Voyage au centre du soleil

De Takatsuki7

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Yona, une jeune bûcheronne du nord du continent de Wêreld, frôle la mort lors d'une avalanche. Miraculeusemen... Mai multe

Prologue - Voyage vers l'inconnu
Chapitre 1 - Un début d'aventure inattendu
Chapitre 2 - Contrats
Chapitre 3 - Passés et avenirs
Chapitre 4 - Découvertes et rencontres
Chapitre 5 - L'histoire de Koud
Chapitre 6 - Honnêteté, ou loyauté ?
Chapitre 7 - La naissance d'une amitié
Chapitre 8 - Au cœur de la nuit
Chapitre 9 - Confrontations - Partie 1
Chapitre 9 - Confrontations - Partie 2
Chapitre 10 - Bienvenue à Newels - Partie 1
Chapitre 10 - Bienvenue à Newels - Partie 2
Chapitre 11 - Survie dans la brume
Chapitre 12 - La dure réalité
Chapitre 13 - Un pas vers sa destinée
Chapitre 14 - De promesses en promesses
Chapitre 15 - Convalescence
Chapitre 16 - La raison de mettre sa vie en jeu
Chapitre 17 - L'élu des dieux
Chapitre 18 - Tout ce qui reste à accomplir
Chapitre 19 - Quelque chose de bien plus grand
Chapitre 20 - Le doute permanent
Chapitre 21 - La ville-étape
Chapitre 22 - L'arbre né d'une légende - partie 2
Chapitre 23 - Nouveau départ
Chapitre 24 - Le troisième compagnon
Chapitre 25 - La forêt de Dood
Chapitre 26 - La deuxième épreuve
Chapitre 27 - Une nouvelle destination
Chapitre 28 - L'arrivée à Liggewig
Chapitre 29 - Les débuts au palais
Chapitre 30 - Jeux
Chapitre 31 - Ainsi fonctionne la magie
Chapitre 32 - Routine productive
Chapitre 33 - Le lieu de la troisième épreuve
Chapitre 34 - Parmi les nobles
Chapitre 35 - Le début de la troisième épreuve
Chapitre 36 - En effervescence
Chapitre 37 - Dîner
Chapitre 38 - Se souvenir et affronter
Chapitre 39 - Compte à rebours
Chapitre 40 - La vente aux enchères
Chapitre 41 - Tout rentre dans l'ordre
Chapitre 42 - Trinquer à l'avenir
Chapitre 43 - Qu'un au revoir
Chapitre 44 - Les dangers de l'océan
Chapitre 45 - Nouvelle Force
Chapitre 46 - Rixe mouvementée
Chapitre 47 - Voyage à quatre
Chapitre 48 - L'heure de la vengeance
Chapitre 49 - Vivre jusqu'au bout
Chapitre 50 - Un moment hors de tout
Chapitre 51 - La quatrième épreuve
Chapitre 52 - Impasse
Chapitre 53 - À rien de la fin
Chapitre 54 - La vérité sur le Soleil
Chapitre 55 - Le berceau de la magie
Chapitre 56 - Invasion
Chapitre 57 - Faire la différence
Chapitre 58 - Victoire amère
Chapitre 59 - Débuts en Terre Sainte
Chapitre 60 - Au cœur des dunes
Chapitre 61 - La fin du début
Épilogue - Horizons

Chapitre 22 - L'arbre né d'une légende - partie 1

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De Takatsuki7


Au cœur de Veg, la grande arène hurlait de vie. De loin la plus impressionnante de la ville, elle se situait en son exact milieu. Ici, de nombreux combats se déroulaient à toute heure du jour. Des duels, des batailles d'équipes, des mêlées générales en chacun pour soi... Les organisateurs qui géraient la cité cachée aux pieds de petites montagnes ne manquaient pas d'imagination pour maintenir l'excitation que ressentaient les spectateurs en ce moment même. Du moins, presque tous.

Gereg Moeg comptait parmi les personnes simplement assises, observant avec attention le combat. Deux guerriers se battaient avec hargne, l'un équipé d'une masse, l'autre d'un large bouclier et d'une épée courte. Mais pour le vétéran d'une quarantaine d'années au crâne dégarni, ils ne s'agissaient que de jeunots encore immatures. Voulant se montrer plus spectaculaire qu'efficace, il trouvait de nombreuses failles dans leurs déplacements, autant offensifs que défensifs.

Un assaut du type à la masse fit tomber son adversaire, qui ne se releva pas, faute d'une succession de coups sans aucune pause. L'arme finit par éclater le crâne du combattant au bouclier. Le gagnant se dressa de toute sa hauteur et parada sous l'acclamation des spectateurs. C'était ça, Veg.

Certains y venaient pour faire gloire dans les combats d'arènes en tant que gladiateurs, mais la ville s'avérait bien plus riche que ça. Les meilleurs artisans d'armes et d'armures s'y trouvaient, ainsi que des artéfacts en tout genre. Mais c'était aussi l'endroit idéal pour y recruter des hommes prêts à mettre leurs vies en joue pour une bourse plus ou moins pansue. Certains avaient commencé ici pour devenir des fins tacticiens respectés de tous, ou des oubliés morts trop tôt.

Mais Gereg ne se trouvait pas là pour ça. Il possédait tout l'équipement qu'il nécessitait — entassé dans son vieux sac de voyage à ses pieds — et ne souhaitait travailler avec personne. Il soupira devant une fin de combat à ses yeux si molle, et se leva pour partir. Il n'eut d'ailleurs aucun mal, car les autres spectateurs faisaient en sorte de rester à une certaine distance. En effet, malgré un physique commun — un teint légèrement bronzé par le voyage, de petits iris noirs ainsi qu'un visage banal —, cet homme de taille moyenne tenait une réputation qui gardait en respect n'importe quelle personne du milieu. Il se déplaça vers une des sorties de l'arène, au centre d'une foule qui s'écartait sans même qu'il ait à lever le petit doigt.

Une fois dehors, il analysa l'allée rapidement, et partit sur la gauche. Les bâtiments tantôt en bois tantôt en pierre jamais plus hauts de deux étages formaient des rues des plus mal organisées. Contrairement à une ville plus classique, Veg s'était construite sur le tas, avec les vagues d'arrivées plus ou moins chargées. Ainsi, quand un emplacement s'avérait intéressant, la personne s'y installait. Certains propriétaires mettaient en place des pavés dans les alentours, selon une norme obtenue à la majorité, mais sans pour autant dépasser les quelques pieds autour de leurs bâtisses. Il n'y avait aucun système hiérarchique, mais un code qui régissait tous les comportements à avoir.

Tout d'abord, les plus respectés étaient les artisans. Qu'ils soient forgerons, bijoutiers, créateurs d'artéfacts, tisserand ou quoi que ce soit d'autre, cela n'avait aucune importance. Ils possédaient une sorte d'autorité, car ils étaient l'origine de tout ce qui se rapportait au combat. Sans outil de guerre, comment tous les visiteurs de Veg exerceraient-ils leur profession ?

Gereg s'arrêta à un carrefour, regarda la position de Soleil dans le ciel, et reprit son chemin. Beaucoup de passants ralentissaient leur allure afin de confirmer qui ils avaient bien en face d'eux, ce qui l'agaça comme toujours. Pourtant, il n'avait rien d'extraordinaire. Légèrement voûté, il avançait d'un pas lent et assuré, mais en aucun cas menaçant. Cependant, tous savaient qu'il ne fallait pas se fier aux apparences. L'air inoffensif, cet homme était capable de vous ôter la vie avant même que vous ne compreniez ce qu'il se passe.

Après près d'une heure de balade en ville, il s'arrêta au niveau du bar d'une échoppe proposant des missions. C'était une pratique très courante à Veg. Pour centraliser les informations, des commerces s'étaient spécialisés dans les offres d'emplois. Ainsi, il suffisait de se rendre dans une de ses « agences » — comme les appelaient les locaux — pour trouver son bonheur. Gereg s'accouda au bar qui donnait directement sur la rue, et un homme grand et fin aux cheveux bouclés s'approcha de lui.

– L'Invincible ! En chair et en os ! lança le propriétaire de l'agence plein d'enthousiasme.

– Tu sais bien que je n'aime pas ce titre, rouspéta Gereg. Tu as quelque chose pour moi ?

– Tu ne changeras jamais, hein ? Pas même un « bonjour comment vas-tu » ? Tu me brises le cœur !

Il joua la comédie, feignant de s'évanouir. Le vétéran plongea quelques doigts dans sa bourse, et en sortit plusieurs pièces. En entendant le son de l'argent retentir, son interlocuteur regagna toute sa splendeur. Et alors qu'il allait s'en emparer, Gereg lui saisit le poignet.

– Ne changeons pas les habitudes, mon cher Kap. Les informations en premier.

– Décidemment, l'âge ne t'adoucit pas.

Kap détendit sa main, pour prouver qu'il parlera d'abord.

– Je suppose que si tu reviens ici, c'est que ça n'a rien donné la dernière fois ?

– Des mois de voyage pour rien. Pas une trace, pas un indice rien, pesta Gereg.

– Dommage, mais ne te montre pas si ronchon. Tu as de la chance, j'ai encore mieux que des rumeurs. Cette fois, l'information est sûre.

– Sûre comment ?

– Aussi sûre que la valeur de ces pièces !

Gereg rajouta une d'or au tas, que Kap accepta avec un franc sourire.

– Ils sont sur un nouveau contrat, un homme et une femme. Le premier doit avoir à peu près ton âge, une tête de moins, avec une queue de cheval, assez friqué. Un dénommé Ries. La deuxième est beaucoup moins vieille, mais à un physique qui calmerait la moitié de cette ville. Grande et musclée, voilà ce que j'ai comme description. Étonnamment, il faut capturer l'homme en vie. Je ne possède pas de précision pour la femme. Ils ont quitté Narvosing il y a à peu près une semaine pour se diriger vers le sud, si j'en crois ma source qui est arrivée à peine hier. Tu devrais aller vers Kruis, il y aura sûrement une piste que tu sauras remonter.

– Merci, répondit simplement Gereg en se détournant.

– Tu ne voudrais pas laisser tomber ? Pourquoi tu t'entêtes autant ?

En entendant ces questions, L'Invincible se retourna, le regard dur.

– Pour trouver la paix.

Et il s'en alla vers l'écurie où se reposait son cheval, déterminé à accomplir son objectif.

Après un repas mangé sur le pouce — une sorte de pâte en grain fourré à la viande —, Yona et Ries reprirent leurs achats. La journée était déjà bien avancée, et le Soleil avait dépassé son zénith depuis bien deux heures. Pourtant, il n'avait encore qu'effectué très peu d'emplettes.

En effet, le marchand se montrait perfectionniste sur les biens qu'il achetait. En premier, ils s'étaient occupés de la nourriture. Bien loin des repas riches que Yona avait l'habitude de manger à Verlore, ici, il fallait mettre en avant leur capacité de conservation à l'air libre. Ainsi, les deux éléments fart ne pouvaient être d'autres que les aliments secs et le fromage. Pour la partie sèche, la viande demeurait bien évidemment au cœur du sujet. Bison, agneau, mouton et autre race que la bûcheronne ne retint pas, tout semblait possible de transformer dans un format adapté au voyage. Ils restèrent plusieurs dizaines de minutes dans une boucherie spécialisée dans ce type de mets, goûtant échantillon sur échantillon. Une fois faits, ils passèrent au fromage, ce qui de nouveau prit bien plus de temps que la garde du corps l'aurait pensé. Pas moins de trois boutiques se révélèrent nécessaires pour satisfaire son employeur. Ce dernier l'avait finalement emmené dans une échoppe proposant des fruits en tout genre de la région, notamment certains qui semblaient anormalement maigres, à la limite du pourri. Mais Ries affirma qu'il s'agissait seulement de fruits secs, ce que confirma le vendeur. Ils en achetèrent plusieurs assez différents — hormis cet aspect ridé sur tous — pour que Yona puisse goûter dans les jours à venir. Ils terminèrent par quelques plantes que la bûcheronne s'avéra bien incapable d'identifier, que ce soit leur nom ou leur utilité.

Ne possédant qu'un sac en toile — ils avaient oublié les sacoches de selle à l'auberge —, Yona alarma son compagnon sur le transport du reste des emplettes. Sans hésiter, Ries ne mit pas plus de quelques minutes à trouveur un loueur d'une brouette, très présent dans une ville reposant majoritairement sur les achats de ses visiteurs. La garde du corps avait déjà aperçu ces charrettes miniatures dans les champs pendant leurs voyages, mais elle ne s'était jamais attardée dessus. La contrôler fut bien plus compliqué qu'elle ne l'aurait cru, mais elle s'y adapta très rapidement.

Ils acquirent ensuite des selles plus confortables, notamment grâce à l'épaisseur du cuir ainsi que sa qualité. De plus, pour la première fois, elles étaient équipées de petit pommeau à l'avant, permettant d'y coincer les rênes lors de long voyage comme le leur.

Depuis qu'elle était entrée dans la ville, Yona était comme attiré par la joie qui y régnait. Une milice efficace patrouillait régulièrement dans les rues, dissuadant sûrement de nombreux crimes. Aucun quartier ne semblait plus malfamé qu'un autre. Une paix simple, rythmée par l'affluence des voyageurs qui arrivaient et partaient de la cité à toute heure du jour, et peut-être même de la nuit. Cependant, cette bonne humeur fut atténuée d'un seul coup par la vue d'enfants. Un garçon et une fille promenaient un chien attaché par une corde, riant et courant de partout. À cette vision, la bûcheronne ne put s'empêcher de penser à Jamer, et à tous les bons moments qu'ils avaient participé plus jeunes. Jamer avait été à peu de choses près le seul enfant qu'elle avait vraiment fréquenté et appris à connaître. Sa perte, encore récente, s'apparentait une plaie béante dans son cœur. La poitrine de la garde du corps se serra, elle terra au fond d'elle un nouveau flot de larmes, et continua son après-midi en tachant de paraître naturelle.

Après les selles, Ries conduit Yona vers un marchand d'artéfacts. Après au moins deux dizaines de minutes, il en ressortit, pendant que la garde du corps attendait à l'extérieur avec la brouette.

- À quoi servent-ils ? demanda-t-elle en pointant les deux nouvelles acquisitions.

– Oh, trois fois rien, resta-t-il évasif. Tu auras l'occasion de les tester très rapidement ! Dès que nous quitterons la ville, je pense.

Sachant qui elle avait en face, elle n'insista pas, et verrait bien par elle-même bientôt. Elle réalisa que ce voyage, parmi beaucoup de choses, lui ferait vivre des moments de patience qu'elle ne se savait pas capable.

Sans qu'elle s'en aperçoive, tous ses achats leur avaient pris une bonne partie de la journée. Le Soleil se trouvait déjà à la moitié de sa descente. Ries proposa donc de rentrer à l'auberge, ce que Yona accepta volontiers. Ses jambes la piquaient depuis déjà plusieurs heures, et un peu de repos ne pourrait pas lui faire de mal.

Une fois arrivé aux Racines du ciel, Ries se chargea tous les achats pour laisser Yona aller s'allonger. Mais alors qu'elle allait prendre l'escalier, le marchand l'interpella.

– Yona ! Quand le Soleil sera à moitié caché derrière l'horizon, je viendrais te chercher. J'ai une surprise pour toi ce soir !

Elle fut intriguée, mais ses jambes restèrent une priorité, et elle se dépêcha d'aller dans sa chambre.

Malgré ses questionnements concernant la fameuse surprise, le confort du lit prit le dessus, et elle s'endormit rapidement... et se réveilla aussitôt. Du moins, c'est l'impression qu'elle eut. Pourtant, la luminosité avait bel et bien changé, assurant que du temps avait passé. De nouveaux coups sur la porte firent émerger pour de bon Yona, qui — déjà habillée — s'avança rapidement vers l'entrée de la chambre, malgré des jambes raides comme des piquets de bois. Ries se tenait dans le couloir, un sourire en coin encore plus prononcé que d'habitude.

– Oh, je vois que je te réveille. Mais peu importe ! Nous devons y aller pour profiter au maximum du moment très spécial qui nous attend. Ça sera une première pour toi !

Et étonnamment, à la place de descendre vers le rez-de-chaussée, Ries se dirigea vers le haut du bâtiment. Ils montèrent deux étages, pour finalement arriver sur le toit. Sans laisser le temps à Yona de réagir, son employeur la tira vers une des multiples tables disposées.

– Mais qu'est-ce que c'est que tout ça ? demanda totalement surprise la bûcheronne.

– Ça ne se voit pas ? C'est un service que propose l'auberge. On peut y manger et boire exactement comme à la salle commune !

En effet, maintenant qu'il le disait, cela sauta aux yeux de Yona. Elle observa autour d'elle, et presque toutes les tables étaient pleines, les clients dégustant un repas comme si de rien n'était. Toutes les consommations étaient acheminées par un monte-charge au centre du toit, permettant d'amener sans effort les commandes. C'est d'ailleurs en croisant le regard d'une serveuse qu'elle s'approcha.

- Que puis-je vous servir ? lança-t-elle souriante.

Ries prit la parole, commandant pour les deux.

– Le menu complet du jour ! Et un pichet de votre meilleur vin !

La serveuse hocha la tête rapidement, et partit aussi vite qu'elle était arrivée.

La température était fraîche, mais très agréable. Les clients discutaient vivement, mais sans aucun débordement qu'elle pouvait habituellement apercevoir dans les salles communes. Mais c'est surtout la vue qui faisait toute la différence.

En face d'elle se tenait l'arbre gigantesque signature de Kruis. Seule sa moitié supérieure était encore éclairée par le Soleil, mais la luminosité s'avéra assez élevée pour apprécier l'entièreté du végétal.

L'entrée arriva avec le vin après un peu d'attente. Pour commencer le repas, un bouillon opaque en apparence simple, mais au goût riche accompagna leur boisson, le tout la réchauffant comme il le fallait. Le plat suivit : une généreuse pièce de bœuf cuite à la perfection, servie avec des haricots verts tendres et des pommes de terre fondantes. Et pour terminer en beauté, une tarte aux poires sucrée à souhait.

Repue, la bûcheronne se laissa petit à petit glisser dans sa chaise, son corps occupé à digérer la nourriture, mais aussi le deuxième pichet de vin qui avait pris le relais du premier.

L'atmosphère s'assombrissait de plus en plus, mais pour autant, personne ne semblait près de partir. Quand elle souleva ce point à Ries, il regarda l'horizon quelques instants, avant de lui répondre.

– C'est parce que le meilleur moment ne devrait pas tarder !

Il tourna sa chaise, pour lui aussi faire face à l'arbre géant. Les autres clients devinrent de plus en plus silencieux, jusqu'à ce que plus aucun bruit ne sorte de leurs bouches. Une minute passa ainsi, puis deux, et une troisième. Yona commença à trouver ça long, mais elle n'osa pas briser la parfaite harmonie qui s'était emparée du toit en quelques instants.

Et d'un coup, toute cette attente en valut le coup. Depuis les premières feuilles de l'arbre jusqu'à la cime, des centaines, non, sûrement des milliers de points lumineux illuminèrent le ciel ! D'abord uniformément d'un jaune vif, les couleurs se mirent à changer, glissant sur le rouge, plus le vert, le bleu, et toutes les variations possibles !

Un véritable festival de couleurs se déroula sous les yeux ronds de Yona, rempli d'émerveillement pour ce phénomène. Elle ne battit pas une seule fois des paupières, comme si son corps entier voulait profiter de ce moment unique.

– Ce sont des Vurli, lui souffla doucement Ries. Leurs abdomens se colorent à la tombée de la nuit, pouvant atteindre jusqu'à quatre cents nuances différentes !

Yona se contenta de hocher la tête, refusant catégoriquement de se détourner de l'arbre. Ces drôles d'animaux, par leurs mouvements, formaient des sortes de vagues de couleurs. Comme synchronisés mystérieusement, les lumières volantes donnaient comme des pulsations au végétal. Yona aurait dit que c'était l'arbre directement qui exprimait sa vitalité à travers ces couleurs.

Les vagues partirent des racines pour atteindre plusieurs minutes plus tard la cime. Enfin, c'est ce qu'elle supposa, car elle était bien incapable de discerner avec précision un endroit aussi haut.

Et d'un coup, suivant le sens des vagues, les lumières s'éteignirent progressivement, jusqu'à replonger dans l'obscurité le ciel. De suite, les serveuses allumèrent des bougies, et les clients quittèrent le toit.

- Déjà ? demanda Yona, qui aurait voulu passer des heures devant un spectacle si magnifique.

– Les plus grandes beautés s'avèrent souvent les plus éphémères, lui répondit Ries. Je ne suis pas expert, mais il me semble que ces créatures se reposent toute la journée, en se nourrissant exclusivement de la vitalité de l'arbre, qui semble inépuisable ! Et une fois la nuit tombée, elles réalisent ce court, mais exceptionnel divertissement ! Cela t'a plu ?

– Ca restera gravé dans ma mémoire à jamais ! lança Yona l'esprit encore plein de couleurs.

Ravi de son succès, Ries invita sa partenaire de voyage à imiter les autres clients, et à regagner leurs chambres respectives pour une bonne nuit de sommeil.

Une fois les ablutions du soir achevées, Yona s'emmitoufla sous les couettes, se réchauffant agréablement. Le spectacle lui avait fait oublier tout le reste, mais la nuit, les températures baissaient drastiquement !

Elle fixa le plafond — qui tournoyait légèrement —, et se repassait en boucle les souvenirs qu'elle venait de se créer ce soir. Les premiers aussi joyeux depuis des mois. Rapidement, le sourire aux lèvres, elle s'endormit profondément.

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