tout critiqué chez elle. Sauf son physique.
* * *
Le soir arriva bien plus rapidement que le jeune Black s'y attendait. Chez lui, il s'ennuyait tellement qu'il était presque en train de compter les minutes. Mrs Potter avait préparé un excellent dîner qu'elle avait organisé dans le jardin, aidée de Mindy et d'Emmeline, et Mr Potter qui rentrait tout juste du Ministère insista pour que cette dernière reste manger avec eux, à la plus grande joie de James (ironiquement parlant bien sûr).
- Et donc, fit Mr Potter à l'intention d'Emmeline après qu'ils aient discuté de ce que faisaient ses parents, tu rentres à Poudlard cette année ?
- Tout à fait, dit la jeune fille en se resservant du dessert.
James qui était en train de boire sa Bièreaubeurre s'étouffa à moitié et jeta un regard noir à Emmeline qui ne le remarqua absolument pas.
- Ce serait chouette que vous soyez dans la même maison, n'est-ce pas James ? questionna sa mère avec un grand sourire.
- Absolument génial, grogna l'intéressé. Bon, on va peut-être aller se coucher, nous. Hein Sirius ? Il est déjà minuit passé.
- Déjà minuit ? s'exclama Emmeline. Je vais rentrer chez moi alors.
Elle se leva en même temps qu'eux et retourna dans la cuisine chercher un livre qu'elle avait oublié.
- Elle connait bien son job, cette petite, fit Mr Potter à voix basse en hochant la tête.
- Que veux-tu dire par là ? questionna James en fronçant les sourcils.
- Son père ne travaille absolument pas à l'Administration du Ministère. C'est une Langue-de-Plomb au département des Mystères. Je suis surpris de voir à quel point elle réussit à mentir sans sourciller.
James ouvrit la bouche pour répliquer quelque chose, mais déjà Emmeline revenait sur la terrasse, toujours aussi radieuse que d'habitude.
Lorsqu'elle partit par la petite porte de la clôture, les deux garçons s'engouffrèrent dans la tente, qui était bien plus spacieuse et aménagé que pouvait le laisser devine son apparence à l'extérieure. Sirius se jeta sur un pouf moelleux et étira longuement ses bras. La journée avait été mouvementée et il se sentait particulièrement fatigué. James, lui, avait retiré son tee-shirt et s'était étendu sur son lit, les mains posés sous sa nuque en guise d'appui.
- Je suis vraiment pressé de retrouver Poudlard, grogna Sirius.
- Ouais, fit James, la bouche légèrement sèche. Enfin, on a les ASPIC tout ça...
- Allez, ça va être amusant, s'exclama Black en se jetant sur le lit opposé à celui de James. Voir tous ces 7e année faire des crises de panique. Je te parie que la première qui pètera son câble chez les Gryffondor sera Evans.
- Pourquoi tu dis ça ? demanda précipitamment James, sentant son estomac se tendre.
- Parce qu'elle est tout le temps à stresser au sujet de ses études, expliqua Sirius d'une voix tranquille comme si l'explication était inutile.
James ne répondit rien, bien trop occupé à se souvenir du visage de Lily lorsqu'elle lui avait dit l'an passé qu'il était un type bien.
- Tu l'aimes bien, lâcha Sirius après un long silence.
- Qu... quoi ? marmonna James alors que ses mains devenaient brusquement moites.
- Je disais que Lily Evans, tu l'aimes bien.
Ce n'était pas une question, c'était une simple constatation, comme si Sirius avait réussi à percer son secret depuis si longtemps que cette révélation n'en paraissait presque plus une. Il avait dit ça d'une voix très calme, sans aucune once de moquerie ou de méchanceté.
- ... Ouais, acquiesça James, je l'aime... bien, ouais. Et toi, il y a quelqu'un que tu aimes bien ?
- Pas particulièrement non, répondit Sirius un peu trop vite à son propre goût.
Dans son esprit, les cheveux bruns relevés laissant dévoiler la longue nuque fine de Dorcas apparurent doucement...